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lundi 6 août 2018

914-"PRIÈRE DE PERCEVOIR L'INVISIBLE !"-IMPLICATION DU SPECTATEUR-6




- DUCHAMP Marcel (1887-1968), Air de Paris ou 50 cc d'air de Paris, 1919,
ampoule de sérothérapie en verre emplie d'air de Paris, avec l'étiquette "Sérum physiologique", H : 13,3 cm, Philadelphia Museum of Art
(ampoule rapportée de France et offerte comme cadeau original à son ami et mécène Walter Arensberg ; l'ampoule s'est brisée en 1949 et a été restaurée : la même année, l'artiste a fait emplir une nouvelle ampoule chez un pharmacien parisien ; enfin, en 1964, l'oeuvre a été dupliquée en plusieurs exemplaires).

- HAACKE Hans (né en 1936), Condensation Cube, 1963-65,
plexiglas et eau, 76x76x76 cm,
un bac rempli d'eau distillée est placé dans le cube de plexiglas avant que ce dernier ne soit scellé. Selon la température (lumière, chaleur), des phénomènes de condensation se manifestent à l'intérieur du cube aux parois intérieurs toujours plus chaudes que les parois extérieures. De la buée puis des gouttes et des traces de leur parcours se forment sur les parois intérieures. C'est à l'observation de ce processus physique , perpétuel mais jamais identique, que l'artiste convie le spectateur.


- BEUYS Joseph (1921-1986), Intuition, 1968,
boîte vide en bois d'environ 30x21x5,8 cm,
À partir de 1968, ce coffret en bois de format A4, vendu au prix de 8 deutsche marks, a été tiré à environ 12 000 exemplaires. Diffusé à la manière d'une brochure, le slogan «Intuition» enregistre sur deux traits de crayon la contre-thèse de Beuys sur le matérialisme et le rationalisme dans le contexte de 1968 et son débat politique. La boîte en bois vide était censée devenir un objet d'usage quotidien, l'intuition pouvant lui donner un nouveau sens.





  - OROZCO Gabriel (né en 1962), Empty Shoe Box, 1993,
épreuve argentique, 12.4 x 33 x 21.6 cm, New York, Marian Goodman Gallery.
La boîte ouverte et vide, posée sur le sol, est parfois poussée du pied par le spectateur qui s'interroge sur sa présence. Simple ready-made apparent, elle vient en écho à l'espace minime et quadrangulaire alloué à l'artiste à la Biennale de Venise de 1993. Volume vide d'objet, la boîte contient également l'espace environnant, l'air ambiant et le monde.

- WHITEREAD Rachel (née en 1963), Untitled Monument, 2001,
Londres, Trafalgar Square, commande pour un piédestal vide pour lequel l'artiste réalise un moulage en résine inversé, transparent et vide.



DÉAMBULER, CHERCHER, METTRE SON CORPS À L'OEUVRE,
DÉCRYPTER LE VIDE, LE LIEU, L'ESPACE, L'AIR, L'INVISIBLE, L'ABSENCE, 
OBSERVER, ÉCOUTER, RESSENTIR,
SAISIR LE CONCEPT, (RE)PENSER LE MONDE, SE RECUEILLIR


- KLEIN Yves (1928-1962), La spécialisation de la sensibilité à l'état matière première en sensibilité picturale stabilisée, 1958,
Exposition Le Vide, paris, Galerie Iris Clert, 28 avril-12 mai 1958,
si l'espace intérieur est vide et blanc, tout ce qui est à l'extérieur (vitrine, rideau) 
et utilisé pour le vernissage est bleu (cartons d'invitation, timbres, cocktail).

- KLEIN Yves (1928-1962), Immaterieller Raum, 1961,
Krefeld, Museum Haus Lange,
salle « vide » dévolue à la « sensibilité picturale immatérielle ».



- MANZONI Piero (1933-1963), Le Socle du Monde, Socle magique n° 3, Hommage à Galilée, 1961,
cube de fer et bronze, au titre gravé, 82x100x100 cm, Herning (Danemark), jardin du Kunstmuseum
sur le socle à l'envers, le monde entier repose, en tant qu'oeuvre d'art totale.


 - ART & LANGUAGE (Collectif), The Air-Conditionned Show, 1966-1967,
 textes et croquis de 1966 puis série d'expositions de 1967 avec ces mêmes textes essayant de définir
la nature de l'oeuvre et une salle vide munie d'un climatiseur dans laquelle le visiteur est plongé.



- OLDENBURG Claes (né en 1929), The Hole ou Placed Civic Monument ou Burial Monument, 1° octobre 1967,
New York, Central Park, à l'arrière du Metropolitan Museum of Art, pour la manifestation "Sculpture in Environment",
l'artiste a fait creuser une fosse, il expose ainsi une sculpture négative, un monument invisible, l'espace creusé et la matière évacuée.


 - CHRISTO (JAVACHEFF Christo, né en 1935) et JEANNE-CLAUDE (DENAT de GUILLEBON Jeanne-Claude, 1935-2009), Corridor Store Front, 1968,
MAMCO de Genève,
  Dès 1964, Christo réalise des devantures de magasins grandeur nature, en assemblant d’abord des objets trouvés (à New York, Paris et Toulouse), en se servant ensuite de matériaux neufs. A l’occasion de l’exposition internationale Documenta 4 à Kassel en 1968, il réalise le Corridor Store Front. Véritable environnement qui incite le spectateur à s’engager dans un corridor menant à une porte fermée, ce travail présente des vitrines parfaitement transparentes, mettant en évidence la vacuité de l’ensemble.


- BARRY Robert (né en 1936), 1600 kc Carrier Wave (AM), 1968,
Exposition "January 5-31 1969", organisée à New York par Seth Siegelaub,
champ électro-magnétique, 1600 kilocycles, 60 milliwatts, 110 volts (AC/DC).

- BARRY Robert (né en 1936), Inert Gaz series, Krypton, march 1969, Beverly Hills, California,
"one liter ok Krypton was returned to the atmosphere",
seul le cartel ou les photos légendées gardent trace de la libération puis la disparition
de petites quantités de gaz dans l'atmosphère H(elium, Neon, Argon Krypton, Xenon).



- ASHER Michael (1943-2012), Installation, 1970, Claremont (Californie), Pomona College Museum of Art,
l'artiste conceptuel modifie deux des galeries adjacentes au musée, en les transformant en deux espaces triangulaires reliés par une étroite ouverture qui limite fortement le flux de lumière dans l'un des espaces, tout en gardant l'autre espace sans portes, ouvert jour et nuit et introduisant la lumière, l'air et le bruit de la rue dans la galerie.


- IRWIN Robert (né en 1928), Experimental Situation, Ace Gallery, Los Angeles, 1970,
 l'artiste vide entièrement la galerie et effectue des visites quotidiennes pendant un mois en ne
remplissant l'espace que par sa contemplation artistique. Le processus de la pensée créative d'Irwin est devenu le produit final


- ASHER Michael (1943-2012), Installation, Galleria Toselli, Milan, 1973,
 l'artiste fait décaper à la sableuse la totalité des murs, du sol et du plafond de la galerie. Les couches successives de peinture blanche,
traditionnellement réemployées entre chaque exposition, sont ôtées jusqu’à ce qu’apparaisse, nue, la structure en béton du bâtiment,
dépossédée de sa couleur de monstration.


- PENONE Giuseppe (né en 1947), Barra d'Aria, 1969, Galleria Gian Enzo Sperone, Torino,
parallélépipède de cristal, 10x10x120 cm (ou 15x15x100 cm), traversant horizontalement la vitre
 d'une fenêtre pour faire entrer les bruits déformés et amplifiés de la ville, Collection Michelangelo Pistoletto Biella.


- WARHOL Andy (1928-1987), Invisible Sculpture, 1985, New York Club Area,
socle vide accosté du cartel suivant, "Andy Warhol, USA/Invisible Sculpture, Mixed Media".


- PARSONS Laurie (née en 1959), Untitled, Lorence-Monk Gallery, 1990,
le nom de l'artiste absent du carton d'invitation, pas d'oeuvre dans la galerie,
pas de cartel à son nom, pas de trace dans sa biographie officielle, New York, Lorence-Monk Gallery.


- BOLTANSKI Christian (né en 1944), La Maison manquante, 1990, Grosse Hamburgerstrasse, Berlin,
exposition Die Endlechkeit der Freiheit réalisée lors de la réunification des deux Allemagne,
emplacement d'une maison détruite par une bombe en 1945 et ayant tué ses habitants ; l'artiste recense les habitants de cette maison, effectue une recherche dans les archives et expose la documentation trouvée, et parallèlement installe à proximité des appartement disparus des plaques blanches sur les murs mitoyens, avec inscrits en noir les noms, métiers et dates de mort des habitants, dont une vingtaine, de confession juive, avaient préalablement été déportés et assassinés par les nazis. Le vide évoque ici un travail et un lieu de mémoire, l'absence et la mort.


- GERZ Jochen (né en 1940), 2167 pavés, Monument contre le Racisme, 1990-93, Sarrebruck,
l'artiste, aidé d'une dizaine d'étudiants de Beaux-Arts, descelle clandestinement des pavés de la place du Château (ancien quartier général de la Gestapo et siège actuel du Parlement régional) et y grave les 2167 noms des cimetières juifs d'Allemagne antérieurs en 1939 et en partie détruits, puis photographie les pavés avant de les remettre en place, l'inscription tournée vers le sol. L'oeuvre a été officialisée en cours de route et la place renommée "Place du Monument invisible". L'oeuvre est tout à a fois monumentale, invisible et omniprésente, les gens traversant la place portant la mémoire des faits et des gens, contre l'oubli.


- OROZCO Gabriel (né en 1962), Yogurt Caps, 1994,
4 couvercles de yaourts de 7,9 cm de diamètre chacun, installation à la Marian Goodman Gallery de New York.
Les spectateurs découvrent avec surprise une salle vide. Après observation, cette salle est juste ponctuée d'un cercle transparent (couvercle de pot de yaourt avec étiquette de prix et tampon de date de péremption mais sans le pot de plastique ni le laitage) au rebord bleuté, positionné à hauteur de la bouche sur chacun des 4 murs, comme les 4 points cardinaux. L'espace vide de la pièce fait partie de l'oeuvre, de la même façon que les spectateurs qui tournent dans la pièce pour voir tour à tour les 4 couvercles, sans jamais pouvoir les embrasser tous du regard.


- ELIASSON Olafur (né en 1967), Your Sun Machine, 1997,
Los Angeles, Marc Foxx Gallery,
découpe d'une ouverture circulaire dans le plafond de la galerie entraînant le lent voyage
 du faisceau lumineux tout le jour, révélant au spectateur le mouvement de la terre par rapport au soleil.


- HEIN Jeppe (né en 1974), Invisible Labyrinth, 2005,
si la pièce est vide, les visiteurs munis d'écouteurs numériques parcourent l'espace et font le spectacle ; en fait, des parcours sont balisés
par la technologie infra-rouge et les écouteurs vibrent à chaque fois que le visiteur entre dans le mur invisible de l'une des 7 galeries.


- CREED Martin (né en 1968), Work n° 227: The lights going on and off, 2001, Tate Modern,
les lumières allumées et éteintes consistent en une pièce vide remplie de lumière pendant cinq secondes, puis plongée dans l'obscurité pendant cinq secondes. Ce modèle est répété à l'infini. En exploitant les luminaires existants de l'espace de la galerie, Creed crée un effet nouveau et inattendu. Une pièce vide avec un éclairage qui semble mal se comporter confond les attentes normales du spectateur. Ce travail remet en cause les conventions traditionnelles de présentation de musée ou de galerie et, par conséquent, l'expérience de visite.
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- TIRAVANIJA Rirkrit (né en 1961), A Retrospective (Tomorrow is Another Fine Day), 2005,
Paris, Couvent des Cordeliers,
pour sa rétrospective, l'artiste n'expose pas d’œuvres mais il reconstitue, notamment, à échelle réduite les cimaises de sept de ses expositions internationales antérieures.


- ONDAK Roman (né en 1966), More Silent Than Ever, Paris, Galerie GB Agency, 2006,
installation avec néons au plafond dans un espace vide censé, selon le cartel, être équipé d'un système d'écoute caché ; 
ce dispositif conduit le spectateur à rechercher ce système d'écoute et à croire que quelque chose d'invisible lui échappe.


- MOSSET Olivier (né en 1966), Fenêtres, 2006, Paris, Palais de Tokyo.
Invité à intervenir sur les fenêtres du restaurant du Palais de Tokyo, Olivier Mosset reprend à son compte une citation d’Ellsworth Kelly : 
"En octobre 1949, au Musée d'art moderne de la Ville de Paris, je remarquai que les fenêtres m'intéressaient plus que les œuvres exposées dans les salles." 


- SIERRA Santiago (né en 1966), 245m3, 2006,
l'artiste transforme, à Pulheim-Stommeln (près de Cologne), une ancienne synagogue allemande en chambre à gaz, en garant six voitures, moteur en marche le long de ses murs et en transmettant par autant de tuyaux leurs gaz d'échappement à l'intérieur. Les visiteurs n'entrent qu'après avoir signé une décharge, mis un masque à gaz et sont accompagnés d'un pompier. L'exposition fut rapidement interdite.


- PETITGAND Dominique (né en 1965), Les Ballons, 2006-2009,
 exposition "Quelqu'un est tombé", Saint-Ouen-l'Aumône, site d'art contemporain de l'abbaye de Maubuisson,
installation pour quatre hauts-parleurs diffusant de brefs bruits de chute résonants, dans trois espaces différents.


- DAHLBERG Jonas (né en 1970), Projet et Mémorial pour la tuerie d'Utoya du 22 juillet 2011,
île d'Utoya (Norvège), coupure de la pointe de l'île empêchant d'en atteindre l'extrémité, par une excavation de 3,5 m de haut ; un sentier puis un tunnel conduisent à cette coupure dans le paysage et permettent d'apercevoir sur la falaise opposée la plaque des noms gravés des victimes ;
 les déblais seront utilisés à Oslo même pour le second Mémorial, dans le quartier du gouvernement.
 L'excavation recrée l'expérience physique de la perte, du vide et de l'absence.


- GANDER Ryan (né en 1976), I Need Some Meaning I Can Memorise (The Invisible Pull), 2012, Documenta 13, Kassel,
 Une légère brise souffle sur tout le rez-de-chaussée de la Fridericianum, dont les chambres sont laissées presque vide. Ce n'est pas un vent fort, pas immédiatement reconnaissable comme artificiel, mais assez physique et de plus en plus fort pour créer un moment d'émerveillement chez le spectateur.