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INTRODUCTION
Le projet d'une voie carrossable remplaçant le sentier qui longe la plage de la Croizette/Croisette à l'est de la ville de Cannes, entre lande sablonneuse et terrains arborés, ne se concrétise qu'à partir de 1858. Les travaux vont être menés, en plusieurs étapes, tout au long des années 1860 et au-delà.
La construction du pont de la Fous/Foux pour enjamber
le ruisseau qui coupe le futur tracé du boulevard (décidée par le Conseil
municipal en janvier 1859), l'acceptation des déblais du chemin de fer
permettant de surhausser et d'élargir la voie (décidée en novembre 1860) et le
lancement des travaux (votés en janvier 1861 et achevés en novembre de la même année) laissent penser à une réalisation
des premiers états de ce boulevard entre 1859 et 1861 (Archives Municipales
de Cannes, Délibérations du Conseil, 1D15).
"Cannes (...) s'est donné route par ci,
promenade par là, un superbe chemin qui s'empare de la langue de
sable de la Croisette et abrège considérablement le trajet maritime vers les
Iles de Lérins"
(Journal de Monaco du 28 juillet 1861).
"La longue plage de la Croisette est devenue, depuis
l'année 1862 seulement, la promenade la plus fréquentée par les riches
étrangers qui ont établi à Cannes leur résidence d'hiver"
(Victor Petit, Cannes - Promenades des Etrangers
dans la ville et ses environs, 1868 p 227).
Il est difficile d'établir une chronologie précise des
premières constructions qui, prioritairement destinées aux hivernants (maisons
de rapport, villas, pensions, hôtels) viennent, dès 1858-59 (Note A), border le
côté nord du "chemin de la plage ou du cap de la Croisette", du "chemin vicinal" (classé ainsi fin 1860), de la "promenade de la Mer",
du "boulevard de la Croisette" ou du "boulevard de
l'Impératrice" (Note B).
Cependant, les documents conservés de cette
période, textes, plans, lithographies et photographies aident, non sans
tâtonnements et doutes, à en retracer en partie l'histoire.
UNE VUE DU PHOTOGRAPHE MESSY
Présentation
Cette vue panoramique de Cannes, prise depuis le môle
du port et l'enrochement nord du phare (vue sud-ouest/nord-est), montre avec
netteté une partie conséquente du boulevard de la Croisette mais pas son extrémité occidentale.
Son auteur est Emile Messy (Marseille 1835-Paris 1890),
portraitiste et paysagiste, qui est signalé comme photographe à Nice dès 1863
puis à Cannes dès l'automne 1865 (Les Échos de Nice du 7 octobre 1865) et qui conserve ces deux ateliers jusqu'en 1870
(voir sa biographie détaillée, ici).
L'image étudiée affiche à son revers, sous les armoiries anglaises, les deux adresses
imprimées des ateliers de Nice (Rue Paradis, 2. - Rue Masséna, 13. - au fond du
jardin, - Nice.) et de Cannes (Rue Grande, 3. - au fond du jardin - Cannes.).
Elle semble dater des débuts de l'atelier cannois (vers
1865-66) car elle affiche également le titre manuscrit, "Vue
depuis le môle du phare", précédé du "N° 1" qui la place en tête de la série des vues de la ville.
L'étude des bâtiments emblématiques présents dans l'image vient, pour sa part, confirmer une prise de vue datant au plus tôt de 1864, avec de gauche à
droite :
- le Casino Cresp à la façade flanquée de
tourelles crénelées, érigé de novembre 1861 à août 1863,
- le Grand Hôtel de Cannes, dont les nombreux et hauts pavillons couverts de dômes évoquent les façades du Palais des Tuileries (Paris), érigé de juin 1863 à octobre 1864
- et le Cercle Nautique avec sa rotonde de façade, érigé du printemps 1863 à octobre 1864 (mais encore dépourvu de ses extensions latérales, datant de 1868).
Cependant, l'absence du Café de la Rotonde, érigé de février à décembre 1865 sur le terrain arboré
situé à l'extrémité droite de l'image, implique une prise de vue
antérieure à sa construction.
La datation de la photographie peut donc être comprise entre le printemps ou l'été 1864, période d'achèvement du gros œuvre du Grand Hôtel de Cannes et du Cercle Nautique (qui n'ouvriront qu'en octobre), et février 1865, date de début de construction du Café de la Rotonde.
Cette vue, prise avant même l'ouverture de l'atelier cannois d'Emile Messy pose question. Le photographe a-t-il réalisé la série de vues cannoises à laquelle appartient l'image étudiée lors d'une excursion d'une journée, facilitée par la ligne de chemin de fer, ou bien lors de l'installation provisoire d'un atelier de portraits, comme il l'a fait à Monaco, en mai 1864, pendant deux semaines (Journal de Monaco du 5 mai 1864) ?
Une autre hypothèse mérite cependant d'être envisagée et retenue : les vues cannoises ne seraient pas l'œuvre d'Emile Messy mais celles du photographe portraitiste et paysagiste Jules Buisson (Cannes 1844-Cannes 1903, voir sa biographie ici) dont il a racheté le fonds en 1865, repris l'adresse et conservé le brevet royal (armoiries anglaises). Emile Messy n'a d'ailleurs édité, dans les années 1860, aucune autre photographie de paysage que celles de Cannes.
"Depuis le Cours jusqu'à la pointe de la Croisette,
apparaissent des villas coquettes et des hôtels à style monumental, un cercle -
Cercle nautique (...) ; et enfin le grand bâtiment dit le Casino (...).
Si on suit le quai de la Croisette, on rencontre
sur le chemin et dans ce quartier, qui date d'hier, environ vingt-cinq belles
maisons. Nul doute qu'entre le moment où j'indique ce nombre et celui où le
livre sera entre les mains du lecteur, ce chiffre ne se trouve de beaucoup
dépassé. C'est sur cette ligne qu'on voit le Cercle Nautique et le monumental
Hôtel Gonnet [erreur, il s'agit du Grand Hôtel de Cannes] qui
s'achèvent".
(Dr Lubanski, Guide aux stations d'hiver du littoral méditerranéen, pp 268 et 288-89, ouvrage préfacé en juillet 1864 et édité en 1865).
Description
La vue de Cannes (ville de 7.300 habitants environ ayant pour maire M. Legoff) date donc de 1864, et très probablement du printemps ou de l'été car elle montre de nombreuses cabines de bains, habituellement mises à l'abri le reste de l'année.
Elle dévoile le boulevard de la Croisette avec un ensemble de bâtiments qui ont tous été construits entre 1859 et 1864, ce qui implique de réviser la datation jusque là admise pour certains d'entre eux.
En dehors de quatre groupes de cabines de bains en bois et du Pont de la Foux en pierre présents sur la plage, la photographie d'Emile Messy présente 14 villas dont 1 maison individuelle, 4 maisons de rapport, 7 pensions ou hôtels, 1 Casino-Théâtre-Pension et 1 Cercle.
Les points forts du boulevard de la Croisette sont notamment déclinés dans les publicités des hôtels : une position abritée et centrale, proche de la Gare de chemin de fer et des édifices cultuels, au bord de la mer avec un superbe panorama sur les Monts de l'Estérel et des Îles de Lérins et une plage de sable fin.
A cette date, aucune plantation (arbre ou fleurs), aucun réverbère, aucun trottoir et aucun banc n'est présent sur le boulevard, en dehors des jardins des villas ceints de murets et de grilles. De la même façon, aucun magasin n'est présent dans cette zone résidentielle de bord de mer, en dehors des boutiques installées dans les rues perpendiculaires qui rejoignent la rue d'Antibes.
N.B. :
- La description ci-dessous de l'image, de la gauche vers la droite, concerne les constructions qui bordent les côtés sud et nord du boulevard de la Croisette mais également les bâtiments en retrait, lorsque leur terrain communique avec le boulevard
- Les changements de nom d'une même villa, relevés dans les différents types de documents entre 1859 et 1872, sont parfois dus au choix de l'affichage du nom du propriétaire ou de celui de l'occupant
- La numérotation adoptée ci-dessous et
reportée dans les différents détails de l'image ne correspond en rien à celle de la voie (inexistante, partielle, fluctuante ou
non précisée à cette date).
- Du fait de la numérotation des emplacements du boulevard, les notes de cet article adoptent un ordre alphabétique qui renvoie aux références des documents dépouillés entre 1859 et 1872, classés chronologiquement à partir de la note D.
1- Cabine de bains sur la plage
La cabine apparait isolée mais elle appartient à un groupe hors-champ qui s'échelonne jusqu'aux abords du Cours.
2- Villa érigée au plus tard en 1862, accueillant l'Hôtel
Victoria au plus tard en 1863
"L'Hôtel Victoria" est cité dans : l'Annuaire
des Alpes-Maritimes de 1864 (F), dirigé par G. Méry (comme
l'Hôtel des Princes) ; l'ouvrage d'Elisée Reclus de 1864 (G) ; le Panorama de la Ville de
Cannes de Victor Petit de 1865 (C) ; les Guides-Joanne de
1865, 1866 et 1867 (K) ; l'ouvrage de Ch. Th. Williams de 1867 (L) ; le Guide Murray de
1867-68 (M) ; le Plan de Cannes de 1869 (N).
C'est la "Villa Fabre" qui occupe ensuite l'emplacement de l'Hôtel Victoria sur le Plan de Cannes de 1871 (P), ce dernier ayant déménagé, vers 1870, tout au nord du territoire de la commune de Cannes, près du boulevard du Cannet, sur le chemin de Terrefial/Terrefiat/Terrafial.
3- Villa Delessert, érigée au plus tard en 1862 et accueillant
la Pension Montaret au plus tard en 1863
La "Villa et Pension Montaret pour Famille" est
citée dans : le Journal des Baigneurs du 5 juillet 1863 ; l'ouvrage du Dr Lubanski de 1864-65 (I) ; l'ouvrage du Dr
Lee de 1867 (L) ; l'ouvrage de V.
Petit de 1870 (O) ; le Plan de Cannes de 1871 (P).
4- Casino Cresp-Sicard, érigé entre 1861 et 1863, dénommé également Villa Beau-Rivage
Le chantier du Casino débute à partir de novembre 1861. Son
gros œuvre s'achève l'été 1862 mais son inauguration n'a lieu qu'en août 1863
(café, cabaret-théâtre et pension).
Le "Casino-Villa-Beau-Rivage" est cité dans
le Panorama de Cannes de V. Petit de 1865 (C).
La "Pension de la Villa Beau
Rivage" est citée dans Les Echos de Nice du 25
janvier 1866.
"L'Hôtel Beau-Rivage" est ensuite signalé dans
: Les Echos de Nice du 26 octobre 1867 ; le Guide Murray
de 1867-68 (M) ; le Plan de Cannes de 1869 (N)
; l'ouvrage de V. Petit de 1870 (O) ; le Plan de Cannes de
1871 (P).
5- Nombreuses cabines de bains présentes sur la plage, à
l'ouest du Pont de la Fous, face au Casino (malgré la vision faussée par la
perspective oblique).
6- Rue de la Fous/Foux
7 et 8- Jardins de la Villa Herman(n), comprenant l'Hôtel Herman(n) et plusieurs autres bâtiments érigés vers 1860-61, en
retrait du boulevard, tout au nord du terrain mais répartis des deux côtés
du ruisseau de la Foux qui, même une fois couvert et servant de rue, divise en
deux la propriété
La "Villa Herman" est citée, dès novembre 1861, en tant que "pension" (Léon Mahieu, Vie de Mgr Baunard, 1924 pp 47 et ss.).
"L'Hôtel des Etrangers", dirigé par M. L. Lesur, est signalé dès 1863, sans qu'il soit possible d'affirmer qu'il s'agit du nouveau nom de l'Hôtel Herman(n), même si des indices postérieurs semblent suggérer le même emplacement, à l'angle de la rue de la Foux et de la rue d'Antibes.
L'Hôtel est présent sous le nom "d'Hôtel des Etrangers" dans : les publicités du Galignani's Messenger parues du 24 octobre au 14 décembre 1863 ; l'Annuaire-almanach Didot et Bottin de 1864 (E) ; l'Annuaire des Alpes-Maritimes de 1864 (F) ; puis sous le nom de "Pension Lesur" dans les publicités du Galignani's Messenger d'octobre 1864.
Le "Jardin Hermann" est pour sa part cité, boulevard de l'Impératrice, dans l'ouvrage de V. Petit de 1870 (O).
La "Parfumerie Herman" est signalée (du même côté ouest du ruisseau) dans : le Plan de Cannes de 1871 (P) ; les Tableaux synoptiques de Cannes de 1871 (Q) et de 1872 (S).
La Villa accueillera, en 1871, "l'Hôtel de Gray",
cité au nord-ouest de la propriété sur le Plan de Cannes de
1871 (P). Ce dernier deviendra la même année, "l'Hôtel (de) Gray et d'Albion", tenu par
M. H. Foltz (Revue de Cannes du 22 octobre 1871).
Il est à noter que le prénom de M. Foltz, maître d'hôtel de
nationalité allemande, est "Herman(n)", ce qui n'est pas sans créer
une certaine ambiguïté avec le nom du parfumeur "Herman(n)" (prénommé
Louis) dont l'entreprise est située dans la même propriété.
9 et 10- Pont de la Fous/Foux (1859 ?) et ruisseau du même nom, dans un deuxième temps recouvert dans sa partie sud
Le pont est tout à la fois situé dans l'alignement du
boulevard de la Croisette et à l'embouchure du ruisseau.
Le cours de ce dernier va être recouvert dans sa partie la
plus proche de la mer qui traverse la Villa Herman(n), afin de former une rue perpendiculaire au boulevard de la Croisette.
Cette couverture, postérieure à 1859, est au plus tard
réalisée en 1866 car la rue est officiellement dénommée "rue Macé" en
septembre de cette année-là (B).
Cependant cette rue est dénommée "chemin des
Cannettans" (du nom des habitants du Cannet qui l'utilisent pour
rejoindre Cannes) dans le Recensement de Cannes de mai 1866 (J) et "rue des Cannettans" dans l'ouvrage de V. Petit de 1870 (O) puis, suite à la chute du Second Empire, "rue Armand", sur
le Plan de Cannes de 1871 (P).
11- Nombreuses cabines de bains sur la plage, à l'est de la Villa Herman(n) et du Pont de la Foux.
12- Villa basse et de petites dimensions, érigée en retrait
du boulevard au plus tard en 1863-64.
Ce bâtiment est dénommé "Villa Ardisson" sur
le Plan de Cannes de 1871 (P).
Une villa sera bâtie dans la partie sud-ouest du terrain de la Villa Ardisson en 1865 puis dénommée "Villa Cresp" n° 2 dans : le Recensement de Cannes de 1866 (J) ; l'ouvrage de V. Petit de 1870 (O). Elle sera ensuite citée sous le nom de "Villa Rey" n°2 sur le Plan de Cannes de 1871 (P), accostant la Villa Bagatelle (du côté ouest), comme la Villa Rey n°1 (du côté est).
13- Villa érigée vers 1863-64
Le bâtiment porte le nom de "Villa Bagatelle" dans
: le Recensement de Cannes de 1866 (J) ; l'ouvrage de V. Petit de
1870 (O) ; le Plan de Cannes de 1871 (P).
14- Villa érigée vers 1862-63
Le bâtiment porte le nom de "Villa
Rey" dans : le Recensement de Cannes de 1866 (J)
; l'ouvrage de V. Petit de 1870 (O) ; le Plan de Cannes de
1871 (P) et le Recensement de 1872 (R).
15- Villa érigée avant 1862
Le bâtiment porte le nom de "Maison ou Villa
Bernard" dans : le Recensement de Cannes de 1866 (J)
; l'ouvrage de V. Petit de 1870 (O) ; le Plan de Cannes de
1871 (P).
16- Villa érigée vers 1862-63
M. Depradon est signalé dans cette villa lors du Recensement de Cannes de 1866.
Le bâtiment porte ensuite le nom de "Villa
Ste-Claire" dans l'ouvrage de V. Petit de 1870 (O) et sur
le Plan de Cannes de 1871 (P).
17- Rue Gonnet
La voie porte le nom de l'hôtelier Gonnet dans la première moitié des années 1860.
Elle devient ensuite la "rue Rostan" dès le Recensement de Cannes du printemps 1866 (J), même si cette dénomination n'est officialisée qu'à la fin de l'année 1866 (B). Ce nom est ensuite présent sur le Plan de Cannes de 1871 (P).
18 et 19- Villas Barbe n°1 (à l'ouest) et n° 2 (à l'est),
érigées, parallèlement ou successivement en 1859-60
Est-ce dans une seule de ces villas ou dans les deux que l'Hôtel Gonnet s'installe à partir de février 1860 et ouvre en août suivant (Journal de Genève des 4 février et 21 août 1860 ; Galignani's Messenger du 19 octobre au 16 décembre 1860) ?
Il est difficile de le dire car un jeu de chaises musicales va se dérouler tout au long des années 1860, avec plusieurs noms d'hôtels et de maîtres d'hôtel qui vont se succéder dans les deux villas Barbe et dans les trois villas qui l'accostent du côté est, bâties entre 1862 et 1864.
Quelques étapes de ces
déménagements ont cependant pu être retrouvées.
- une photographie de Charles Nègre de 1862, révèle une enseigne de l'Hôtel Gonnet, dirigé par M. P. Gonnet, sur la façade nord de la Villa Barbe n°1 (voir l'article de ce
blog, ici). Celle-ci n'exclut pas cependant la possibilité d'autres
enseignes du côté sud, notamment sur la Villa Barbe n° 2.
- la photographie de Joseph Messy de 1864 dévoile
l'inscription du nom de l'Hôtel Gonnet sur les deux façades ouest et sud de la
Villa Barbe n° 1 mais aucune sur la façade sud de la Villa Barbe n°2.
- le "Grand Hôtel de Provence" succède à l'Hôtel Gonnet, avec un maître d'hôtel anglais, dans la Villa Barbe n° 1 dès janvier 1865 (Galignani's Messenger du 19 janvier au 16 mars 1865).
- le Panorama de Cannes de V. Petit de 1865 (C)
nomme "l'Hôtel de Provence" sous la Villa Barbe n° 1 puis
"l'Hôtel Gonnet" et "l'Hôtel Gray" sous les trois villas
voisines mais sans plus de précision sur leur répartition. L'Hôtel Gonnet
n'occupe probablement alors que la Villa Barbe n°2.
L'Hôtel de Provence (absent des Annuaires des
Alpes-Maritimes de 1864 et 1865) (F, G) quitte pour sa part la Villa
Barbe n° 1, en 1866, pour s'installer en retrait de la mer, près du nouveau boulevard
du Cannet, chemin de Terrefial (Guide Bradshaw's Continental de décembre 1866 p 257).
Son nom "d'Hôtel ou de Grand Hôtel de Provence" s'affiche ensuite
dans l'ouvrage du Dr Lee de 1867 (L) puis dans tous les ouvrages de la
fin des années 1860 et au-delà.
Fin 1866, M. P. Gonnet confie l'Hôtel Gonnet à son employé M. F. Daumas pour diriger une succursale, "l'Hôtel Désanges/Des Anges", situé rue d'Antibes. Cet hôtel ouvre en février 1867 (Journal de Nice du 14 février 1867 ; Revue de Cannes du 29 février 1867 p 3).
Sur le Plan de Cannes de 1871 (P),
la "Villa Barbe" n° 1 est désormais affichée sous ce nom alors que le nouvel "Hôtel
Gonnet et de la Reine", occupe non seulement la Villa Barbe n° 2 mais également la villa voisine que l'Hôtel
Gray vient de quitter pour s'installer dans la Villa Armand/Herman(n).
Dès 1872, la Villa Barbe n°1 devient "l'Hôtel des Quatre Saisons", dirigé par Claude Guillon (Revue de Cannes du 24 octobre 1872).
20- Etablissement de Bains Gonnet, présent sur la plage, face à l'hôtel, ouvert dès le printemps 1861 (Le Messager de Nice du 9 mai 1861).
Sur l'image étudiée, l'établissement repose visiblement sur des pilotis. C'est le premier Etablissement de Bains construit sur la plage de la Croisette.
21- Villa érigée en 1862-63 par M. Le Goff (?) et accueillant l'Hôtel Gray dès 1863
La Villa est visible sur une photographie datable de l'été
1863 mais encore dépourvue d'enseigne de l'Hôtel Gray sur sa façade nord,
contrairement aux photographies postérieures (voir l'article de ce
blog, ici).
La "Pension Gray et Compagnie" est cependant citée dès l'Annuaire-Almanach Firmin & Didot de 1864 (E) et l'Annuaire des Alpes-Maritimes de 1864 (F), ce qui laisse penser qu'il a investi la villa à la fin de l'année 1863.
L'annonce parue dans le Galignani's Messenger du 16 septembre au 25 novembre 1864 mais également dans le Journal de Nice du
5 octobre 1864, présentant "l'Hôtel Gray pour Famille - nouvel
établissement de bord de mer", ne signalerait donc pas l'ouverture de l'hôtel mais sa réouverture saisonnière.
"L'Hôtel Gray ou Gray et Cie", dirigé par M. Ch. Gray, Ecossais, est ensuite cité dans l'Annuaire des Alpes-Maritimes de 1865 (H) et le Recensement de 1866 (J).
M. Gray ouvre cependant, fin 1866, l'Hôtel Impérial, dans la ou les villas voisines (côté est), laissant l'Hôtel Gray à M. H. Foltz.
M. Foltz déménage ensuite l'Hôtel Gray, en 1871, au nord-ouest de la Villa Armand/Herman(n) située sur le même boulevard, à l'emplacement de l'ancien Hôtel des Etrangers. Il est nommé "Hôtel de Gray" sur le Plan de Cannes de 1871 (P). L'hôtel fusionne la même année avec un autre établissement et prend le nom "d'Hôtel Gray et d'Albion" (Revue de Cannes du 22 octobre 1871).
L'ancien emplacement de l'Hôtel Gray et celui de la Villa Barbe n°2 sont
pour leur part réunis sous le nouveau nom, "d'Hôtel Gonnet et
de la Reine", notamment présent sur le Plan de Cannes de 1871 (P).
22- Villa érigée vers 1863-64 et accueillant, avec la villa
qui l'accoste au nord (non visible sur la photographie), l'Hôtel Impérial, au
plus tard en 1866
"L'Hôtel Impérial" est dirigé par M. Ch. Gray, anciennement directeur de l'Hôtel Gray de la villa voisine.
Il est cité dans : les publicités du Galignani's Messenger parues du 27 septembre au 13 décembre 1866 ; l'ouvrage de
Ch. Th. Williams de 1867 (L) ; le Guide Murray de 1867-68 (M) ; le Journal des Baigneurs du 25 février 1869 ; l'ouvarge de V. Petit de
1870 (O).
Il prend le nom "d'Hôtel National" suite la chute
du Second Empire et est dénommé ainsi sur le Plan de Cannes de 1871 (P).
23 et 24- Villa latérale du Grand Hôtel de Cannes,
positionnée à l'entrée sud-est des jardins du Grand Hôtel de Cannes dont le
bâtiment est, lui, érigé en retrait du boulevard, entre juin 1863 et octobre 1864
Le nom du "Grand-Hôtel de Cannes" est cité dans tous les documents, de 1863 (projet et travaux) à 1872 et au-delà. L'Annuaire des Alpes-Maritimes de 1865, le signale en précisant l'existence du "Gymnase Pichery" (H).
25- Cercle Nautique, érigé dès le printemps 1863 et inauguré
en octobre 1864
Son nom est cité dans tous les documents, de 1863 à 1872 et
au-delà.
(26)- Rue (probablement postérieure à 1864) et terrain non bâti
Cette voie est désignée sous le nom : "d'avenue du Cercle Nautique" dans l'ouvrage de V. Petit de 1870 (O) ; sous le nom de "rue
de la Rotonde" sur le Plan de Cannes de 1871 (P).
Le terrain planté d'arbres, situé plus à l'est, est l'emplacement où sera bâti le Café de la Rotonde entre février et décembre 1865 et nommé ainsi dans : le Recensement de Cannes de mai 1866 (J) ; la liste de V. Petit de 1870 (O) ; le Plan de Cannes de 1871 (P).
NOTES
(A) Les premières constructions sont établies dans la partie orientale de la Croisette. Une première maison est peut-être érigée en 1858 (?) par Marius Aune (maison qui va accueillir l'Hôtel de la Plage, hors-champ de l'image étudiée). Deux maisons sont ensuite bâties par Marius Barbe en 1859-60 (maisons qui vont notamment accueillir l'Hôtel Gonnet).
Le Plan de Cannes, publié dans l'ouvrage de
Jean-Baptiste Girard, Cannes et ses environs : guide historique et
pittoresque, en 1859 (Paris, BnF), présente une grande partie du rivage oriental de
la ville mais sans aucune construction à proximité de la plage.
Le Plan de Cannes de 1864 ne
présente, pour sa part, que la partie occidentale du boulevard de la Croisette, compris entre
les Allées et la Villa Herman(n) (Archives Municipales de Cannes, 202 et Paris,
BnF).
(B) Dénomination des rues de la Ville de Cannes
:
Le 22 septembre 1866, "le conseil
municipal adopte les dénominations suivantes pour les rues nouvelles jusqu'à ce
jour innommées, ou mal désignées :
- Boulevard de l'Impératrice, longeant la mer à
l'Est, depuis l'hôtel des Princes ou les Allées de la marine,
jusqu'à la villa Marina, désigné précédemment sous le nom de Boulevard de
la Croisette.
[Cette décision - validée par le préfet en novembre 1866 - officialise le nom déjà utilisé de "boulevard de l'Impératrice" car ce dernier est cité dans : l'Annuaire-almanach Didot et Bottin de 1864 (E) ; l'ouvrage du Dr Lubanski, préfacé en juillet 1864 et édité en 1865 (I) mais il est vrai que cette dénomination est uniquement présente dans l'appendice publicitaire de l'ouvrage (publicité de l'Hôtel Gonnet) qui peut être postérieur ; le Recensement de Cannes du printemps 1866 (J).
Le conseil municipal reviendra sur cette
décision le 4 janvier 1871, suite à la chute du Second Empire du 4
septembre 1870. Le boulevard reprend ainsi le nom de boulevard de la Croisette
dans : le Plan de Cannes de 1871 (P) ; le Recensement
de Cannes de 1872 (R)].
- Rue Rostan, de la rue d'Antibes au boulevard de
l'Impératrice, désignée précédemment sous le nom de rue Gonnet
- Impasse Legoff, de la rue Rostan au mur de clôture
des jardins du Grand-Hôtel.
- Rue Macé, de la route d'Antibes, Grand Hôtel de
Genève, au boulevard de l'Impératrice.
(Mémoires de la Société des Sciences Naturelles, des
Lettres et Beaux-Arts de Cannes et de l'Arrondissement de Grasse, 1868-1873, dénomination des rues du 22 septembre 1866, T II, 1870 pp 303-304 et 317).
Cette date est confirmée, d'une part par la représentation du Café de la Rotonde (non légendé), bâti entre février et décembre 1865 sur le boulevard de la Croisette et, d'autre part par l'absence des nouvelles parties orientales de la chapelle protestante ou Christ Church, réalisées entre avril et novembre 1866, au quartier des Anglais.
La façon de positionner les nombreux noms des bâtiments dans la légende et le fait de ne pas nommer certains d'entre eux créent des ambiguïtés. Ces ambiguïtés sont accentuées par le fait que le dessin qui, certes reflète globalement les proportions des architectures, ne respecte pas toujours leur détail (nombre de baies et hauteur des façades).
Victor Petit a multiplié les dessins de Cannes en 1863 puis a réalisé deux panoramas (est-ouest) de la Ville de Cannes vue de la mer en 1864. Il a ensuite fusionné et réactualisé ces deux panoramas et les a édités et réédités sous forme de lithographies noir ou couleur jusqu'en 1868.
(D)- Recensement de Cannes du printemps 1861 (quartiers de la Foux et de la Croisette). Ce dernier ne signale que l'Hôtel tenu par Gonnet (Archives Municipales de la Ville de Cannes, 1F9, vues 102-103).
(E)- Annuaire-almanach du commerce, de l'industrie, de la magistrature et de l'administration : ou almanach des 500.000 adresses de Paris, des départements et des pays étrangers, Firmin Didot et Bottin réunis, Paris, 1864, p 1580.
(I)- Dr Lubanski, Guide aux stations d'hiver du Littoral méditerranéen, préfacé en juillet 1864 et édité en 1865.
(J)- Recensement de Cannes du printemps 1866 du boulevard de l'Impératrice. Ce dernier reste difficile à exploiter car seulement sept des bâtiments de la photographie y sont nommés (nom du propriétaire ou nom commercial), sans être alignés sur les noms des personnes recensées, ce qui empêche notamment de savoir qui vit où (Archives Municipales de Cannes, 1F10, vues 126-127 et 134).
(K)- Guides-Joanne : Itinéraire de la France, vol. 2, De Paris à la Méditerranée, 1865 ; De Lyon à la Méditerranée, 1866 ; En Europe, 1867.
(L)- Dr Edwin Lee, Hyères and Cannes, 1867.
- Ch. Th. Williams, The Climate of the South of France, 1867.
(M)- Guide Murray, A Handbook for Travellers in France, 1867-68 p 539.
(N)- Plan de Cannes (petit et simplifié) de 1869 (Collection privée).
(O)- Victor Petit, Cannes - Promenades des Etrangers dans la ville et ses environs, édition de 1870, liste des bâtiments par rue, Supplément pp 16-18. La liste de l'édition précédente, datée de 1868, n'a malheureusement pas été conservée dans l'exemplaire consulté.
(P)- Plan de Cannes de 1871 (Archives Municipales de Cannes, 1Fi105).
Le plan indique notamment la présence, sur la plage, de trois Etablissements de Bains, respectivement situés : face à la Villa Montaret, à l'est du Pont de la Foux, et face à la rue de la Rotonde (entre le Cercle Nautique et le Café de la Rotonde).
(Q)- "Tableau synoptique de la Ville de Cannes" publié dans le Courrier de Cannes du 31 décembre 1871 (Archives Municipales de Cannes).
(R)- Recensement du printemps 1872 (quartier et boulevard de la Croisette). Il cite un seul nom de maison, celui du "Cercle Nautique" (Archives Municipales de la Ville de Cannes, 1F11, vues 143-146).
(S)- "Tableau synoptique de la Ville de Cannes"
publié dans le Courrier de Cannes du 21 novembre
1872 (Archives Municipales de Cannes).