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INTRODUCTION
Le chimiste-photographe et théoricien belge, Désiré van Monckoven (1834-1882), domicilié à Gand, publie plusieurs Traités de Photographie à succès dans la seconde moitié des années 1850, à Bruxelles, Paris et Londres.
En 1862, c'est à Gouda (Pays-Bas) et Paris qu'il publie un nouveau Traité.
La version française est intitulée, Traité populaire de Photographie sur Collodion, contenant le Procédé négatif et positif, le Collodion sec, le Stéréoscope, les Épreuves positives sur papier, etc., illustré de 115 figures sur bois, intercalées dans le texte, Paris, Lieber, Editeur, Rue de Seine-Saint-Germain, 13, 1862.
Cet ouvrage est consultable en ligne sur Google Livres (ici) mais sans la couverture et avec une datation erronée (1855).
Le chapitre VIII traite notamment de la configuration d'un atelier et présente, en exemple, celui du photographe belge Charles d'Hoy (1823-1892), à Gand, avec lequel l'auteur a l'habitude de collaborer (pages 79-85, retranscrites ci-dessous).
"DE L'ATELIER VITRÉ OÙ L'ON FAIT POSER LE MODÈLE"
"Que le lecteur ne se méprenne point sur la portée de ce chapitre qu'il ne croie pas, lorsqu'il l'aura lu, qu'il saura faire un portrait artistique (...). Non, cela ne s'apprend pas par la lecture, le sentiment de l'artiste lui appartient à sa naissance et l'instruction ne fait qu'en développer les germes ; l'exercice ne modifie, ne perfectionne que des détails.
Notre rôle, dans ce chapitre, se bornera donc à faire dessiner un côté de l'atelier qui appartient à un photographe très-distingué et très-intelligent, M. Ch. D'Hoy, à Gand. (Plus d'une illustration artistique, a d'ailleurs, orné ce salon des produits de son talent.) Nous ajouterons ensuite quelques avis et quelques données pour ainsi dire essentiellement pratiques.
La figure 55 représente donc l'atelier d'un photographe. D'un côté, l'on voit une série de vitres, que l'on choisit très-épaisses et plutôt blanches ou bleuâtres que verdâtres ou jaunâtres. Ces vitres, si elles sont minces, cassent trop facilement dans les temps d'orage, par la grêle ou tout autre cause extérieure. Si elles sont verdâtres, jaunâtres surtout, la pose en est considérablement augmentée, c'est donc un point très-important à considérer, que la couleur des vitres dont on construit l'atelier.
L'atelier doit être placé un peu haut, à la partie supérieure de la maison ou sur une plate forme quelconque. L'un côté doit être entièrement fermé, c'est, sur notre figure le côté droit et en réalité le sud, c'est-à-dire, le point du ciel où se trouve le soleil à midi.
Il est très-important que la partie vitrée de l'atelier regarde le nord et soit parfaitement à l'abri du soleil, au moins le matin et l'après-dînée jusqu'à trois ou quatre heures. Pour comprendre cela, le lecteur doit bien se pénétrer de ce principe, que c'est le matin que la lumière agit le plus activement, ainsi c'est à peu près vers onze heures que l'on travaille le plus vite. Une fois trois heures de relevée la pose s'accroît considérablement. D'un autre côté, rien n'est aussi désagréable qu'un rayon de soleil qui pénètre dans l'atelier ; car l'éclairage du modèle s'en ressent très-vivement, les ombres deviennent trop fortes.
On adapte d'ailleurs à la galerie vitrée des rideaux munis de cordes, à l'aide desquels on modère l'action trop vive de la lumière et aussi avec lesquels on donne une direction à l'éclairage. Notre figure, par exemple, nous montre trois rangées de carreaux, la rangée supérieure (en verre dépoli), qui est parallèle au plancher, la rangée inférieure qui remplace le mur, et la moyenne qui est inclinée.
Veut-on maintenant, pour un sujet artistique, inonder le front du modèle d'une grande quantité de lumière, on fermera plus ou moins les rideaux inférieurs et moyens; veut-on un éclairage latéral, on fermera au contraire les rideaux des fenêtres supérieures. C'est d'ailleurs le bon goût seul de l'opérateur qui peut l'aider dans ce choix.
Notre atelier représente à gauche un fût de colonne contre lequel peut s'appuyer le modèle, une balustrade avec un tableau peint en grisailles, vers le milieu une cheminée de marbre blanc dans le style Louis XV, tous accessoires qui peuvent aider une personne à prendre une pose élégante.
La couleur des murs influe grandement sur les résultats ; il ne faut les faire ni rouges, ni jaunes, ni verts ; car ces couleurs sont fort peu photogéniques et jettent autour d'elles une teinte de même couleur, très-défavorable en ce qu'elle tend à augmenter très-fortement le temps de pose, les couleurs violettes et bleues sont préférables, mais elles viennent en blanc sur les épreuves ; ainsi, un mur peint en violet ou en bleu, même foncés, viennent absolument comme des murs blancs.
Le gris bleuâtre est une teinte mélangée, qui vient très-bien ; c'est la couleur avec laquelle il faut peindre tout l'atelier, sauf à la faire, suivant les objets, plus ou moins foncée.
La couleur à l'huile est très-désagréable à cause de ses reflets, de son miroitage. On fait mieux de faire les couleurs à l'eau, avec un mélange de chaux éteinte, de bleu de tournesol et de noir de fumée. On en peint tout l'atelier, en variant seulement la quantité de noir ; la même couleur sert à peindre les fonds, tant unis que représentant des fonds de tableaux.
Les tapis doivent également être gris.
Quant à la couleur des habits des personnes qui posent, nous répéterons ce que nous avons dit à propos de la couleur de l'atelier, c'est-à-dire, que les teintes neutres, analogues au gris, au violet, au bleu, viennent très-bien, tandis que le rouge, le jaune, le vert viennent très-mal. D'ailleurs en augmentant le temps de pose, en le diminuant dans d'autres cas, on atténue très-fortement la prédominance de certaines couleurs.
Quand une ou plusieurs personnes posent, on leur fait d'abord prendre une position bien naturelle ; puis, plaçant derrière elles un appuie-tête, de telle façon qu'elles le cachent complètement ; on assure la position de la partie supérieure du corps.
Il ne faut pas que la personne qui pose appuie fortement la tête contre le guide, mais au contraire très-lègèrement, car, une pression trop forte gêne la respiration et de plus donne au modèle une position forcée.
Il existe deux genres d'appuie-tête. L'un, en fer, ou en fer et bois, est représenté dans la fig. 55. La partie inférieure consiste dans un trépied et un tube de fonte pesant une vingtaine de kilogr., ce qui le préserve de vaciller, la partie supérieure consiste en un tube en fer de tuyau à gaz, présentant une pièce en fourchette, susceptible d'avancer et de reculer, et de plus, de se fixer par une vis de pression dans une position quelconque.
Ces appuie-tête sont construits pour poser debout, mais la figure 56 nous en fait voir un pour poser assis.
Cet appuie-tête est entièrement articulé et en bois dur. En voici la légende explicative :
e, bois plat, s'adaptant à une chaise. II présente deux vis de pression ff.
ii, planche à rainure, qui vient derrière la chaise; on la hausse et on la baisse facilement. Elle se fixe en serrant les vis ff.
bb, pièce doublement articulée, se serrant à l'aide de vis. Cette pièce peut être haussée et fixée en d.
a, pièce en fourchette mobile, contre laquelle s'appuie la personne qui pose.
C'est entre la pièce e et la pièce ii que se fixe le dossier de la chaise. Un tel appuie-tête s'achète chez tous les marchands.
La figure 55 nous fait voir encore comment on se sert de l'appareil pour mettre au point. Nous ferons remarquer à ce sujet, qu'il ne faut jamais donner trop d'inclinaison à l'appareil, en général il est bon que l'objectif soit à la hauteur de la poitrine; alors il suffit d'une légère inclinaison de la chambre noire pour avoir l'image de la personne qui pose de la tête aux pieds.
Quand le sujet est assis, il est bon de baisser un peu le pied pour éviter une trop grande déformation.
Plus on est près de la personne et plus le temps de pose est long, inversement plus on s'en éloigne, plus le temps de pose est court. C'est ainsi que ce temps de pose peut varier d'une seconde à 300. Mais en règle générale, quand le sujet est reproduit en pied, il faut, en été, 20 secondes, un buste exige 30 secondes. En hiver ces temps de pose augmentent de la moitié.
Voici la marche générale que l'on suit quand on fait un portrait:
L'éclairage est la première chose dont on doit s'occuper; puis la pose de la personne. L'on met alors au point en engageant le sujet à conserver sa position, sans cependant en exiger une complète immobilité. L'on va alors préparer la glace puis, revenant on corrige les écarts dans la pose qu'il aurait pu faire pendant l'absence de l'opérateur, on essaie par la conversation de le rappeler à son état normal (car il en est, et plus d'un, qui devant l'objectif, prennent une figure et une position des plus comiques), puis quand l'on juge que tout est bien, on met vite au point, le châssis remplace le verre dépoli, l'objectif est ouvert après une recommandation au sujet de se tenir tranquillement appuyé sur l'appuie- tête, et en lui disant de cligner les yeux et de respirer comme à l'ordinaire, puis l'on ferme l'appareil pour procéder au développement de l'image.
Quant au moyen que l'on emploie pour mesurer, en secondes, le temps de pose, le meilleur consiste à lire ce temps sur une bonne montre à secondes, mais l'on peut aussi se borner à suspendre à une corde d'un mètre une balle de plomb ou de bois, et à faire osciller ce pendule, qui marque la seconde avec suffisamment d'exactitude.
Nous devons nous tenir à ce peu de détails, car nous avons l'opinion bien arrêtée qu'une grande quantité de préceptes ne sert pas à un commençant, or, cet ouvrage lui étant spécialement destiné, nous nous bornerons donc à ces explications, d'ailleurs plus que suffisantes".
VOIR AUSSI
DÉCORS ET POSES DES ATELIERS PHOTOGRAPHIQUES DU XIXe SIÈCLE
À VENIR
VISITES DES PREMIERS ATELIERS DE PHOTOGRAPHIE (1839-1859)


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