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INTRODUCTION
Le Tihar, connu sous les noms de Deepawali, Swanti, ou Yamapanchak, est une célébration majeure de cinq jours qui se déroule au Népal, généralement en octobre ou novembre, durant le mois népalais de Kartik.
Immédiatement après le Dashain, le plus grand festival du pays, le Tihar s'affirme comme l'évènement marquant un temps de retrouvailles familiales, d'échanges de cadeaux et de vénération.
Contrairement à son homologue indien, le Diwali, qui met principalement l'accent sur le culte divin, le Tihar se distingue par son caractère unique qui célèbre l'harmonie et l'interconnexion entre les humains, les animaux et les dieux.
Le festival est un kaléidoscope de lumières et de couleurs où les foyers et les rues sont illuminés de façon spectaculaire pour accueillir la déesse hindoue de la richesse et de la prospérité, Lakshmi.
Le Tihar est profondément ancré dans des traditions spirituelles et des légendes mythologiques qui lui confèrent une signification dépassant la simple célébration. Les rituels du festival ne sont pas de simples actes de dévotion mais des expressions de gratitude envers la nature et les êtres vivants qui contribuent à la vie humaine.
Cette période de joie et de réflexion est un témoignage vivant de la culture népalaise, où chaque jour est imprégné d'un symbolisme spécifique et de cérémonies qui renforcent les liens sociaux et familiaux.
SYMBOLISME DE LA LUMIÈRE ET DES ANIMAUX
La Lumière
Au cœur du festival de Tihar se trouve le symbolisme de la lumière qui est à la fois puissant et multifacette. Le festival est surnommé le "Festival des Lumières", en raison de la présence omniprésente de lampes à huile (diyas), de bougies et de lumières électriques.
L'acte d'allumer ces lumières est perçu comme une victoire de la lumière sur les ténèbres et du bien sur le mal, symbolisant la dissipation de l'ignorance et l'accueil de la connaissance et de l'énergie positive.
Les foyers sont minutieusement nettoyés et décorés, car les fidèles croient que la déesse Lakshmi n'entre que dans les maisons propres et bien éclairées. Les lumières ne sont pas seulement une décoration : elles agissent comme un guide rituel, traçant un chemin lumineux pour la déesse afin qu'elle puisse trouver et bénir les demeures de ses dévots.
La Légende de Yama et Yamuna
Le Tihar est souvent désigné sous le nom de Yamapanchak, une appellation qui met en lumière la mythologie centrale du festival. Le terme "Yama" fait référence au dieu de la mort, et "Panchak" signifie cinq jours.
Le festival est intrinsèquement lié à la légende de Yama et de sa sœur Yamuna, qui offre un cadre narratif cohérent pour l'ensemble des rituels.
Selon l'une des versions de l'histoire, Yamuna était désespérée de rencontrer son frère Yama, constamment occupé par ses devoirs de dieu de la mort. Pour lui faire parvenir son message, elle envoya un corbeau puis un chien et enfin une vache.
Après quatre jours d'attente vaine, elle décida de se rendre elle-même auprès de lui le cinquième jour. Submergée par la joie de ces retrouvailles, elle offrit un tika (tilaka/tilak) coloré à son frère pour invoquer sa protection et sa longue vie.
C'est cette légende qui explique la vénération des animaux messagers durant les premiers jours du festival, culminant avec la célébration des liens fraternels le dernier jour.
Une autre version de la légende raconte que Yamuna aurait sauvé son frère de la mort en le protégeant par la force de ses prières et rituels, renforçant la croyance que le tika de Bhai Tika protège les frères de la mort.
La célébration des animaux
L'une des caractéristiques distinctives du Tihar est sa vénération unique des animaux qui occupent une place centrale dans les rituels quotidiens.
Cette pratique reflète une profonde gratitude pour le rôle vital que ces créatures jouent dans la vie quotidienne et leur importance dans la mythologie hindoue. Le festival met en lumière le lien de coexistence et d'harmonie entre l'homme et la nature, en exprimant de la gratitude envers les animaux qui contribuent au mode de vie rural et qui servent de messagers divins : les corbeaux, les chiens, les vaches et les bœufs.
LES CINQ JOURS DE TIHAR (YAMAPANCHAK)
Jour 1 : Kaag Tihar (Jour du Corbeau)
Le premier jour de Tihar est consacré aux corbeaux, des oiseaux considérés comme les messagers de Yama, le dieu de la mort. Le rituel principal de cette journée consiste à apaiser ces messagers en leur offrant de la nourriture. Des grains, du riz et d'autres friandises sont placés sur les toits ou dans les rues tôt le matin.
La croyance veut que le croassement des corbeaux puisse symboliser la tristesse et le deuil. En les nourrissant, les dévots espèrent éloigner ces malheurs de leur famille pour l'année à venir. L'offrande est faite avant même que les membres de la famille ne mangent quoi que ce soit, une marque de respect qui souligne l'importance de ce rituel inaugural.
Jour 2 : Kukur Tihar (Jour du Chien)
Le Kukur Tihar est une célébration touchante dédiée aux chiens. Les chiens sont honorés pour leur loyauté et leur rôle de gardiens, à la fois dans le foyer et dans la mythologie, où ils sont décrits comme les gardiens des portes de l'enfer et les compagnons de Yama.
Les fidèles les honorent pour les apaiser et pour obtenir leur protection contre les tourments de l'enfer. Cette vénération s'étend également aux chiens errants, démontrant un niveau de compassion qui transcende la simple relation propriétaire-animal.
Ce jour-là, les chiens sont parés de guirlandes de soucis (marigold), reçoivent un tika rouge sur le front en signe de sacralité et de bénédiction, et se voient offrir un festin de mets délicats, incluant de la viande, du lait et des œufs. L'acte d'être irrespectueux envers un chien ce jour-là est considéré comme un péché.
Jour 3 : Gai Tihar et Laxmi Puja (Jour des Vaches et Culte de Lakshmi)
Le troisième jour de Tihar est divisé en deux parties. La matinée est dédiée à Gai Tihar, où les vaches sont vénérées comme des animaux sacrés et des incarnations de la déesse Lakshmi, symbolisant la richesse et la prospérité.
Elle sont honorées pour leur rôle dans l'agriculture et leurs contributions essentielles, telles que le lait, l'urine (pour la purification) et la bouse (pour le carburant et l'agriculture).
Elles reçoivent des guirlandes, un tika, et sont nourries de mets spéciaux comme le sel rôti et le rôti. Ce culte matinal est une préparation directe et symbolique pour les rituels du soir où la déesse de la prospérité elle-même est accueillie dans le foyer.
La soirée est le point culminant du festival, marquée par Laxmi Puja. C'est la nuit la plus sombre de l'année. Les maisons sont méticuleusement nettoyées et décorées pour inviter la bonne fortune.
Des rangolis élaborés, faits de riz, de poudre colorée et de pétales de fleurs mais également des empreintes de pas de Lakshmi sont dessinés à l'entrée des maisons pour la guider.
Les lumières, qu'il s'agisse de diyas ou de lumières électriques, sont allumées partout pour s'assurer que Lakshmi ne manque pas le foyer et pour symboliser l'abondance. Une puja spéciale est accomplie le soir, où les fidèles prient pour la richesse et le bien-être.
Le soir de Laxmi Puja, des groupes de jeunes gens se déplacent de maison en maison en chantant des chants traditionnels de Deusi et de Bhailo. En échange de leurs performances, les chanteurs reçoivent des offrandes, incluant de l'argent, des fruits et des friandises faites maison comme le Sel Roti. Traditionnellement, les filles chantaient le Bhailo et les garçons le Deusi. Cependant, les célébrations modernes ont vu ces rôles s'entremêler, avec des groupes mixtes.
Jour 4 : Goru Tihar / Govardhan Puja et Mha Puja
Le quatrième jour est marqué par plusieurs rituels distincts selon la communauté concernée. La célébration principale pour la plupart des Népalais est le Goru Tihar, qui honore le bœuf pour son travail et sa contribution à l'agriculture.
D'autres, en particulier les hindous Vaishnavites, célèbrent le Govardhan Puja. Ce rituel commémore l'histoire de Lord Krishna qui a soulevé le mont Govardhan pour protéger les villageois d'une tempête torrentielle. Pour marquer l'occasion, une petite colline symbolique est construite à partir de bouse de vache et vénérée.
Pour la communauté Newar, ce jour est particulièrement significatif car il coïncide avec le Nouvel An du calendrier national népalais, le Nepal Sambat. Ils célèbrent Mha Puja, qui se traduit par "le culte de soi".
Ce rituel vise à purifier et à renforcer l'âme pour la nouvelle année. La cérémonie se concentre sur l'introspection et la reconnaissance de la valeur de soi. Chaque membre de la famille trace un mandala sur le sol, qui représente l'univers et la place de l'individu en son sein.
L'aînée de la famille purifie chaque personne en aspergeant de l'eau. Des offrandes sont disposées autour du mandala, et les membres de la famille reçoivent des tikas et des cadeaux rituels, dont un sagan (offrande propice) composé d'un œuf, de poisson et de vin de riz.
Jour 5 : Bhai Tika (Célébration des Frères et Sœurs)
Le Tihar se conclut par le Bhai Tika, une cérémonie qui célèbre le lien sacré entre frères et sœurs. Le rituel est directement inspiré de la légende de Yama et Yamuna, où la sœur a sauvé son frère de la mort. La cérémonie est un moment de dévotion et de protection mutuelle.
Les rituels du Bhai Tika sont profondément symboliques. La sœur trace une barrière de protection autour de son frère à l'aide d'huile et d'herbe doob, symbolisant une ligne de défense que même la mort ne peut franchir.
La sœur applique un tika spécial aux sept couleurs (Saptarangi) sur le front de son frère. Les sept couleurs sont considérées comme un reflet de la lumière du soleil et, en les portant, le frère est censé devenir aussi puissant que le soleil, ses bonnes actions se répandant comme la lumière.