SOMMAIRE DES ARTICLES DU BLOG ET LIENS DIRECTS
UN ARTICLE ÉCRIT EN COLLABORATION AVEC
MATTHIEU BÉTUWE, LAURENCE BACART ET JULIE BALLANFAT
Auteurs du Catalogue de l'Exposition présentée de septembre à décembre 2016 à la Bibliothèque d'Agglomération de Saint-Omer (BASO), Les photographes à Saint-Omer (1839-1914)
AUGUSTE MARIE VERNEUIL (Paris, 5ème, 17 août 1812 - Paris, 14ème, 25 mai 1904)
PARIS (Seine)
Auguste Marie Verneuil est né le 17 août 1812 à Paris (5ème arrondissement). Il est le fils naturel de Jacques Auguste Verneuil, horloger (lui-même fils d'horloger, baptisé le 16 juin 1772 à Epernay, Marne) et de Marie Augustine Perrine Descotte/Décotte.
Il semble cependant reconnu et également élevé par son père et va exercer le même métier que lui, horloger.
Ses parents vont cependant se séparer par la suite, son père se mariant, à 57 ans, avec Jeanne Rollet et fondant une nouvelle famille à Paris en 1830, avant de partir vivre à Lyon.
SAINT-OMER (Pas-de-Calais)
Au printemps 1834, Auguste Marie Verneuil va pour sa part s'installer en tant qu'horloger à Saint-Omer (Pas-de-Calais), sans que la raison de ce choix ne soit connue.
Il signale son installation, au nord-ouest de la ville, près de la place Royale ou Grand'Place (actuelle place du Maréchal Foch), par une première publicité (d'une longue série), qui paraît dans le Mémorial Artésien du 11 mai 1834 : "Auguste Verneuil, horloger, grande Place, n° 2, au premier, chez M. Danel, boucher, coin du Marché-au-Poisson [au sud-ouest de la place], fait toutes espèces de réparations en ce qui concerne l'horlogerie...".
En 1835, il fait paraître la même publicité mais avec désormais l'adresse "Grand'Place n° 31, près la rue de Dunkerque", au nord-est de la place, près du corps-de-garde.
Du 10 novembre 1836 au 1er octobre 1837, il signale ensuite "qu'il achète les diamants et autres pierreries montés ou non, ainsi que les matières d'or et d'argent, vieux galons, etc.".
Le 15 décembre 1838, "Auguste Marie Verneuil, horloger, 26 ans", épouse à Saint-Omer "Marie Valentine Gertrude Martel, marchande de nouveautés [probablement employée], 23 ans, née à Courset, arrondissement de Boulogne-sur-Mer, le 17 mars 1815", fille de Jean Philippe Martel, ancien cultivateur, et de feue Marie Anne Justine Roussé.
Les parents d'Auguste Verneuil sont absents à la cérémonie mais consentants par actes notariés, celui de sa mère étant daté du 15 novembre (à Paris) et celui de son père du 19 novembre 1838 (à Lyon). Ce dernier vient de décéder dans cette ville le 25 novembre 1838 mais l'acte de mariage ne le précise pas.
Dès le 13 janvier 1839, Auguste Verneuil signale à sa clientèle un nouveau changement d'adresse, "rue des Arts, derrière l'hôtel-de-ville", face au Théâtre, toujours sur la Grand'Place ou place Royale mais sur le côté est.
Son épouse ouvre également sa boutique de modes et de nouveautés à cette adresse (n° 26) mais sa première publicité ne date que du 31 octobre 1839. Chacun des époux se présente parfois sous le nom de "Verneuil-Martel".
Auguste Verneuil place son atelier d'horlogerie sous l'enseigne, "Au Chronomètre", car il est désormais membre correspondant de la nouvelle Société chronométrique qui s'est formée à Paris pour l'avancement et le perfectionnement de l'art de l'horlogerie et de la mécanique.
C'est un véritable chronomètre, "avec son aiguille indicatrice du temps réel", et Auguste Verneuil projette également de placer devant sa boutique "un cadran gnomonique muni de son canon à lentille (...) qui annoncera la première seconde de midi", lorsque le soleil le permettra, et "un thermomètre de bonne facture" (Le Mémorial Artésien des 21 mars et 16 mai 1839 et du 7 mai 1840).
En avril 1839, il se voit chargé de la garantie et de l'entretien des pendules vendues par les Frères de Wiart dans leur magasin de meubles de la rue Royale, 18 (cette association durera jusqu'en juillet 1840 - Mémorial Artésien des 28 avril 1839 et du 16 juillet 1840). Auguste Verneuil offre également de réparer "les lampes mécaniques en tous genres" (Mémorial Artésien des 11, 19 et 22 octobre 1840) .
Le 18 juillet 1839, son épouse accouche, en leur demeure de la place Royale, de leur fils Philippe Auguste Verneuil.
Dès fin octobre 1839 [!], deux démonstrations de l'usage du Daguerréotype ont lieu à Saint-Omer. Elles sont accompagnées de l'exposition "de six vues de Paris, d'une vue du Hâvre (sic), d'une vue des ruines de St.-Bertin [vue de l'église gothique de Saint-Omer, réalisée pour l'occasion en trois-quarts d'heure] et d'un tableau contenant des essais du procédé anglais de M. Fox Talbot, de Londres", essais sur papier, moins parfaits mais moins coûteux (Mémorial Artésien du 27 octobre 1839).
Pour l'anecdote, la Vue des ruines de St.-Bertin sera mise en vente chez M. Lemaire, imprimeur, qui finira par en faire don pour la loterie de bienfaisance de la ville en janvier 1840, et la famille qui gagnera ce lot en fera don, à son tour, pour la loterie de janvier 1843...
Auguste Verneuil faisait-il partie de la douzaine de personnes qui ont assisté à la première démonstration ? C'est probable, vu son intérêt pour la mécanique et l'optique. Se forme-t-il à Paris lors de ses voyages professionnels d'horloger, lorsqu'il accompagne son épouse pour ses collections de mode ou lorsqu'il rend visite à sa mère ? Il s'intéresse en tout cas à la daguerréotypie dès ses débuts mais ne fera, de cette nouvelle passion, une activité professionnelle que plus tard.
Le recensement de Saint-Omer du printemps 1841 cite à leur domicile de la place Royale : "Verneuil Auguste, horloger, marié ; Martel, son épouse, Valentine, modiste, mariée ; Verneuil Auguste [leur fils], célibataire ; Jausoonne Irma, modiste, célibataire ; Goudeville Julien, garçon horloger, célibataire ; Lequien Louise, domestique, célibataire".
Auguste Verneuil entame officiellement une activité de daguerréotypeur, parallèle à celle d'horloger, en diffusant une petite annonce dans le Mémorial Artésien, à partir du 31 juillet 1842.
Au dernier trimestre de l'année 1842, les époux annoncent leur prochain départ de la ville puis en fixent la date au 1er février 1843 (Mémorial Artésien, du 6 novembre 1842 au 15 janvier 1843). Ils recherchent des locataires pour leur succéder dans la maison qui occupe plusieurs arcades de la rue des Arts. Leurs boutiques sont surmontées de deux étages avec leur appartement au premier. Cela pourrait laisser penser que les époux en sont les propriétaires mais il semble que cela ne soit pas le cas.
La double activité d'Auguste Verneuil n'en diminue pas pour autant. En tant qu'horloger, il achève, au bout de deux années de travail, la réalisation d'une pendule remarquable, vendue 3.500 francs, qui "marque les dates du mois, les jours de la semaine, l'heure dans les principaux lieux de la terre, les mois de l'année, les saisons, l'âge de la lune et ses phases, les signes du zodiaque et les secondes fixes" (Mémorial Artésien du 20 octobre 1842).
En tant que daguerréotypeur, il multiplie les petites annonces à l'automne, offrant des portraits par tout temps et une ressemblance garantie, pour un prix de 6 francs.
Un article du Mémorial Artésien du 27 octobre précise qu'Auguste Verneuil a vaincu les difficultés pratiques de l'instrument et des agents chimiques "depuis plusieurs jours [!], et les portraits qu'il fait aujourd'hui sont réellement bien". Un nouvel article du 3 novembre 1842, confirme la parfaite ressemblance des portraits exécutés et le fait que "les vêtements des personnes qui posent, les bijoux qu'elles portent, tout est représenté avec une exactitude merveilleuse".
Auguste Verneuil révèle ensuite qu'Arras est sa prochaine destination et annonce la vente, fixée au 27 janvier 1843, de ses meubles et effets mobiliers dont "Pendule, Baromètre, Méridien à canon, Régulateur anglais avec sa caisse en acajou, Pendule mouvante pour horloger", qui sera assurée par Maître Mallet, Commissaire-priseur (Mémorial Artésien des 21 et 25 janvier 1843).
Il avise les personnes qui souhaiteraient "leur portrait au Daguerréotype, qu'on le trouvera jusqu'à cette époque, chez M. Peron [ou Péron], arquebusier, rue des Cuisiniers [n° 31 ; actuelle rue Louis Martel] à St.-Omer, depuis neuf heures du matin jusqu'à quatre heures du soir", où a été construite "une terrasse spécialement consacrée à ces portraits" (Mémorial Artésien du 18 décembre 1842 et du 8 janvier 1843).
Dans le journal du 28 janvier 1843, Adolphe Peron, "élève des premiers photographes", annonce d'ailleurs qu'il fait désormais des portraits au Daguerréotype et est le "successeur de M. Verneuil".
ARRAS (Pas-de-Calais) ET ITINÉRANCE (Pas-de-Calais et Nord)
La ou les raisons de ce déménagement ne sont pas connues. Certes Arras est une ville de préfecture mais sa population (environ 26.000 habitants) n'est alors que de 6.000 habitants supérieure à celle de Saint-Omer.
Auguste Verneuil ouvre dans cette ville une nouvelle boutique d'horlogerie, et son épouse, une nouvelle boutique de modes, dénommée "A la Dame-Blanche" (citées notamment dans l'Annuaire statistique et administratif du Pas-de-Calais de 1845 pp 360 et 378). Leur domicile et leurs boutiques sont situés rue Ernestale, près le Théâtre et la place du Théâtre (comme auparavant à Saint-Omer).
Leur fils, Philippe Auguste, décède malheureusement le 13 mars 1844, âgé de 4 ans et huit mois, à leur domicile.
Le recensement de la ville d'Arras du printemps 1846 cite, rue Ernestale : "Verneuil Auguste Jean [?] Marie, horloger, marié, 35 ans ; Martel Valentine, sa femme, modiste, marié, 30 ans ; Delmotte Joséphine, demoiselle de magasin, célibataire, 23 ans ; Delattre Clémence, servante, célibataire, 39 ans".
Les rares publicités retrouvées concernent essentiellement les collections de son épouse au tournant des années 1840-1850 (Courrier de Calais des 7 juin et 2 août 1848 puis des 1er janvier et 31 octobre 1851) mais les publicités des époux sont parfois accolées (comme auparavant à Saint-Omer), notamment pour les fêtes de fin d'année (Courrier du Pas-de- Calais du 31 décembre 1850 et du 1er janvier 1851). Leurs magasins semblent suffisamment connus pour qu'ils puissent les citer sans en préciser l'adresse.
La maison qu'ils occupent est mise en vente par ses propriétaires, dès le début du mois de mai 1850, ce qui permet de préciser l'emplacement de cette dernière, au coin des rues Ernestale (n° 273) et Héronval, face à la salle des Concerts qui jouxte le Théâtre et à la place de la Comédie (Courrier de Calais du 9 mai 1850 et du 2 avril 1851).
Le recensement du printemps 1851 cite, toujours à la même adresse : "Verneuil Auguste François [?] Marie, horloger, marié, 40 ans, Français ; Martel Valentine, sa femme, marchande de modes, mariée, 38 ans, Française ; Roussel Victorine, demoiselle de magasin, célibataire, 21 ans, Française ; Roussel Gertrude, demoiselle de magasin, sa sœur, célibataire, 25 ans, Française".
Jean-Louis Perreau, dans son article de 2007 (Note 3), signale qu'Auguste Verneuil mène une activité complémentaire de daguerréotypeur itinérant, au début des années 1850. L'été 1851, il se rend notamment à Dunkerque (L'Indépendant du 29 aout 1851) et s'installe du côté nord de la place Jean Bart, dans un appartement situé au 1er étage de la Maison Alliaume. Il y reviendra à plusieurs reprises dans les années suivantes.
Une petite annonce parue dans le Courrier du Pas-de-Calais du 20 avril 1852, révèle que Désiré Griset, horloger d'Arras, place du Théâtre, "par suite d'un traité avec M. Verneuil, horloger, rue Ernestale, continuera l'établissement de ce dernier pour ce qui concerne l'horlogerie, les remontages de pendule et les arrangemens (sic) de lampes-Carcel". Il semble donc qu'Auguste Verneuil se recentre alors sur sa carrière de daguerréotypeur.
La vente de la maison que les époux Verneuil occupent, aboutit en mai 1852 mais ils demeurent, au moins pour un temps, dans les lieux (Courrier de Calais des 6 juin et 14 octobre 1852).
"Verneuil, horloger, à Arras" est récompensé par une médaille de bronze à l'Exposition Industrielle et Agricole de la ville (organisée parallèlement à la 20ème Session du Congrès Scientifique de France qui s'ouvre le 23 août 1853 : Congrès Scientifique de France, vol. 20, Arras, Paris, 1854, Préface p X). Il y a probablement exposé des photographies (à côté de productions d'horlogerie ?), ce qui pourrait justifier le fait qu'il affichera, bien plus tard, cette médaille au verso de ses cartes de visite. C'est d'ailleurs la seule exposition connue de cette période à laquelle il participe.
Mi-septembre 1853, il retourne à Saint-Omer, en tant que daguerréotypeur itinérant, et installe son atelier dans l'ancienne maison Vandalle, Marché-au-Poisson, n° 37. Il y propose, de huit ou neuf heures du matin à cinq heures du soir, par tous les temps, des portraits au daguerréotype à partir de 4 francs, avec "une préparation particulière de coloration" dont il est l'inventeur (genre miniature) mais également des portraits après décès, des copies d'œuvres d'art, des vues stéréoscopiques et tout ce qui concerne le Daguerréotype dont des leçons aux amateurs.
Il y annonce sa présence par le biais de six petites annonces qui s'échelonnent du 17 septembre au 22 octobre, se voyant "forcé de prolonger son séjour jusqu'au 25 octobre", afin de satisfaire les personnes qui se sont adressées à lui (Mémorial Artésien des 17, 21, 24, 28 septembre et des 1er, 8 et 22 octobre 1853).
À Arras, son épouse Marie, âgée de 39 ans, décède malheureusement le 8 mai 1854, à leur domicile situé place du Théâtre, 343 (nouvelle adresse ou nouvelle dénomination ?). Dans l'acte de décès, Auguste Verneuil, 41 ans, est toujours dit, "horloger".
Il est à nouveau cité dans l'Annuaire général Firmin-Didot 1855 (p 1836) et celui de 1856 (pp 1839-1840) pour les deux magasins mais reste absent du recensement de 1856. Désormais seul, il a quitté Arras pour Boulogne-sur-Mer.
BOULOGNE-SUR-MER (Pas-de-Calais)
Ouvre-t-il une boutique d'horlogerie dans cette nouvelle ville ? C'est possible car plusieurs horlogers boulonnais deviennent des proches et lui serviront notamment de témoins lors de ses déclarations à l'état civil.
Il est cependant dit "photographe" (et plus "daguerréotypeur") dès septembre 1856, en tant que membre de la Société Boulonnaise de Photographie ou Société Photographique de Boulogne-sur-Mer, affiliée à la Société Française de Photographie (Édouard de Poilly, Photographie - Epreuves positives nacrées, A. Gaudin et Frère, Paris et Londres, 1856, Rapport de la Commission sur le procédé, daté du 8 septembre 1856 p 35).
Auguste Verneuil n'affichera plus désormais sa profession d'horloger, ce qui ne signifie nullement qu'il ait renoncé à cette passion.
C'est dans cette ville qu'Auguste Verneuil, âgé de 43 ans, a probablement fait, fin 1855 ou début 1856, la connaissance de Victoire Duchochois, âgée de 22 ans, née et domiciliée dans cette ville. De leur liaison va naître un enfant, Auguste Victor Louis Verneuil, dont l'acte de naissance n'a pas été retrouvé.
Plusieurs des documents postérieurs concernant l'enfant afficheront la date du "3 novembre 1856, à Dunkerque (Nord)". S'il est probable que, dans un premier temps, Auguste Verneuil n'ait pas reconnu son fils, un acte de naissance portant le nom de "Duchochois" n'a pas pour autant été retrouvé.
La vie personnelle et professionnelle d'Auguste Verneuil s'en voit d'autant moins révélée. Est-il resté domicilié à Arras en 1855 et 1856 ? A-t-il été domicilié à Boulogne-sur-Mer dès cette même période ou n'y-a-t-il fait que de brefs séjours, comme à Dunkerque et Saint-Omer ? Victoire Duchochois a-t-elle accouché à Dunkerque dans la maison Alliaume ?
Il serait légitime d'envisager une grossesse et un accouchement cachés, loin de Boulogne-sur-Mer, suite à une liaison fugitive. Cependant, il semble que cela ne soit pas le cas. En effet, dès la fin de l'année 1856, à l'époque de la naissance de l'enfant, un projet de mariage est envisagé, comme le prouve le consentement de la mère d'Auguste Verneuil, établi par acte notarié dès le 23 janvier 1857. Ce projet de mariage se voit cependant repoussé pendant un an et demi.
Parallèlement, l'activité photographique d'Auguste Verneuil semble s'affirmer à Boulogne-sur-Mer.
Le 10 juin 1857, un article de The Boulogne Gazette est consacré au photographe : "Nous avons visité son atelier et examiné de près ses œuvres d'art. Nous avons été si satisfaits que nous pensons ne pouvoir faire à nos lecteurs, amateurs d'art, un plaisir plus gratifiant que de leur recommander de rendre visite à l'artiste.
Il va provoquer une révolution dans la façon de peindre la photographie reproduite sur papier. Cela permettra bien sûr d'économiser un temps précieux pour beaucoup. La beauté et la délicatesse, l'ombre définie et l'infini des détails gracieux produits dans ses photographies attireront tous ceux qui désirent posséder un portrait exact et plaisant de leurs proches" (extrait traduit de l'anglais).
Cet article sort à l'occasion de la première parution d'une publicité d'Auguste Verneuil qui va s'échelonner sur quinze mois. Celle-ci présente son atelier de photographie situé "N° 2, Rue Siblequin" (partie de l'actuelle rue Faidherbe) où il a succédé au photographe Alphonse Lamy.
Il y propose des portraits, notamment stéréoscopiques, de 4 francs à 100 francs et plus, un dépôt de photographies de tous genres et styles, exécutées par les plus grands artistes parisiens comme Baldus, Bellordeau et Legray, des vues stéréoscopiques de Suisse, Italie, France, etc., mais également la réalisation de portraits à toute heure et par tous temps, de portraits après décès et de copies d'œuvres d'art.
Un nouvel article paraît dans The Boulogne Gazette du 12 août 1857 : "M. Verneuil, le photographe ["photographist"] talentueux du n°2 rue Siblequin, vient de publier une vue de la cathédrale de la ville haute que nous recommandons à l’attention de nos lecteurs.
Une copie devrait être possédée par chacun, non seulement comme œuvre d’art, mais aussi comme un témoignage permanent de ce que la résolution, l’énergie et la piété peuvent accomplir" (extrait traduit de l'anglais).
Cette vue célèbre la reconstruction, entreprise par l'abbé Haffreingue, de l'ancienne cathédrale Notre-Dame (démolie en 1798) dont le gros œuvre vient de s'achever, et précède de peu la grande procession du 30 août 1857. Auguste Verneuil réalisera d'autres vues de l'édifice et fera notamment le Portrait de l'abbé Haffreingue, qui sera vendu "au profit de l'Œuvre de Notre-Dame".
À la fin de l'année 1857, Auguste Verneuil déménage son atelier et son domicile. La publicité de The Boulogne Gazette répercute sa nouvelle adresse du "N° 22, Rue de l'Ecu" (actuelle rue Victor Hugo), dès le 6 janvier 1858.
Les bans de son mariage sont enfin publiés les 14 et 21 février 1858 mais la cérémonie est encore repoussée. Le 8 mai 1858, "Auguste Marie Verneuil, photographe demeurant en cette ville, rue de l'Ecu, 22", âgé de 45 ans, épouse Marie Victoire Duchochois, à nouveau enceinte, sans profession, domiciliée rue Siblequin, 31, âgée de 23 ans (née le 5 novembre 1834 à Saint-Omer), fille de Louis Victor Duchochois, ébéniste et de Marie Augustine Carpentier.
Plusieurs remarques s'avèrent nécessaires. L'adresse séparée de la future épouse interroge. Est-ce la sienne ou celle de ses parents qui ne se voit cependant pas confirmée par les différents recensements de cette période ?
Étrangement, l'acte de mariage n'entraîne pas la reconnaissance de leur fils Auguste. A-t-elle déjà eu lieu ou ne se fera-t-elle que plus tardivement ?
Enfin, il faut noter que parmi les quatre témoins signataires de l'acte, trois sont des horlogers, Constant Joseph Riéder, Jean Baptiste Cléton et Pierre Pitois, et que le quatrième est l'artiste statuaire, Eugène Blot (1830-1899).
Le couple va avoir un deuxième enfant, Constant Emile Verneuil, qui va naître à Boulogne-sur-Mer le 9 septembre 1858, rue de l'Ecu, 22.
Leur troisième fils, Ernest Victor Verneuil, va pour sa part naître le 26 mai 1860, à la nouvelle adresse de la rue de l'Ecu, 32.
C'est là, en effet, qu'Auguste Verneuil vient de succéder au photographe Charles Constant Simonet (de Changy). Auguste va d'ailleurs chercher, dans les mois suivants, à louer ses anciens atelier et boutique du n° 22 (petite annonce qui paraît dans le journal La Lumière du 11 août 1860 p 127).
Auguste et sa famille sont ensuite cités dans le recensement de 1861 (vers février-mars) au 32, rue de l'Ecu : "Verneuil Louis [?] Marie, Photographe, marié 47 [48 ans] ; Duchochois Victoire, sa femme, mariée, 26 [ans] ; Verneuil Auguste, son fils, célibataire, 4 [ans] ; Verneuil Emile, idem, célibataire, 2 1/2 [ans] ; Verneuil Ernest, idem, célibataire 9 [mois !] ; Cursu Sydonie, domestique, célibataire, 21 [ans]".
En novembre 1861, Auguste Verneuil est nommé "seul représentant du Panthéon de l'ordre Impérial de la Légion d'honneur pour le Département du Pas-de-Calais" (voir l'article de ce blog, ici).
Le 29 mars 1862, un arrêté municipal change le nom de la "rue de l'Ecu" en "rue Napoléon" (jusqu'au 25 novembre 1870) mais Auguste Verneuil continue à utiliser ses anciens cartons-photos toute l'année 1862 (l'un d'eux est daté de décembre 1862), avant de les remplacer l'année suivante.
Le 23 mai 1864, Auguste Verneuil, adresse une lettre "A Monsieur Lacan, rédacteur du Moniteur de la Photographie". Il y signale son intérêt pour un nouvel appareil d'agrandissement présenté à la Société française de photographie par M. Liétard", dit s'être rendu à Paris pour acquérir l'une de ces chambres solaires et l'avoir expérimentée dès son retour. "Je viens, écrit-il, d'obtenir un portrait de femme, en pied, de 45 sur 60 que j'ai l'honneur de vous adresser (...) ; tout est d'une netteté irréprochable. L'épreuve a été obtenue en cinquante-cinq minutes de pose (...).
Le grand avantage est que rien n'est disproportionné (...) ; le nouvel appareil va rendre de grands services, en donnant des épreuves de grande dimension, d'une beauté réelle, et évitant aux photographes, l'acquisition énormément coûteuse d'un objectif de grand diamètre, qui demande une pose prolongée du modèle, tandis qu'à l'aide d'un petit cliché, nécessaire à l'agrandissement, une pose de trois à cinq secondes est suffisante, etc., etc." (Alphonse Liébert, La Photographie en Amérique, Paris, 1864 pp 14-15).
En novembre 1864, un drame boulonnais familial marque les esprits : le meurtre de deux jeunes enfants illégitimes, d'environ 4 et 7 ans, par leur père M. Leducq. Auguste Verneuil semble missionné pour faire la photographie de ce dernier à la prison de Boulogne-sur-Mer, avant son transfert pour Calais où il sera jugé puis condamné et exécuté (Journal des débats politiques et littéraires des 11 et 12 novembre 1864 ; Journal de Saint-Quentin et de son arrondissement du 14 décembre 1864...).
Le 9 juin 1865, Auguste Verneuil, représenté par le sieur Charles Catez, manufacturier à Arras, dépose à la préfecture de cette ville, un brevet d'invention de 15 ans "pour un appareil pour l'agrandissement des clichés, fonctionnant de tout temps et sans besoin de soleil et opérant en quelques secondes" (Bulletin des Lois de l'Empire Français, T XXX, 1868 p 354).
Il présente ensuite, à la Société Française de Photographie, des épreuves agrandies dont "le petit cliché primitif avait été obtenu au moyen de la chambre automatique de M. Bertsch".(Bulletin de la Société Française de Photographie, 1865, séance du 4 août pp 202-204 et séance du 3 novembre 1865 p 286). Désiré van Monckhoven, dans son Traité d'optique photographique de 1866 (p 266), signalera ces "très belles" épreuves agrandies.
En septembre 1865, il réalise une photographie du Monument au Docteur Edward Jenner (inventeur de la vaccine), élevé conjointement par la Ville de Boulogne-sur-Mer et de la Société des Sciences Industrielles, Arts et Belles-Lettres de Paris, et inauguré à Boulogne-sur-Mer, sur le place des Bains, le 11 septembre (The Illustrated London News du 7 octobre 1865).
Le recensement de 1866 (vers juin) cite la famille Verneuil, rue Napoléon, 32 : "Verneuil Auguste, Photographe, marié, 54 [53 ans] ; Duchochois Victoire, sa femme, mariée, 29 [ 31 ans] ; Verneuil Auguste, son fils, célibataire, 9 [ans] ; Verneuil Emile, idem, célibataire, 8 [ans] ; Verneuil Ernest , idem, célibataire, 6 [ans] ; Morlet Augustine, domestique, célibataire, 21 [ans]".
En août 1866, le photographe réalise une série de vues stéréoscopiques et un album de l'Exposition Internationale de Marine et de Pêche de Boulogne-sur-Mer (Le Monde Illustré du 1er septembre 1866 pp 133-134, avec une "Vue de la galerie principale d'après les photographies d'A. Verneuil") (Note 9).
Il semble qu'aucune épreuve d'Auguste Verneuil, daguerréotype ou photographie, effectuée dans les années 1840 et 1850, à Saint-Omer, Arras, Dunkerque ou Boulogne-sur-Mer ne soit connue. Les seules épreuves conservées sont celles des années 1860 à Boulogne-sur-Mer.
Ses cartes de visite (portraits et vues) affichent au verso :
- l'adresse de la "Rue de l'Ecu, 32" : présentation utilisée de 1860 à 1861 ;
- ou encore celle du "32, Rue Napoléon, 32" (précédée à nouveau des deux faces de la médaille d'Arras et suivie de la mention "Ancienne Maison Simonnet (sic)" mais toujours accompagnée de la mention du Panthéon de l'ordre Impérial de la Légion d'honneur déjà citée), présentation utilisée de 1863 à 1868 ;
Ses vues stéréoscopiques affichent pour leur part au recto :
- "Verneuil, Editeur, 32, Rue de l'Ecu" (d'un côté, et "Vue panoramique de Boulogne s/mer", de l'autre), à l'encre noire sur fond jaune, présentation utilisée vers 1860-1862 (dont une vue de l'Hôtel du Pavillon Impérial des Bains de Mer de Boulogne-sur-Mer) ;
- "Verneuil, Editeur, 32, Rue Napoléon" (d'un côté, et "Vue panoramique de Boulogne s/mer", de l'autre), à l'encre blanche sur fond brun, présentation utilisée vers 1863-1868 (dont une vue de l'Autel de l'Église Notre-Dame de Boulogne-sur-Mer) ;
- "Verneuil, Editeur, 32, Rue Napoléon." (des deux côtés), à l'encre blanche sur fond brun, avec parfois un titre en bas, présentation utilisée au milieu des années 1860 dont la série, "Exposition Internationale De Pêche De Boulogne S/M. Août 1866" (la couverture et les vues de l'album correspondant affichent, "Verneuil, Phot. Edit. - 32, Rue Napoléon") (Note 9).
Auguste Verneuil quitte Boulogne-sur-Mer pour Paris, en 1868, après avoir cédé son atelier au photographe Bruneteau (qui le conservera jusqu'en 1870).
PARIS (Seine)
À Paris, Auguste Verneuil reprend l'atelier et le fonds du photographe Alexandre Bertrand (1822-1889), à l'adresse de la rue Dauphine, 34 (6ème arrondissement).
Cette reprise a lieu au plus tard, l'été 1868, l'une de ses premières publicités paraissant au mois d'août de cette année-là (Le Figaro du 29 août 1868 ; L'Ami des Enfants du 30 octobre 1868).
Il va conserver cet atelier plus de vingt ans mais cette période parisienne reste à étudier plus en détail.
En 1870 il présente, à l'Exposition de la Société Française de Photographie, des "Epreuves obtenues par agrandissement" (Catalogue de la Neuvième Exposition de la S.F.P., Paris, 1870 p 31).
Ses cartes de visite affichent au verso :
- "A. Bertrand (...) - 34, rue Dauphine - Paris - (Faub.g St.Germain)", de 1867 jusqu'au milieu des années 1870
- puis "Ancienne Maison Bertrand - Verneuil (...) - 34, rue Dauphine - Paris", de la fin des années 1870 à 1887 environ.
Ces cartons-photos sont imprimés à l'encre noire (texte vertical), avec l'indication de nombre (imprimé) de clichés conservés tout en haut et le numéro (manuscrit) de cliché tout en bas, sur le modèle des derniers cartons d'Alexandre Bertrand qui affichaient déjà "35.000 clichés sont conservés".
Cependant, on constate que si le nombre total de clichés correspond chez Verneuil à un nombre atteint pour "40.000", ce n'est plus le cas ensuite pour "50.000" (dès les numéros 47.000), pour "80.000" (dès les numéros 58.000) ou "100.000" (dès les numéros 60.000). Les rares cartons portant une dédicace datée indiquent les années 1880 pour tous les numéros de clichés supérieurs à 70.000.
- Grande signature oblique "Verneuil", suivie de "Paris - Ancienne Maison Bertrand" et de l'emplacement du numéro de cliché, à l'encre verte (texte horizontal).
Ce type de carton-photo semble avoir été utilisé dès 1867 (distribué notamment par Cottereau, 33, rue Vivienne, avec les médailles Impériales), parallèlement aux types ci-dessus, peut-être jusqu'à la fin des années 1870, si l'on en croit le très rare numéro de cliché porté sur l'un d'entre eux, supérieur à 68.000.
Ses vues stéréoscopiques (scènes de genre et paysages) affichent au verso :
- "Photographie A. Bertrand - A. Verneuil Succr - 34 rue Dauphine Paris" (sur fond de couleur jaune, bleu ou brun).
Déposées à partir de 1868, ces scènes de vie et ces vues semblent issues du fonds d'Alexandre Bertrand. Plus de 600 d'entre elles sont conservées à la Bibliothèque nationale de France (Notes 7 et 8).
Auguste Verneuil semble quitter la rue Dauphine et cesser toute activité professionnelle courant 1887 ou 1888, à l'âge de 75 ans, mais continuer la pratique de la photographie et de l'horlogerie à sa nouvelle adresse parisienne du 25, rue Humboldt (14ème arrondissement).
C'est là que son fils Contant Emile Verneuil (né le 9 septembre 1858 à Boulogne-sur-Mer) décède malheureusement, le 8 décembre 1888, à l'âge de 30 ans.
Auguste Verneuil reste cité à cette même adresse dans les listes des photographes (annuaires, revues, répertoires) jusqu'aux premières années du XX° siècle (Annuaires-almanachs Firmin-Didot 1890-94 ; Annuaire général et international de la Photographie, 1899 p 318 ; Paris-adresses 1902 p 1492).
Son épouse Victoire (née le 5 novembre 1834 à Saint-Omer) y décède le 14 juin 1899, âgée de 64 ans, et lui-même (né le 17 août 1812 à Paris), le 25 mai 1904, âgé de 91 ans. Leurs corps reposent dans un caveau familial du Cimetière de Montparnasse.
NOTES BIBLIOGRAPHIQUES ET SITOGRAPHIQUES
(1)- TINTILLIER Daniel, "Auguste Verneuil", dans, De Tailliez au studio Papillon ou cent trente ans de photographie à Boulogne, Boulogne-sur-Mer, Imprimerie du littoral, 1986.
(2)- VOIGNIER Jean-Marie, "Verneuil", dans, Répertoire des Photographes de France au Dix-Neuvième Siècle, Le Pont de Pierre, 1993, p 249.
(3)- PERREAU Jean-Louis, "Les débuts de la photographie à Dunkerque (1840-1914)", dans, Revue historique de Dunkerque et du littoral, n°40, janvier 2007, pp 34-39 et 53.
(4)- BOISJOLY François, "Verneuil Auguste Marie", dans, Répertoire des photographes parisiens du XIX° siècle, Editions de l'Amateur, 2009 (non consulté).
(5)- L'ATELIER DES PHOTOGRAPHES DU XIX° SIÈCLE, "Boulogne-sur-Mer, Verneuil", site en ligne CanalBlog, 2011 (ici).
(6)- BÉCUWE Matthieu, BACART Laurence, BALLANFAT Julie, "Verneuil Auguste Marie", dans, Les Photographes à Saint-Omer de 1839 à 1914, Catalogue de l’exposition présentée à la Bibliothèque d’agglomération de Saint-Omer (BASO) du 16 septembre au 10 décembre 2016, notamment p 56 (ici).
(7)- BnF (Bibliothèque nationale de France), "Verneuil Auguste Marie", Notice biographique (ici) et bibliographique (ici).
(8)- LE STÉRÉOPÔLE, "Vues stéréoscopiques de A. Bertrand déposées par A. Verneuil", Collection, La Stéréothèque (ici), et Étude d'une vue, Images stéréoscopiques (ici).
(9)- VERNEUIL Auguste, Exposition internationale de Pêche de Boulogne-sur-Mer, août 1866.
Portfolio in-8 (15 x 20 cm), couverture titrée, composé de 20 épreuves sur papier albuminé, contrecollées sur cartons. Crédit du photographe Verneuil, Phot. Edit., titre et date sur les montages. Format moyen des épreuves : 9 x 7,5 cm. Vente Drouot, 2015.
Portfolio de la Bibliothèque municipale de Boulogne-sur-Mer, 14 pages cartonnées sur lesquelles sont contrecollés des tirages représentant l'exposition. Couv. souple (31 x 48 cm). Document dédicacé à Mr Livois, maire de Boulogne-sur-Mer. Document à voir et télécharger sur, L'Armarium, Bibliothèque Numérique des Hauts-de-France (ici).
Série de vues stéréoscopiques de l'Exposition (actuellement en vente sur eBay).