- Plan de la Ville de Nice, 1856, dressé par Ch. Montolivo, gravé par Ch. Dyonnet, B. Visconti éditeur, Nice, 1856, BnF, Paris (voir sur Gallica). |
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VÉRONIQUE THUIN-CHAUDRON, HISTORIENNE DE L'ARCHITECTURE
ET DIDIER GAYRAUD, HISTORIEN DE LA PHOTOGRAPHIE
ET DES VILLAS DE LA CÔTE D'AZUR
DERNIÈRE MODIFICATION DE CET ARTICLE : 03/11/2024
ET DIDIER GAYRAUD, HISTORIEN DE LA PHOTOGRAPHIE
ET DES VILLAS DE LA CÔTE D'AZUR
DERNIÈRE MODIFICATION DE CET ARTICLE : 03/11/2024
LA PROMENADE DES ANGLAIS
Au début du XIX° siècle, le sentier du littoral, situé sur la rive droite du Paillon, en dehors de la ville de Nice, est bordé de prairies, de bois et de quelques propriétés dont certaines datent de la fin du XVIII° siècle. Les hivernants anglais du quartier proche de la Croix-de-Marbre, ou New Borough, décident d’aménager à leurs frais ce sentier, en créant entre 1822 et 1824, un chemin de 2 m de large, "afin de faire travailler les pauvres, et de procurer aux étrangers, et surtout aux malades habitans (sic) au faubourg, une promenade saine et agréable" (Guide des Etrangers à Nice, 1826 p 115).
La municipalité prend ensuite le relais dans le cadre du plan de développement de la ville encadré par le Consiglio d’Ornato et prévoit dès 1832 un tracé ambitieux. Un premier tronçon du "Chemin des Anglais", élargi à 4 m, est réalisé en 1844, de l’embouchure du Paillon jusqu’au Vallon Saint-Philippe, et devient la "Promenade des Anglais".
Étroite et mal entretenue mais très fréquentée (L’Avenir de Nice des 18 janvier 1852, 4 août 1852 et 19 août 1853), la voie est cependant sécurisée et doublée en 1853.
épreuve de 26x19 cm, P_240-1.r-11-N° 10,
Magyar Országos Levéltár (Archives nationales de Hongrie).
La vue prise depuis le quai du Midi montre l'embouchure du Paillon (encore dépourvue de pont), l'angle de la place du Jardin des Plantes et la perspective de la Promenade des Anglais. Cette dernière, étroite et bordée des poteaux du télégraphe, longe la large plage où se notent, près de l'Hôtel Victoria, quelques cabines de bain.
Au cours de l'année 1856, la voie est prolongée jusqu’à l’embouchure du Magnan. Le revers des talus est même semé de gazon.
"La Promenade des Anglais s'élargit, se régularise et, dans la campagne dernière on vient de la prolonger jusqu'au pont de Magnan (...) La Promenade des Anglais a un indispensable besoin d'arbres (...) Cette plantation serait infiniment mieux entendue que celle de ces petits pieds d'aloès que l'on a si singulièrement mélangés au gazon de la promenade des Anglais. Du gazon sur le bord de la mer !!!
La Promenade des Anglais, déjà si belle et si fréquentée doit être élargie, bordée de trottoirs et éclairée au gaz. Peut-être une plantations de pins parasols y réussirait-elle. Tout se fera peu à peu" (A. Burnel, Nice, Société typographique, janvier 1857 p 34, note 1 p 53, p 84, p 135, p 184).
De nombreux articles paraissent dans L’Avenir de Nice entre 1857 et 1859 pour demander l’élargissement de la Promenade et pallier l’absence de sécurité des piétons, l’absence d’éclairage, de bancs en bois et de plantations en bord de mer.
"Des études seront faites sous peu pour élargir la promenade des Anglais et lui donner dans tout son parcours la largeur de trente mètres qu'elle a déjà sur divers points" (Les Echos de Nice du 9 février 1858).
"En entrant dans la ville par la promenade des Anglais, parallèle à la rue de France [les deux voies se raccordent au pont de Magnan], nous trouvons (…) une foule de magnifiques hôtes et de charmantes habitations qui font de cette promenade un délicieux panorama. C’est le rendez-vous habituel de la fashion. On a une vue magnifique sur le golfe et une exposition en plein midi" (Charles Brainne, in, Le Constitutionnel du 8 août 1858 pp 2-3).
Les propriétés alignent pour la plupart leur entrée principale au nord, sur la rue de France où elles sont numérotées, alors que leur terrain va jusqu’au bord de mer, offrant quelques pavillons enceints de murs bas et de grilles et surtout de grands jardins plantés d’orangers, de citronniers et de fleurs.
"Les charmantes villas de MM. De Orestis, Avigdor, Diesbach, Lions, Pollan, Guiglia, Masclet, Gilly, Donaudy, Castellane, etc., etc., bordent dans toute sa longueur cette belle promenade des Anglais" (A. Burnel, Etude sur Nice, 1856 p 84).
Ces villas hébergent notamment, dans les années 1856-1859, l’Impératrice douairière de Russie Alexandra Feodorovna [1798-1860] (Villa Avigdor, Villa de Orestis) et ses enfants (Villa de Orestis, Maison Lavit), le duc [1824-1876] et la duchesse de Mecklenbourg-Strelitz [1827-1894] (Villa de Orestis), la grande duchesse Sophie de Bade [1789-1860] (Villa Lions) et la duchesse Dorothée de Sagan [1817-1862] (Villa Avigdor).
Quelques cabines de bains existent sur la plage de la Promenade des Anglais dès le milieu des années 1850 (aquarelle de Jacques Guiaud) et l’une d’entre elles accueille la grande-duchesse Elena Pavlovna de Russie [1807-1873], dès les printemps 1857 et 1858 (L'Avenir de Nice du 15 avril 1858 p 3).
"En entrant dans la ville par la promenade des Anglais, parallèle à la rue de France [les deux voies se raccordent au pont de Magnan], nous trouvons (…) une foule de magnifiques hôtes et de charmantes habitations qui font de cette promenade un délicieux panorama. C’est le rendez-vous habituel de la fashion. On a une vue magnifique sur le golfe et une exposition en plein midi" (Charles Brainne, in, Le Constitutionnel du 8 août 1858 pp 2-3).
Les propriétés alignent pour la plupart leur entrée principale au nord, sur la rue de France où elles sont numérotées, alors que leur terrain va jusqu’au bord de mer, offrant quelques pavillons enceints de murs bas et de grilles et surtout de grands jardins plantés d’orangers, de citronniers et de fleurs.
"Les charmantes villas de MM. De Orestis, Avigdor, Diesbach, Lions, Pollan, Guiglia, Masclet, Gilly, Donaudy, Castellane, etc., etc., bordent dans toute sa longueur cette belle promenade des Anglais" (A. Burnel, Etude sur Nice, 1856 p 84).
Ces villas hébergent notamment, dans les années 1856-1859, l’Impératrice douairière de Russie Alexandra Feodorovna [1798-1860] (Villa Avigdor, Villa de Orestis) et ses enfants (Villa de Orestis, Maison Lavit), le duc [1824-1876] et la duchesse de Mecklenbourg-Strelitz [1827-1894] (Villa de Orestis), la grande duchesse Sophie de Bade [1789-1860] (Villa Lions) et la duchesse Dorothée de Sagan [1817-1862] (Villa Avigdor).
Quelques cabines de bains existent sur la plage de la Promenade des Anglais dès le milieu des années 1850 (aquarelle de Jacques Guiaud) et l’une d’entre elles accueille la grande-duchesse Elena Pavlovna de Russie [1807-1873], dès les printemps 1857 et 1858 (L'Avenir de Nice du 15 avril 1858 p 3).
- Publicité pour les Bains George parue dans L'Avenir de Nice des 1er juin, 11 juin et 9 juillet 1859 p 4,
Archives Départementales des Alpes-Maritimes.
Des vues panoramiques montrent ainsi le chemin depuis la mer, le Vallon de Magnan ou le quartier de Sainte-Hélène (à l’ouest), la colline du Château ou le quai des Ponchettes (à l’est). Les vues rapprochées ne concernent le plus souvent que le chemin, sablé et ponctué de bancs de pierre, dans sa portion orientale comprise entre le Vallon de Saint-Barthélemy et l’embouchure du Paillon, à proximité du quartier de la Croix-de-Marbre.
Quelques photographies témoignent à leur tour de la Promenade des Anglais, dès la fin des années 1850, notamment celles de Pierre Ferret [1815-1875], Louis Crette [c.1823-1872], Michel Schemboche [c.1828-1908] et Charles Cottalorda [c.1837-?]. Elles reprennent des points de vue semblables aux dessins et peintures et se concentrent elles aussi sur la partie orientale de la Promenade.
1850-1860 – LA PARTIE ORIENTALE DE LA PROMENADE DES ANGLAIS (D'OUEST EN EST : Du Vallon Saint-Barthélémy – actuelle rue de Rivoli – à l’embouchure du Paillon)
A la fin des années 1840, il n’existe que quelques constructions qui bordent la partie orientale de la Promenade des Anglais, espacées de jardins et groupées entre la ruelle du Lavoir et l’embouchure du Paillon, avec d’ouest en est : [le Vallon de Saint-Barthélemy], [la ruelle du Lavoir], La Maison Villanova, la Villa Regis, le Pavillon Pollan, la Villa Süe, [la ruelle de la Croix-de-Marbre], [la ruelle du Canal], la Maison Donaudy (en avant des autres propriétés – et la Maison Laurencin à l’angle du Jardin Public).
Les rencontres mondaines, effectuées en début d’après-midi sur la Promenade des Anglais, notamment les jours de concert de l’orchestre militaire au Jardin Public, se voient prolongées en soirée dans les villas et les hôtels qui s’installent. Les drapeaux des souverains flottent sur les toits des villas qui les accueillent.
Aux villas et appartements loués à la saison (de novembre à mars), les hôtels qui vont s'ouvrir sur la Promenade vont constituer une alternative (location à la nuitée, à la semaine, au mois, d'une chambre, d'un étage ou de l'ensemble).
L'HÔTEL VICTORIA
Au printemps 1854, deux grandes maisons sont en construction sur la Promenade des Anglais, l'une dans le jardin Serrat et l'autre, plus à l'ouest, près du Vallon Saint-Barthélemy.
- Plan de la Ville de Nice, détail de la Promenade des Anglais, 1856, plan dressé par Ch. Montolivo, gravé par Ch. Dyonnet, B. Visconti éditeur, Nice, 1856, BnF, Paris (voir sur Gallica). |
L'HÔTEL VICTORIA
Au printemps 1854, deux grandes maisons sont en construction sur la Promenade des Anglais, l'une dans le jardin Serrat et l'autre, plus à l'ouest, près du Vallon Saint-Barthélemy.
Le maître d’hôtel sicilien Gioanni/Jean Zichitelli/Zicchitelli/Zichitelly (1806-apr.1870) qui dirige alors l’hôtel Victoria au 5, place du Jardin Public, souhaite déplacer cet hôtel dans la nouvelle maison du jardin Serrat.
La transaction n'aboutissant pas, il se reporte sur la maison du Vallon Saint-Barthélémy qui est en principe destinée à devenir le nouvel hôtel de Joseph Faraut/Faraud/Féraud (1814-1881), alors directeur de l'Hôtel Paradis au 11, quai du Midi (Pierre Cauvin, Cicerone pour l'Etranger de Nice et ses environs, 1855 pp 82-83).
La maison érigée par l’entrepreneur Etienne Gilli/Gilly [1813-1866] va en définitive être louée à Jean Zichitelli. Son ancien hôtel Victoria coexiste le temps des travaux avec l'Hôtel de Grande-Bretagne puis emménage dans la nouvelle construction en 1855.
L'Hôtel Victoria est non seulement le premier hôtel à ouvrir sur la Promenade des Anglais mais il en est l’un des principaux embellissements.
Nice, Archives Municipales, O4/12-150.
Le bâtiment en pierre de taille est constitué d’un rez-de-chaussée et de trois étages alignant 15 baies sur les faces principales et 6 baies sur les faces latérales. L’entrée monumentale en arc plein cintre est surmontée d’un balcon et toute la partie basse de la façade est ornée d’un appareil régulier en bossage à refend.
Au dernier niveau de la façade sud, la partie centrale est en profond retrait, dégageant ainsi une large terrasse et faisant apparaître les parties latérales comme des pavillons. La corniche repose sur des corbeaux imposants. Une enseigne marque l’avant-dernier niveau du bâtiment central et le sommet des façades latérales.
L’Hôtel Victoria accueille notamment l’ancienne reine de Hollande (Anna Pavlovna de Russie) [1795-1865], fin octobre-début novembre 1859.
Gioanni Zichitelli diffuse ensuite dans L'Avenir de Nice, à partir du 1er juillet 1856, la publicité suivante.
- Publicité parue dans L’Avenir de Nice du 1er juillet au 22 septembre 1856 p 4, Nice,
Archives Municipales.
En 1857, c’est la publicité suivante qu’il fait paraître : "Maisons de confiance recommandées à l’étranger - Hôtel Victoria – Situé au milieu de la Promenade des Anglais, en face de la mer, l’Hôtel Victoria est à peu près le seul à Nice, qui domine la baie tout entière. Confortablement et richement aménagé, ce magnifique établissement possède un beau jardin et a deux entrées, l’une sur la route de France, l’autre sur la Promenade des Anglais.
La table en est recherchée. Les prix sont modérés. Pour satisfaire sa nombreuse clientèle, M. Zicchitelli a ajouté cette année à son hôtel, du côté de la route de France, au fond d’un jardin, une maison bien meublée pour recevoir les personnes dont la santé délicate pourrait être incommodée du bruit de la mer" (A. Burnel, Nice, préfacé en décembre 1856, 2° éd. de janvier 1857, publicité en fin d’ouvrage en anglais et en français).
L’Hôtel Victoria accueille notamment l’ancienne reine de Hollande (Anna Pavlovna de Russie) [1795-1865], fin octobre-début novembre 1859.
- GARIN DE COCCONATO Urbain (1813-1877), La Promenade des Anglais et l'Hôtel Victoria, vers 1855-1857, aquarelle dont la photographie est publiée dans L’Éclaireur du Dimanche du 2 mars 1930 p 10, BnF (Gallica). Voir une meilleure reproduction de l'aquarelle sur le site des Archives Départementales (ici), cote 10FI0397. |
LA VILLA ROBIONY
Antoine Robioni/Robiony [1795-1877], négociant et propriétaire, fait ériger à la fin des années 1850 (entre 1856 et 1860) une villa proche de l’Hôtel Victoria (à l'est) sur l'ancien terrain du jardin de la marquise Julie de Castellane [1788-1855], acheté à ses héritiers.
Le bâtiment de plan rectangulaire (grands côtés ouest et est) est constitué de trois niveaux percés de cinq baies surmontées d'ornements sculptés. La façade sud présente des extrémités en légère saillie, un balcon central au premier niveau et est couronnée d'une terrasse à balustrade ornée d'un petit fronton triangulaire central.
LA MAISON VILLANOVA
La Maison est érigée entre 1847 et 1854 au sud du terrain du marquis Alphonse de Chamillart de la Suze [1776-1871] (propriétaire dans la Sarthe), par sa fille Léonide Magdelaine [1808-1886], épouse du marquis Henri Joseph de Villeneuve-Bargemont [1807-1878]. C'est probablement le pavillon signalé loué à des étrangers dès 1854 au n° 25 puis n° 23 du chemin des Anglais (L'Avenir de Nice du 12 novembre 1854 et du 19 décembre 1855 p 4).
LA VILLA REGIS
La Villa du comte Régis (ancien ministre et sénateur des royaumes de Piémont-Sardaigne) et de son épouse (née Desforge de Baumé) est constituée de deux bâtiments, une villa néo-gothique érigée en 1835-36 et un bâtiment antérieur (AM O 4/5-178 – AM O 4/10-71).
La Villa est vendue après 1847, probablement entre 1851 et 1855, à Manuel Fernandez [c.1825-apr.1884] (il s’est marié à Paris en 1851 et son fils est né à Nice la même année). Ce dernier réunit les deux bâtiments existants par le biais d’un bâtiment intermédiaire et d’une nouvelle façade sud, afin d’obtenir un ensemble homogène et très allongé, percé de 11 baies mais constitué de trois niveaux peu élevés. Un appareil régulier à bossage orne le rez-de-chaussée et la partie centrale des niveaux supérieurs (AM O 4/3-10).
Antoine Robioni/Robiony [1795-1877], négociant et propriétaire, fait ériger à la fin des années 1850 (entre 1856 et 1860) une villa proche de l’Hôtel Victoria (à l'est) sur l'ancien terrain du jardin de la marquise Julie de Castellane [1788-1855], acheté à ses héritiers.
Le bâtiment de plan rectangulaire (grands côtés ouest et est) est constitué de trois niveaux percés de cinq baies surmontées d'ornements sculptés. La façade sud présente des extrémités en légère saillie, un balcon central au premier niveau et est couronnée d'une terrasse à balustrade ornée d'un petit fronton triangulaire central.
LA MAISON VILLANOVA
La Maison est érigée entre 1847 et 1854 au sud du terrain du marquis Alphonse de Chamillart de la Suze [1776-1871] (propriétaire dans la Sarthe), par sa fille Léonide Magdelaine [1808-1886], épouse du marquis Henri Joseph de Villeneuve-Bargemont [1807-1878]. C'est probablement le pavillon signalé loué à des étrangers dès 1854 au n° 25 puis n° 23 du chemin des Anglais (L'Avenir de Nice du 12 novembre 1854 et du 19 décembre 1855 p 4).
LA VILLA REGIS
La Villa du comte Régis (ancien ministre et sénateur des royaumes de Piémont-Sardaigne) et de son épouse (née Desforge de Baumé) est constituée de deux bâtiments, une villa néo-gothique érigée en 1835-36 et un bâtiment antérieur (AM O 4/5-178 – AM O 4/10-71).
La Villa est vendue après 1847, probablement entre 1851 et 1855, à Manuel Fernandez [c.1825-apr.1884] (il s’est marié à Paris en 1851 et son fils est né à Nice la même année). Ce dernier réunit les deux bâtiments existants par le biais d’un bâtiment intermédiaire et d’une nouvelle façade sud, afin d’obtenir un ensemble homogène et très allongé, percé de 11 baies mais constitué de trois niveaux peu élevés. Un appareil régulier à bossage orne le rez-de-chaussée et la partie centrale des niveaux supérieurs (AM O 4/3-10).
Certains appartements de la Villa sont loués par Manuel Fernandez.
- Annonce de location, parue dans L'Avenir de Nice du 9 janvier 1859 p 4,
Archives Départementales des Alpes-Maritimes.
LE PAVILLON POLLAN
Ce pavillon, propriété de Narcisse Pollan/Paulan/Paulhan [né en 1831], est l’une des architectures emblématiques de la Promenade. Comme la Villa Regis, il est né de la réunion et de la rénovation de deux bâtiments anciens (des années 1820), avec la construction d’un troisième bâtiment intermédiaire, entre 1847 et 1853 (AM O 4/10-71 et O 4/11-65).
Le Pavillon est désormais constitué d’un bâtiment central de trois niveaux (de cinq baies), accosté de deux ailes, de 2 niveaux (de cinq baies) seulement, couronnées d’une terrasse à balustrade. L’entrée principale prend la forme d’un arc plein cintre surmonté d’un balcon.
Un projet de Casino dans la propriété Pollan voit le jour en juin 1853 (L'Avenir de Nice du 22 juin 1853 pp 2-3). "Il s'étendrait sur le quai des Anglais en face de la mer et embrasserait dans son vaste développement les plus magnifiques jardins que possède notre pays [avec serre de plantes rares et ménagerie d'animaux] (...).
Au milieu de ces jardins, serait construite en forme de pavillon, une immense salle richement décorée pour bals et concerts. Plusieurs corps de logis seraient affectés aux diverses destinations du Casino [restaurant, café, salle de jeux, salons de billard et de lecture, salons pour dames, galerie de tableaux, petit musée d'histoire naturelle...]. Enfin, un établissement de bains de mer compléterait ce bel ensemble (L'Avenir de Nice du 26 juin 1853).
Le projet, déposé par la famille Schneider, est accepté par la municipalité mais refusé par le ministre de l'Intérieur (sarde) en octobre 1853. Une nouvelle demande est faite dans les semaines suivantes et est cette fois acceptée. Le Casino semble ouvre le 4 janvier 1854 (voir l'annonce ci-dessous).
- Annonce pour le Casino, parue dans L'Avenir de Nice du 7 janvier 1854 p 4,
Archives Départementales des Alpes-Maritimes.
Si le pavillon comprenant la grande salle de bals et de concerts a bien été construit (en bois) et que des lustres ont été loués, leurs factures s'accumulent et les créanciers en appellent au Consulat de commerce et de mer dès avril-mai 1854 (AD 01FS 1217, 06FS 0180 et 0181).
Parmi les actionnaires du Casino, outre la famille Schneider, se notent les noms de M. Rescalli et surtout de M. François Blanc [1806-1877] (qui sera à l'initiative du futur Casino de Monaco).
L'activité du Casino de la Promenade s'arrête dès le printemps 1854, pour cause de faillite. La vente du mobilier se fait de gré à gré début juin (L'Avenir de Nice des 4 et 5 juin 1854 p 4). Un article publié dans Le Figaro du 29 décembre 1868 (p 2) rappelle que "cette création avorta par suite de circonstances indépendantes de la volonté du Conseil municipal de Nice".
En 1854 et 1855, le Pavillon Pollan est signalé au n° 17 du chemin des Anglais et est loué en partie à des étrangers (Listes des Étrangers séjournant à Nice publiées dans L'Avenir de Nice du 20 octobre 1854 p 4 et du 22 décembre 1855 p 4).
La Maison Goupil de Paris expose tableaux, estampes, dessins et photographies dans le grand salon de la Villa Pollan l'hiver 1856-1857 (L'Avenir de Nice du 4 décembre 1856 et du 10 janvier 1857).
L’aile occidentale du Pavillon Pollan est vendue en 1858 à l’anglaise Eliza Morgan Beville, veuve Claridge, les héritiers Pollan conservant le bâtiment central et l’aile orientale.
L'adresse précédente de Madame Claridge et de son époux, le capitaine Richard Tappin Claridge [c.1798-1857], était rue du Lazaret, Maison Claridge (L'Avenir de Nice du 2 novembre 1854 et du 15 décembre 1855 p 4).
LA VILLA ET LA MAISON SÜE
La propriété, signalée dès 1844, appartient au négociant Marcellin Süe [1802-1883] (AM AM O 4/10-71 et O 4/10-316). Deux bâtiments y sont construits entre 1844 et 1847, en léger retrait de la Promenade, l’un de plan carré, au sud-ouest du terrain, à proximité du Pavillon Pollan, et l’autre de plan rectangulaire, au sud-est du terrain, à proximité de la ruelle de la Croix-de-Marbre.
LA VILLA ET LA MAISON SÜE
La propriété, signalée dès 1844, appartient au négociant Marcellin Süe [1802-1883] (AM AM O 4/10-71 et O 4/10-316). Deux bâtiments y sont construits entre 1844 et 1847, en léger retrait de la Promenade, l’un de plan carré, au sud-ouest du terrain, à proximité du Pavillon Pollan, et l’autre de plan rectangulaire, au sud-est du terrain, à proximité de la ruelle de la Croix-de-Marbre.
La propriété occupe le n° 15 du chemin des Anglais en 1854 puis le n° 13 en 1855. Une partie des bâtiments est destinée à la location (Liste des Étrangers séjournant à Nice publiée dans L'Avenir de Nice du 12 novembre 1854 p 4).
La villa ouest, de plan carré, présente, vers 1845, une terrasse en avant de la façade ouest, positionnée au deuxième des trois niveaux et reposant sur les piliers de l’entrée. Elle offre également une terrasse, côté est, qui occupe, cette fois, une partie du troisième niveau. Une baie double et une baie simple sont percées sur chacune des faces.
La villa ouest, de plan carré, présente, vers 1845, une terrasse en avant de la façade ouest, positionnée au deuxième des trois niveaux et reposant sur les piliers de l’entrée. Elle offre également une terrasse, côté est, qui occupe, cette fois, une partie du troisième niveau. Une baie double et une baie simple sont percées sur chacune des faces.
Dans la seconde moitié des années 1850, la Villa jusque là invisible (sur les vues aquarellées de Jacques Guiaud, prises de l'ouest) est exhaussée d’un niveau. La terrasse orientale du troisième niveau est comblée et l'ensemble est surmonté d'un quatrième niveau. Ce dernier reproduit la configuration de l'ancien niveau supérieur, avec une terrasse qui occupe à nouveau, côté est, une partie de l'étage.
Les façades orientale et méridionale de la Villa présentent désormais, sur leurs deux niveaux inférieurs, trois baies surmontées d’un petit fronton, hémicirculaire au centre et triangulaire sur les côtés puis, sur leurs deux niveaux supérieurs, des baies dépourvues de décor mais soulignées d'un balcon au quatrième niveau.
Une maison, de plan carré également, semble remplacer, au début des années 1850, le petit bâtiment rectangulaire situé à l'est. Elle est constituée de trois niveaux de quatre baies (façade orientale aveugle). Ces baies sont rectangulaires, excepté celles du troisième niveau de la façade méridionale, qui sont en plein cintre et jumelées par une colonnette centrale.
Deux bâtiments plus bas sont érigés entre la villa et la maison : un petit pavillon de 2 niveaux à l’ouest, coiffé d’un toit à 4 pans, et un plus long bâtiment rectangulaire de 2 niveaux à l’est.
LE PAVILLON GILLY
Laurent Félix Gilly [c1800-1865] possède un petit Pavillon au n° 11 de la Promenade (avant 1855). Le Pavillon Gilly est notamment le lieu de concerts les 16 juin et 2 septembre 1855 (L'Avenir de Nice de ces mêmes dates).
Le Pavillon est ensuite agrandi et accosté d'un autre bâtiment plus en retrait, comme le montre le plan de 1860.
- Annonce d'un concert au Pavillon Gilly, parue dans L'Avenir de Nice du 16 juin 1855 p 4,
Archives Départementales des Alpes-Maritimes.
LE PAVILLON MASCLET
La propriété de Sophie Masclet [Saint-Pétersbourg c.1800- ?], veuve de Pierre Gors [c.1793-c.1855] va de la rue de France à la Promenade des Anglais. Les bâtiments sont concentrés au nord mais un Pavillon est positionné au sud du jardin (visible sur les plans de Ville de 1856 et 1860).
C'est dans ce jardin et ce pavillon que s'installe l'horticulteur Joseph Besson [1797-1868]. Le Parc aux Roses ouvre en novembre 1855.
- Annonce de l'ouverture du Parc aux Roses, parue dans L'Avenir de Nice du 4 novembre 1855,
Archives Départementales des Alpes-Maritimes.
Une élévation conservée en appui d’une demande d’ajout de balcons, en 1858-59, montre le seul niveau concerné du Pavillon Masclet, couronné au centre d’un fronton triangulaire ; la terrasse envisagée du côté sud est portée par des arcs outrepassés et forme un arrondi aux angles du bâtiment (AM O 4/13-67).
En février 1859, une partie de la propriété Masclet est mise en vente par lots, des maisons aux numéros 3, 5 et 7, rue de France mais également deux bandes de terrain sur la Promenade (L'Avenir de Nice du 13 février 1859).
LES MAISONS DONAUDY ET L’HÔTEL DES ANGLAIS
Dans les années 1850, Emilie Gauthier/Gautier [1802-1880], veuve de Jean Baptiste Donaudi/Donaudy [décédé avant 1848], possède à l‘extrémité orientale de la Promenade des Anglais, près de l’embouchure du Paillon, des bâtiments loués aux étrangers.
La Maison Donaudy est antérieure à 1854 et a probablement été érigée après 1846, date d'un litige entre la famille Donaudy, Auguste Laurencin et la municipalité de Nice (AD06 02FS 0914).
En 1854, elle occupe le n° 1 du "chemin" ou "promenade des Anglais". Elle est constituée de 3 niveaux. Sa façade méridionale est composée d’un rez-de-chaussée asymétrique rythmé d’arcades aveugles en méplat qui encadrent les huit baies puis de deux niveaux supérieurs aux baies du même nombre, comportant deux balcons à leurs extrémités, seule la baie centrale en étant dépourvue. La façade occidentale est percée de six baies alors que la façade orientale est totalement aveugle.
Les deux Maisons Laurencin sont acquises par Donaudy en 1853 mais conservent leur nom d'origine, "Maison Laurencin" ou "Maison Donaudy ci-devant (anciennement) Laurencin" et occupent le n° 2 de la "Place du Jardin-Public" ou du "Jardin des Plantes".
Les deux Maisons Laurencin sont acquises par Donaudy en 1853 mais conservent leur nom d'origine, "Maison Laurencin" ou "Maison Donaudy ci-devant (anciennement) Laurencin" et occupent le n° 2 de la "Place du Jardin-Public" ou du "Jardin des Plantes".
Auguste Laurencin [né vers 1810] est venu de Paris au début des années 1830 et a épousé la sœur de Narcisse Pollan en 1838.
Il a fait construire une première maison, entre 1835 et 1842, constituée de quatre niveaux de trois baies rectangulaires avec un rez-de-chaussée orné d’un parement à bossage.
Il a fait construire une deuxième maison en 1844-45, constituée de quatre niveaux de cinq baies, qui a permis de rattacher la précédente au long bâtiment de la Place du Jardin-Public, situé plus au nord.
- Annonce de location d'appartements de la Maison Laurencin, parue dans L'Avenir de Nice du 18 septembre 1854 p 4,
Archives Départementales des Alpes-Maritimes.
- Annonce de location d'appartement de la Maison Donaudy,
parue dans L'Avenir de Nice du 25 novembre 1854 p 4,
Archives Départementales des Alpes-Maritimes.
Les premières publicités paraissent tout d'abord en anglais dès le 28 septembre 1859 dans le journal parisien Galignani's Messenger puis alternativement en français et en anglais à partir du 8 novembre dans L'Avenir de Nice.
- Annonce d'ouverture de l'Hôtel des Anglais, parue dans L'Avenir de Nice du 12 novembre 1859 p 4,
Archives Départementales des Alpes-Maritimes.
En 1859, les anciennes Maisons Laurencin occupent le n° 2 de la Place du jardin-Public alors que les Maisons d'Antoine Robioni, Jules Gilli et de la veuve Annette Louis Trabaud et de son fils Louis occupent respectivement le n° 4 (avec le magasin de Mme Gonin/Gonnin de nouveautés parisiennes), le n° 6 (avec le Consulat de Prusse) et le n° 8 (avec la Ferme de Saint-Etienne, la boutique de fruits, légumes et fleurs d'Alphonse Karr et le Consulat de France) (AM 02FS 0914 - AM D345 - AM O 4/10-211 et 230 – Millie Bischoff, Guide des Étrangers à Nice, 1858-1859, 1859, Classification des rues pp 24-25).
C’est la Maison Laurencin la plus au nord qui offre, sur sa façade orientale, face au Jardin Public, tout à la fois l'entrée principale et l’enseigne de l'Hôtel des Anglais, positionnée sous les fenêtres du dernier niveau.
L’hôtel est précédé au sud d’un jardin dont l’entrée donne sur la Promenade des Anglais, juste à côté (à l'est) de la Maison Donaudy.
LE JARDIN DES PLANTES OU JARDIN PUBLIC
Le promoteur Gilly (originaire de Marseille) donne, vers 1833, le pré de la Fous situé à l'embouchure du Paillon, à la Ville, sous réserve qu'elle y aménage un jardin des Plantes et établisse tout autour des voies carrossables.
Le projet d'un jardin circulaire est dès lors envisagé par le Consiglio d'Ornato (AM, D34-136) mais reste en sommeil pendant près de vingt ans (William Farr, A Medical Guide to Nice, 1841 p 119).
Il est enfin réalisé en 1851-52, avec des allées bordées de bancs de pierre convergeant vers un bassin central.
Ce plan circulaire est délaissé en 1854 pour un plan triangulaire (terrain allongé au sud), le bassin conservant son emplacement originel (Plan de 1854-1855, AM, 1Fi 9-6 ; L'Avenir de Nice du 3 mars 1858 pp 1-2 ; Guide K. Baedeker, La Suisse, les lacs italiens, Milan, Turin, Gênes et Nice, 4° ed., 1859 p 335 ; Les Echos de Nice n° 7 du 14 novembre 1859 ; Edwin Lee, Nice et son climat, 1861 p 26).
- Plan partiel de la Ville de Nice, détail du Jardin public, 1854-1855,
Nice, Archives Municipales, 1Fi 9-6.
"Ce jardin lui-même qui ne date que de cinq ans à peine, voit croître de jour en jour les deux lignes de sycomores et de tilleuls qui bordent les allées du nord et de l'ouest. Au centre du jardin, douze ou treize poivriers déjà fort beaux, laissent tomber leur feuillage élégant comme celui du saule-pleureur autour du bassin dont le jet d'eau rafraîchit l'atmosphère.
Dans les allées qui rayonnent autour du bassin, des centaines de jeunes arbustes de tous les climats s'élèvent et promettent de fournir, dans quelques années, les ombrages les plus charmants" (Auguste Burnel, Nice, ouvrage rédigé en 1856, préfacé le 15 décembre 1856 et édité en janvier 1857 pp 34-35).
"La promenade des Anglais conduit au jardin public, dessiné en triangle et planté d’arbres de toutes les essences : oliviers, vernis du Japon, magnolias, bruyères arborescentes, althéas, palmiers, rosiers en fleurs, géraniums, etc., qui tous y réussissent à merveille. La musique de la garnison y joue deux fois la semaine [l'hiver, sauf en janvier]" (Le Constitutionnel du 8 avril 1858 pp 2-3).
En juin 1859, la Famille Tiranty offre à la Ville un magnifique palmier qui devient le plus bel ornement du Jardin (L'Avenir de Nice des 19 et 20 juin 1859). La transplantation ayant lieu peu après la victoire franco-sarde de Magenta (4 juin), il est proposé de donner ce nom au palmier mais c'est l'appellation de "Palmier de l'Annexion" qui sera retenue en 1860.
La figure sculptée d'une naïade est ajoutée à la fontaine (signalée en novembre 1859).
"Un autre spectacle, qui mérite à lui seul le voyage, c'est celui que le Jardin public et la promenade des Anglais offrent le dimanche : toutes les fortunes, toutes les nationalités, toutes les positions s'y condoient" (L'Avenir de Nice du 18 décembre 1859).
A la fin des années 1850, le long de la Promenade des Anglais, existent d’ouest en est : [le Vallon de Saint-Barthélemy], la Maison Gilly/Hôtel Victoria, la Villa Robiony [la ruelle du Lavoir], la Maison Villanova (Léonide de Villeneuve-Bargemont [1808-1886], fille du marquis de la Suze), la Villa Fernandez (ancienne Villa Regis), la Villa Claridge (aile ouest du Pavillon Pollan), le Pavillon Pollan (partie centrale et aile est), la Villa et la Maison Süe, [la ruelle de la Croix-de-Marbre], le Pavillon Gilly, le Pavillon Masclet, [la ruelle du Canal], la Maison Donaudy (en avant des autres propriétés) et l’Hôtel des Anglais (à l’angle du Jardin Public).