SOMMAIRE DES ARTICLES DU BLOG ET LIENS DIRECTS
DERNIÈRE MISE À JOUR DE CET ARTICLE : 21/11/2023
INTRODUCTION
De nombreuses collections publiques et privées, françaises et étrangères (dons, legs, achats) conservent des vues du XIX° siècle de Nice et de sa région. Ces vues ont circulé du fait de leur diffusion nationale et internationale mais également grâce aux achats des voyageurs sur place. Cela pose la question des lieux de vente et des réseaux de distribution de ces photographies.
Le but de cet article est d’étudier uniquement les réseaux de distribution locaux et d’en lister les revendeurs dont le nom, présent sur les vues ou cité dans les textes, est parfois interprété à tort comme celui d’un photographe.
L’étude va concerner la plupart des villes situées entre Cannes et Gênes mais se limiter au troisième quart du XIX° siècle. C’est un sujet rarement abordé en dehors des biographies individuelles des photographes car peu documenté et posant plus de questions qu’il n’en résout.
LES PHOTOGRAPHES
Les auteurs des vues sont des photographes-voyageurs qui traversent la région dans le cadre de parcours incluant la Provence et l’Italie mais aussi des hivernants réguliers et enfin des photographes qui possèdent un atelier dans la région. Les photographes de ces deux dernières catégories alternent souvent avec un autre atelier, situé à Paris, dans la région niçoise ou dans une ville de cure estivale.
Dès la période sarde, les photographes-voyageurs sont essentiellement des photographes-éditeurs français et parisiens. Au-delà de leur quête technique et artistique, ils développent une production industrielle de séries qu’ils diffusent à l’échelle nationale et internationale, tout en s’appuyant sur des relais de diffusion locaux.
Les photographes-hivernants fréquentent les villes de la région niçoise (parfois d’ailleurs pour leur santé ou celle de leurs proches), sans que l’on sache toujours s’ils disposent d’un atelier local ou effectuent l’ensemble de leurs tirages lors de leur retour. Ils sont souvent parisiens eux-aussi et apparaissent dans une posture intermédiaire entre celle des photographes-voyageurs de passage et les photographes titulaires d’un atelier local, et peuvent opter pour une diffusion locale ou nationale de leurs vues.
Les photographes titulaires d’ateliers locaux sont généralement tout à la fois paysagistes et portraitistes. Ils ne vendent-pas uniquement leurs vues et leurs portraits de célébrités dans leur atelier. Ils disposent de "montres", petites vitrines permettant d’exposer leurs tirages dans le quartier, et parfois d’une boutique qui est attenante à leur atelier ou, plus rarement, en est séparée.
Recherchent-ils un ou plusieurs commerçants d’une même ville afin de diffuser plus largement leurs vues ? Contactent-ils également des commerçants des villes voisines photographiées lors de leurs excursions ?
Cherchent-ils à obtenir un dépôt des photographies ou suscitent-ils des commandes ? Des contrats sont-ils signés entre photographes et commerçants, voire des contrats d’exclusivité ? Quelle peut-être la durée de ces accords ?
Les vues sont-elles livrées par dizaines, centaines ou milliers ? En quel nombre chacune des vues est-elle livrée ? Où s’effectue leur tirage et par qui ? Pendant combien de décennies la même vue fait-elle l’objet de nouveaux tirages ? A quel rythme, les vues d’un même site sont-elles renouvelées ?
Y a-t-il des grossistes servant d’intermédiaires qui s’occupent de la diffusion régionale, voire nationale de ces vues ?
LES COMMERÇANTS
Quels commerçants vendent ces photographies dans leurs vitrines et leurs rayons (expositions, vues, portraits de célébrités, albums) ? Diffusent-ils toute la production d’un même photographe sur tous supports et formats ? Acceptent-ils ses vues des autres villes de la région, voire ses vues hors région ? Vendent-ils les vues de plusieurs ou de tous les photographes paysagistes de la ville, voire de la région (une vingtaine dans la période étudiée) ?
Apposent-ils systématiquement leur nom ou celui de leur commerce sur les vues ? Leur nom est-il imprimé sur le carton ou inscrit dans le négatif ? Utilisent-ils une étiquette qui, masquant ou remplaçant parfois le nom du photographe, s’ajoute au carton de l’auteur ou est-ce aussi l’inverse ?
Ces commerces sont souvent :
- des librairies (livres, journaux, revues, estampes) qui vendent des photographies des sites régionaux mais également des livres sur la région qui contiennent des tirages albuminés ou, comme les journaux, leur reproduction par l’estampe, et font connaître leurs auteurs sur le plan national.
- des kiosques à journaux appartenant notamment à des libraires.
- des magasins de Beaux-Arts et d’Antiquités qui vendent parfois également les tableaux d’auteurs qui sont bien souvent, tout à la fois, peintres et photographes.
- des magasins de souvenirs et d’artisanat local, notamment de mosaïques et sculptures en bois de Nice.
- des bazars (nouveautés, articles de ménage, jouets).
- des boutiques d’opticien (lunettes, microscopes, appareils et lentilles photographiques).
- des pharmacies offrant des produits et accessoires pour la photographie.
- des hôtels qui organisent ponctuellement des expositions-ventes et tiennent des vues à disposition de leurs clients.
- des agences de location qui diffusent, sur place et par envoi postal, les photographies des villas et des hôtels.
Dans certaines villes, un seul commerce, librairie ou bazar, peut d’ailleurs cumuler les fonctions de librairie, de magasin de Beaux-Arts, de nouveautés et d’agence de location.
S’il est avéré que plusieurs commerçants d’une même ville proposent des photographies, peu d’entre eux sont mentionnés dans les articles de journaux, les publicités, les guides de voyage ou cités sur les photographies elles-mêmes.
La vérité doit se situer entre une vision de tous les paysagistes proposant leurs vues dans de très nombreux commerces, et celle de quelques paysagistes dans de rares commerces. Le nombre de points de vente est certes corrélé à la dimension de la ville mais également à la fréquentation des hivernants. L’attractivité, la réputation et l’emplacement de ces commerces peuvent être également des critères de choix pour les photographes.
Le nombre de vues offertes semble plus important dans un ou deux commerces seulement par ville et le nombre de photographes cités par ces commerces est semblable (de un à trois). Il faut d’ailleurs préciser que les commerçants diffusent tout aussi bien des vues de la ville réalisées par des photographes locaux, que par des photographes régionaux ou même nationaux. Il ne faut pas négliger pour autant les relations entre les photographes et les commerçants locaux qui reposent parfois sur des liens familiaux ou amicaux, notamment attestés par des actes d’état civil.