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mardi 3 mai 2022

1227-MANDAWA : LES PEINTURES MURALES DES HAVELIS

 

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- Image 1 : Mandawa, peinture d'une haveli montrant un chantier de construction.


A Mandawa (Rajasthan, Inde), plus d'une centaine de havelis (XVIII°-XX° s.) bordent les rues. Ces dernières, concentrées au sud de la rue principale et en particulier au sud-est, offrent au regard leur silhouette massive, magnifiée par leurs portes et fenêtres en bois sculpté (teck) et leurs fresques colorées.

Entre de hauts murs flanqués de moucharabiehs, une grande porte cochère accostée de deux petits pavillons de gardien (Image 2) conduit généralement à une cour d'entrée (Image 3). 


- Image 2 : porte cochère d'une haveli.


Là, une ou deux havelis (fratrie) accueillent le visiteur par une montée d'escalier qui mène à un portail orné (Image 3) puis à des cours intérieures (Image 4) réservées aux hommes puis aux femmes et enfin à un terrain destiné aux animaux.


Image 3 : Entrée d'une double haveli.


Les cours intérieures sont organisées autour d'un bassin de réception des eaux pluviales (Image 4) et leurs arcatures polylobées ouvrent sur des appartements d'angle souvent constitués de deux pièces (Image 5), accostées d'une cuisine et d'une salle d'eau. Les grandes tentes qui permettaient par le passé d'ombrager ces cours ont souvent cédé la place à des filets. Quelques végétaux agrémentent parfois l'ensemble.


- Image 4 : Cour intérieure d'une haveli.


Image 5 : pièce au rez-de-chaussée d'une haveli.


Les peintures s'épanouissent sur les différent niveaux, tant à l'extérieur (Images 2, 3 4, 6 et 7) qu'à l'intérieur (Image 5) recouvrant chaque mur, portail, support, niche et corniche (Images 6 et 7), mêlant subtilement motifs géométriques et végétaux et représentations figurées. 


- Image 6 : grande fresque murale sur l'un des murs extérieurs d'une haveli.



- Image 7 : corniche d'une haveli entièrement peinte, avec ses corbeaux de pierre. 


Certaines représentations architecturales viennent parfois compléter le décor par des effets de trompe-l'œil (moucharabiehs, arcs et colonnettes) (Images 8, 14, 15, 20 et 21).



- Image 8 : fausses architectures encadrant la baie d'une haveli.


Les figures, situées aussi bien au centre de cadres rectangulaires monumentaux (Images 6 et 20) que de petits médaillons (Images 12, 13 et 23), épousent parfois la forme même du support (ex: avant-corps d'éléphant sur une descente d'escalier de l'Image 9), pratique qui évoque l'art de la sculpture (art qui reste globalement absent des havelis).


- Image 9 : avant-corps peint d'éléphant, adapté à la surface de la rampe latérale de l'escalier.


C'est généralement une petite représentation du dieu Ganesh qui domine le portail mais des scènes historiées, religieuses et culturelles offrent notamment des scènes de la vie du dieu Krishna (à la peau bleue) et de la déesse Lakshmi (splendeur et fortune) mais aussi des défilés de caravanes, des scènes de guerre et d'amour, des portraits de maharadjas et de princes moghols.



- Image 10 : représentation du dieu Ganesh dominant l'archivolte du portail d'une haveli.



- Image 11 : danse avec le dieu Krishna ornant l'une des voussures du portail d'une haveli.



- Image 12 : médaillon peint d'une représentation du dieu Krishna, peut-être accompagné de son épouse Rukminî.



- Image 13 : portrait peint dans un médaillon.


Il existe également de nombreuses scènes de transport : à cheval (également symbole de force), à dos d'éléphant (également symbole de puissance et de bienvenue), à dos de chameau (également symbole d'amour), en carrosse, en bateau, à bicyclette, en train, et pour les peintures les plus tardives en voiture à moteur ou en avion. 



- Image 14 : chamelier et cheval.



Image 15 : navire et cycliste.

- Image 16 : détail des compartiments d'un train et de leurs voyageuses.



- Image 17 : représentation simplifiée d'un train.


Les styles, échelonnés sur trois siècles, peuvent être très divers, avec des aspects plus dessinés (formes cernées d'un trait de contour et réduites à quelques détails essentiels) (Image 19) ou, plus rarement, picturaux (ébauche de modelé dû à des dégradés de couleurs et d'ombres et détail plus abouti des corps, des vêtements et accessoires mais également des motifs végétaux) (Image 18). 


- Image 18 : danse avec le dieu Krishna ; noter le détail abouti des vêtements et les ombres créatrices de modelé sur les visages comme sur les fleurs.


Les décors restent généralement plans, constitués d'une couleur unique ou de deux bandes colorées (évoquant sol ou eau et ciel) (Image 12) mais il existe de beaux effets de masquage (forme cachant une partie du décor ou des figures et évoquant ainsi la notion d'espace profond) et de perspective transversale (décalage des formes permettant d'évoquer un grand nombre de figures par la multiplication d'un seul élément). Voir par exemple, le décalage des trompes d'éléphants (Image 19) ou même celui de l'avant des corps des soldats, sans réduction de taille (Image 20). 



- Image 19 : le dieu Krishna et son épouse voyageant en bateau avec leurs éléphants ; 
noter les trompes décalées permettant d'évoquer le nombre des animaux.



- Image 20 : grande fresque montrant l'armée allant au combat
 avec éléphants, chevaux et dromadaires :
noter les avant-corps décalés des soldats permettant d'en révéler le grand nombre.


Sur fond de brique (murs) ou de pierre (corbeaux) recouvert de plâtre puis de stuc (Image 21), les peintures à fresque (pigments déposés sur un enduit humide qui emprisonne les traits et couleurs au séchage) déploient leurs teintes de rouge et de bleu mais également de vert et d'ocre jaune (pigments naturels mais aussi pigments chimiques provenant d'Allemagne) ou plus rarement d'or (Images 10 et 18), parfois accostées de miroirs et de cabochons de mêmes couleurs (provenant de Belgique) (Image 10).



- Image 21 : soldat au fusil à baïonnette ; noter les couches inférieures de brique, d'argile, de plâtre et d'enduit.


A partir du début du XX° siècle, de nombreuses familles de marchands ont opté pour des demeures plus adaptées à la vie moderne ou ont quitté Mandawa pour s'installer dans de plus grandes villes. De nombreuses havelis se sont vues fermées (ou détruites) et les multiples et lointains héritiers ont parfois renoncé à leur entretien ou leur rénovation. 

Des initiatives locales ont cependant permis la formation d'équipes spécialisées et le développement du tourisme a incité au rachat puis à la transformation de certaines havelis en hôtels.

Les portes en teck ouvragé retrouvent leur aspect initial grâce à un mélange d'huile de sésame et de citron (beauté et protection). 

Les peintures en partie disparues ou effacées (surtout en extérieur) sont pour leur part complétées et restaurées avec des pigments sélectionnés. Le charme des peintures originales aux teintes estompées, comme celui du stuc vieilli et usé, reste cependant inégalable.

En effet, leur restauration amène parfois un aspect plus figé des formes et trop neuf des couleurs. En parallèle, des surfaces de murs se couvrent de nouvelles peintures, sans que la technique de la fresque ne soit toujours appliquée (Image 22).



- Image 22 : créateur de peintures murales au travail.



Une sélection de quelques havelis à visiter (photographies ci-dessus) :

- Chokhani Double Haveli
- Sneh(i) Ram Ladia Haveli
- Gulab Rai Ladia Haveli
- Mohan Lal Sarraf Haveli
- Jhunjhunu Wala Haveli
- Murmuria Haveli
- Tarkeshwar Goenka Haveli
- Seth Dayaram Dedraj Goenka Haveli 
- Binsidhar Newatia Haveli


- Image 23 : monstre hybride représenté entre deux corbeaux peints.

 


VOIR AUSSI

Voyager en Inde en 2022 (malgré la pandémie de COVID)

Mandawa (Rajasthan) : Chobdar Haveli