mercredi 27 décembre 2023

1328-NICE, HISTOIRE ET REPRÉSENTATIONS DE LA PLACE MASSÉNA-4


 SOMMAIRE DES ARTICLES DU BLOG ET LIENS DIRECTS



DERNIÈRE MISE À JOUR DE CET ARTICLE : 04/09/2024



NICE, HISTOIRE ET REPRÉSENTATIONS DE LA PLACE MASSÉNA



 LES ANNÉES 1870


17- DEGAND Eugène (1829-1911), Nice, Le quai Saint-Jean-Baptiste, fin 1871-début 1872, 
vue prise depuis le balcon du 1er étage de la maison Cauvin, située à l'angle du quai Masséna, 
vues stéréoscopiques, deux tirages albuminés de 7,3x7,9 cm contrecollées sur carton de 17,3x8,7 cm, 
Collection personnelle.



Sur l'image ci-dessus, à la jonction entre la place Masséna et le quai Saint-Jean-Baptiste, se remarque un kiosque à journaux octogonal de couleur claire, surmonté d'une toiture entourée de huit petites pancartes à l'extrémité triangulaire. Il a été installé à cet emplacement, en symétrie de celui du quai Masséna, en janvier 1870.

Le quai Saint-Jean-Baptiste a été entièrement rectifié de 1866 à 1868 (mur d'endiguement, voie, éclairage) mais n'a été planté des deux lignes de caroubiers et de poivriers en alternance qu'entre mars et avril 1870.

Tous les bâtiments alignés après la maison Tiranty et l'Hôtel Chauvain sont récents, érigés après la destruction des anciens bâtiments, irréguliers et insalubres, détruits entre mars et juillet 1866, comme (du sud au nord) l'Hôtel de la Paix (1868), la maison Bovis (1867) et le Grand Hôtel (1867). 

C'est à la même époque que le Pont-square Masséna a été édifié sur le Paillon (mars 1867-août 1868), face au Grand Hôtel, avec la réalisation de jardins (début 1869) et l'implantation centrale du Monument au Maréchal Masséna (inauguré le 15 août 1869).


18- DEGAND Eugène (1829-1911), Nice, La place et le quai Masséna, début 1872, 
vue prise depuis le balcon du 1er étage de la Maison Tiranty, située à l'angle du quai Saint-Jean-Baptiste, 
 tirage albuminé de 10,4x6,1 cm, sur carton de 11,4x7 cm, 
Collection personnelle.



Sur le quai Masséna (Image 18 ci-dessus), la barrière provisoire en bois servant de parapet a été remplacée (depuis octobre 1868) par un parapet en fonte, identique à celui de l'ensemble des quais.

Près du grand palmier dominé par un eucalyptus envahissant, un nouveau kiosque à journaux a été installé en 1869. De même forme octogonale que le précédent (1866-1869), il est également de couleur claire mais est désormais surmonté, comme celui du quai Saint-Jean-Baptiste, d'une toiture entourée de huit petites pancartes à l'extrémité triangulaire.


19- DEGAND Eugène (1829-1911), Nice, La place et le quai Masséna, début 1872,
détail de la vue précédente, 
vue prise depuis le balcon du 1er étage de la Maison Tiranty, située à l'angle du quai Saint-Jean-Baptiste, 
 tirage albuminé de 10,4x6,1 cm, sur carton de 11,4x7 cm, 
Collection personnelle.



Les arcades de la place Masséna (Image 19) révèlent les enseignes et les devantures des commerces proches de l'angle : 
- le "Tabac", tenu depuis le début des années 1860 par Angèle Piccoli/Pinoli, veuve Comba/Combe ; 
- la "F[abri]que de Guipures", installée depuis peu (fin 1871 ou début 1872) et tenue par le marchand de dentelles François Lupinari ; 
- et le "Bazar [National]", ouvert à la même époque, par Bonnaventure Rosset/Rousset.


20- DEGAND Eugène (1839-1911), Nice, la place Masséna, été 1872,
photographie extraite d'un album daté de 1877,
tirage albuminé de 21,8x14,7 cm sur carton de 22,5x35 cm, 
Collection personnelle.



Cette vue est-ouest (Image 20), prise depuis un point légèrement surélevé situé à droite de l'entrée orientale du pont, montre :

- le Pont-Neuf où s'accoudent ou traversent quelques personnes, avec ses trois arches de pierre et ses réverbères (situés au centre et aux extrémités), le lit du Paillon presque à sec auprès duquel sèche le linge puis, au bord de l'autre rive, les petites arcatures et la balustrade du quai (été 1866-automne 1867), un kiosque à journaux (installé en janvier 1870) et l'extrémité du quai Saint-Jean-Baptiste, rectifié (fin 1867) et planté de deux rangées d'arbustes (en mars-avril 1870),

- l'extrémité du quai Masséna (élargi au deuxième semestre 1863), planté pour sa part de palmiers (entre mars et mai 1864) et d'eucalyptus (au printemps 1866 dont le célèbre et grand eucalyptus d'angle dont on peut suivre la croissance sur les photographies et qui subsistera jusqu'en 1898), avec également le kiosque à journaux (installé en octobre 1866).

- la place Masséna (achevée en 1868), avec sur ses deux côtés, des files de voitures de place et d'omnibus et des passants (flou de mouvement),

- l'extrémité orientale de l'avenue bordée d'arbres (depuis mars-avril 1871) qui mène à la gare (avenue du Prince-Impérial dès la décision de sa création début 1861, avenue de la Gare dès novembre 1870, avenue de la Victoire dès novembre 1918 et actuelle avenue Jean Médecin, depuis octobre 1966),

- et enfin, sur la droite de l'image, au-dessus du toit de la maison Tiranty qui fait l'angle du quai Saint-Jean-Baptiste, une petite construction d'un étage et d'une travée, couverte d'un toit à une pente et précédée d'une terrasse bordée de plantes en pots, érigée depuis la fin de l'année 1870 ou le courant de l'année 1871.

Les façades des immeubles de la place Masséna affichent notamment (Image 21 ci-dessous) :

A l'extrémité nord du quai Masséna,

- au n° 1, "Pianos [Et Musique"] (enseigne à fond sombre placée au-dessous des fenêtres du 1er étage ; l'enseigne a été installée par Nicolas Zani dans les  années 1850 ; le magasin est depuis 1860 ou 1861, celui de Jean Baptiste Ferrara).

Au sud-est de la place Masséna (entre le quai Masséna et la rue Masséna - Image 20 ci-dessus) : 

- au n° 1, "Gastaud - English & American - Tailor" (enseigne à fond sombre placée au sommet du pilier d'angle, près du débit de tabac ; ce tailleur était encore signalé dans l'annuaire de 1871, rue de la Préfecture, 10 - à partir du 6 novembre 1872, il fera la publicité pour sa nouvelle adresse dans le Journal de Nice) - "Escoffier - Confiseur" (inscription sur l'un des piliers de la septième arcade ; Jean Escoffier, confiseur-pâtissier, s'installe à cet emplacement en 1863 et fait notamment une inscription fin 1869).

Au sud-ouest de la place Masséna (entre la rue Masséna et l'avenue menant à la gare - Image 20 ci-dessus) :

- au n° 8, "Grand Café De La Victoire - Salons" (trois tentures à fond clair du rez-de-chaussée ; vers 1861-63 - Image 21 ci-dessous),

"Ombry" (enseigne à fond sombre placée au-dessus des arcades, sous les baies du premier étage ; printemps 1872, par Louis Ombry) - "Café de la Victoire" (enseigne à fond sombre placée au-dessus des arcades ; vers 1870) - "Restaurant - Français" (enseigne à fond clair placée au-dessus des arcades ; vers 1861-63 ; il s'agit du restaurant de Ferdinand Augier, situé dans l'avenue de la Gare, 1). 

"American Dentist - E. Preterre From New-York" (enseigne à fond sombre placée sous les fenêtres du deuxième étage et accostée de deux petites inscriptions précisant notamment son adresse parisienne, "Boulevard des Italiens - 29" ; en 1865) - "Appnts Meublé (sic)" appartenant au Restaurant Français (enseigne à fond sombre placée sous les fenêtres du deuxième étage ; dès 1871, comme le confirment les publicités du Restaurant publiées dès novembre 1871 dans le Journal de Nice).


21- DEGAND Eugène (1839-1911), Nice, la place Masséna, été 1872,
détail de la vue précédente montrant la maison du Café de la Victoire,
photographie extraite d'un album de 1877,
tirage albuminé de 21,8x14,7 cm sur carton de 22,5x35 cm, 
Collection personnelle.


Au nord-ouest de la place Masséna (entre l'avenue menant à la gare et la rue Gioffredo - Image 20) : 

- aux n° 4 et 6 (?), inscription non lisible (à fond clair) sur le large pilier d'angle [peut-être, "Tordo & Cie - Camionnage", entreprise située rue Emmanuel-Philibert, 10] 

"Change" (enseigne à fond sombre placée sous les arcades, probablement par Jean Ruffard Fils, en 1872) - "Maison Contesso" (enseigne à fond sombre placée sous les arcades, généralement peu visible sur les photographies ; Louis Contesso, sellerie, articles de voyage, signalé place Masséna dès la seconde moitié des années 1850, fait notamment des demandes pour sa devanture en septembre 1865 et octobre 1866 et pour faire des inscriptions en janvier 1868 et au dernier trimestre 1869),

"Coiffeur" (enseigne à fond sombre placée au-dessus des arcades par le coiffeur Rovere en 1863 mais conservée jusqu'à l'installation du coiffeur Charles Lambert en 1871 ?).

Au nord-est de la place Masséna (entre la rue Gioffredo et le quai Saint-Jean-Baptiste - Image 20) :

- au n° 2 (puis 2 bis) (bâtiment occidental), enseigne de l'Hôtel Teisseire (hôtel et maison meublée avec restaurant, installée dans un premier temps au sommet de deux arcades, en août 1866, puis déplacée à ce nouvel emplacement vers 1871),

- au n° 2 (bâtiment central), enseigne non lisible (à fond sombre placée au-dessus des trois arcades centrales ; cette enseigne, lisible sur d'autres photographies contemporaines, affiche, "Au Bon Marché", dés 1869),

- au n° 2 (bâtiment oriental), "Maison - À La - Belle Jardinière - Nice" (inscriptions à fond clair portées au bas du large pilier d'angle, près de l'épicerie Clerissy mais pour deux magasins de vêtements pour hommes et enfants, respectivement situés rue Charles-Albert depuis 1863, et rue Saint-François-de-Paule depuis 1865).

Les éléments relevés ci-dessus impliquent au plus tôt la date de 1872. En effet, l'enseigne, "Change", présente sous les arcades du n° 6 renvoie au commerce de Jean Ruffard Fils, qui n'est cité à cette adresse qu'à partir de 1872 (annuaire de 1873). Il en va de même pour les enseignes du tailleur Gastaud placées au n° 1. Quant à l'enseigne, "Ombry", placée au n° 8, au-dessus du Café de la Victoire, elle implique le deuxième ou le troisième trimestre de l'année 1872.

"Quand on est allé à Nice, n'y eût-on passé que vingt-quatre heures, on connaît la place Masséna et le café de la Victoire qui en est un des plus beaux ornements. C'est un des cafés célèbres de l'univers ; tous les touristes venus des cinq parties du monde pour respirer les chaudes senteurs méditerranéennes se sont assis sous ses arcades.

La colonie stéphanoise qui se rend à Nice tous les hivers apprendra avec plaisir que cet établissement vient de passer entre les mains de l'un de nos compatriotes, M. Ombry" (Mémorial de la Loire et de la Haute-Loire du 10 septembre 1872). 

Louis Ombry, qui tenait précédemment un café à Saint-Etienne (Loire, place de l'Hôtel-de-Ville, 9), succède à la Veuve Delherbe/Delherba (1863-1866) et à E. Pipon (1866-1872), à la tête du Café de la Victoire, dès 1872 (Annuaire des Alpes-Maritimes de 1873). Son nom est cependant remplacé dès l'année suivante par celui de "Jambe" (annuaire et guide de 1874), avec ensuite la précision de "Jambes (sic) (Mme veuve)" (propriétaire ; annuaire de 1875).

La photographie étudiée pourrait donc être datée entre 1872 et 1877 (date de l'album) mais l'absence des réverbères, qui seront installés dès l'automne 1872 sur la place Masséna semble impliquer le milieu de l'année 1872 (Image 23 ci-dessous).


Liste contemporaine des professionnels et des habitants

La liste a été établie à partir de l'ouvrage de D. Boistier intitulé, Guide des Alpes-Maritimes et de la Principauté de Monaco, édité au printemps 1874 car c'est le seul ouvrage de la décennie qui présente tout à la fois une liste des personnes par ordre alphabétique, par profession mais également par adresse.

L'ensemble de 57 noms a cependant été vérifié et amendé grâce aux listes alphabétiques et/ou professionnelles des Annuaires des Alpes-Maritimes de 1872, 1873 et 1874 et à la liste par adresse du recensement de 1872. 

Ce recensement de 1872 est déconcertant au premier abord car il zigzague, notamment, entre les numéros pairs et impairs de la place. Il n'a pu être entièrement pris en compte car, contrairement au guide et aux annuaires cités qui offrent des listes incomplètes, il dresse une liste exhaustive qui atteint un total de 250 noms (tous les membres des familles et leurs employés).

Il faut rappeler que les adresses ont varié dans leur dénomination, du fait du nom de la place elle-même mais également de celui des rues voisines existantes (boulevart du Pont-Neuf/quai Masséna, route/rue de France/rue Masséna) et nouvellement créées (avenue du Prince-Impérial/avenue de la Gare ; rue Gioffredo). 

Tous les immeubles de la place étant situés à l'angle de deux voies, leurs habitants et commerçants peuvent être cités à l'une comme à l'autre adresse. La Maison Cauvin constitue ainsi le n°1 de la place Masséna et le n°1 du quai Masséna mais d'autres maisons d'angle affichent un numéro pair d'un côté et impair de l'autre

La numérotation de la place a été elle aussi changeante, du fait de nouvelles constructions (années 1850 et 1860), de nouvelles rues adjacentes (années 1860) et de nouvelles décisions municipales.

Les annuaires proposent soit la liste alphabétique des habitants, soit la liste alphabétique des professions, plus rarement les deux ensemble (mais avec certains noms cités dans une seule des deux listes) et très exceptionnellement la liste par voie et par numéro, et distinguent donc peu souvent l'adresse du domicile de l'adresse professionnelle.

Ces annuaires, censés rendre compte de l'existant et de son évolution, comportent de plus des erreurs (orthographe des noms), omettent ou maintiennent à tort un nom et citent alternativement les hommes comme les femmes avec ou sans leur prénom, et les femmes mariées ou veuves sous leur nom de jeune fille ou d'épouse. 

Il faut reconnaître qu'il y a un mouvement constant des habitants et des commerces, parfois d'ailleurs effectué au sein même de la place, et il est donc difficile d'interpréter un changement de numéro, d'une année sur l'autre (domicile, magasin, déménagement, nouvelle numérotation ?).

Ainsi, le sellier Louis Contesso est-il cité place Masséna dès le Guide des Etrangers à Nice de 1858-59, Maison Pin [au n° 3] puis au n° 1 dans l'annuaire de 1862, au n° 3 dans les annuaires de 1864 à 1871 et enfin au n° 6 (probablement la boutique) dans les listes professionnelles de 1873 et 1874 mais également au n° 1 (probablement le domicile) dans la liste alphabétique de l'annuaire de 1874.

Deuxième exemple : Jean Teisseire dirige un hôtel (pension et maison meublée) signalé place Masséna au n° 2 dans les annuaires de 1869 à 1871 (absent de celui de 1872) puis au n° 4 dans ceux de 1873 et 1874. A-t-il déménagé ou est-ce la numérotation de la place qui a été modifiée vers 1872 ?

Dernier exemple : François Praly/Prasly et Cie, qui tient le Bazar "Au Bon Marché", fait une demande pour une inscription place Masséna, 6, en avril 1868 puis pour une enseigne, en juillet 1868. Cette enseigne est d'ailleurs visible à ce même numéro, au-dessus des trois premières arcades du bâtiment nord-ouest de la place, sur une photographie datée de la même année. 

Dans les annuaires, Praly est ensuite cité place Masséna mais sans précision de numéro en 1870 et 1871, au n° 8 en 1872, aux n° 4 et 8 en 1873, aux n° 4, 8 et 2 en 1874, aux n° 4 et n° 2 en 1875 puis au seul n° 2 à partir de 1877 (annuaires de 1876 et 1878 non conservés). Son enseigne est d'ailleurs visible, au-dessus de trois des arcades du bâtiment situé au centre du côté nord (n° 2), sur deux photographies datées vers 1872-1873 (dont la vue étudiée). 

Son magasin de nouveautés a donc déménagé en 1869 du n° 6 au n°2, situé au centre du côté nord, où son enseigne "Au Bon Marché" est désormais perceptible au-dessus des arcades (Image 20 ci-dessus). Les autres adresses peuvent être, pour l'une, l'indice d'une nouvelle numérotation du bazar (n° 6 devenu le n° 4 ?), voire de la possession, pendant une période de transition, des deux magasins (n° 4 et n° 2 ?) et, pour l'autre, l'adresse de son domicile (n° 8 ?).

Il a été particulièrement difficile d'identifier l'emplacement de la maison désignée sous le n° 4 puis 4 bis de la place et de la distinguer de celle du n° 6, toutes deux formant l'angle nord-ouest de la place. 

Ce problème a pu être résolu grâce à un article paru dans Le Petit Journal du 27 avril 1870 qui situe l'adresse du Dr Lubanski, cette dernière étant parallèlement signalée dans les annuaires de 1870 à 1874 au n° 4 mais dans le guide de 1874 au n° 4 bis : 

"En traversant la place Masséna, sous les arcades, au rez-de-chaussée du cercle Masséna, entre un café [Café Phocéen de Marguerite Dumon veuve Pel(l)icot] et un bureau de tabac [Tabac de Philippe Lautié/Lautier], s'ouvre une porte. A gauche, dans l'encadrement de cette porte, sur une plaque de cuivre en saillie, on lit ces deux mots : Docteur Lubanski" [qui habite au 1er étage].

À l'inverse, il a été difficile de deviner le ou les numéros affectés aux deux derniers bâtiments érigés sur le côté nord-est de la place, en 1864-65 (bâtiment le plus occidental) et 1867-68 (bâtiment central). 

Il semble qu'ils aient tout d'abord hérité ensemble du n° 2, attribué à la maison située à l'angle du quai Saint-Jean-Baptiste (érigée en 1844-45) puis qu'ils aient reçu ensuite, vers 1872, un numéro séparé, le bâtiment occidental recevant le n° 2 bis (Hôtel Teisseire) et le bâtiment central (Au Bon Marché) conservant le n° 2, comme le bâtiment oriental (Epicerie Clérissy).

La liste ci-dessous est présentée selon le même ordre que celui adopté pour décrire la photographie (dans le sens des aiguilles d'une montre - Image 20).


22- DEGAND Eugène (1839-1911), Nice, la place Masséna, été 1872,
avec indication de la numérotation indiquée dans le
 Guide des Alpes-Maritimes et de la Principauté de Monaco, édité au printemps 1874,
photographie extraite d'un album de 1877,
tirage albuminé de 21,8x14,7 cm sur carton de 22,5x35 cm, 
Collection personnelle.

Le bâtiment qui affiche le n° 1 de la place Masséna a été construit vers 1840-41, le n° 3 vers 1841-43, 
les n° 8, 6 et 4 bis vers 1858-61, le n° 2 bis (occidental) vers 1864-65, le n° 2 (central) vers 1867-68 
et le n° 2 (oriental) vers 1844-45.



QUAI MASSÉNA (extrémité du quai, située près de l'angle de la place Masséna)

- n°1 : Lozano (A.), maroquinerie [ce nom est absent des annuaires de 1872 à 1874] - Ferrara [Jean], marchand de musique [et pianos] - Tori (Mme veuve), successeur de Gent, denrées coloniales - Auda, fourrures et maroquinerie [l'adresse véritable d'Antoine Auda, également chapelier, est rue Masséna, 1]. 

PLACE MASSÉNA (côté sud-est, entre le quai Masséna et la rue Masséna) :

- n°1 (bâtiment oriental) : Mme Veuve Comba, débit de tabacs [Combe Angèle dans le recensement de 1872, place Masséna, 1 ou Pinoli, veuve Comba, quai Masséna, 1 dans les annuaires de 1872, 1873 et 1874] - Lupinari (F.) [François], marchand de dentelles [installé là en 1872, avec sur sa devanture, "Fabrique de Guipures"] - Nicolet, charcutier - Escoffier (Jean), confiseur-pâtissier - Andraud (A.), changeur - Rosset, bazar national [Rosset Bonnaventure, opticien dans le recensement de 1872] - 

Gastaud, English & American Tailor, 1er étage [installé là en 1872 et signalé également quai Masséna, 1 dans l'annuaire de 1873] - Simon, chez M. Gastaud - 

Montanari [Léopold], docteur homoeopathique (sic), 2ème étage - Hall, docteur-dentiste, 2ème étage - 

Gilly (A.), 3ème étage [domicile de Gilly André, horloger] - Trèves (Mme veuve), 3ème étage [Trèves Rosalie, rentière dans le recensement de 1872 et Trèves (Mlles), rentières, dans l'annuaire de 1874] - Saint-Yon (de), rentier, 3ème étage - 

Cauvin, rentier (4ème étage) [propriétaire de l'immeuble] - Paris, 4ème étage - Lacurial [Mathieu, huissier], employé à la Préfecture, 4ème étage - Guigue (Mlles), couturières, 4ème étage - 

- n° 3 (bâtiment occidental) : Barralis (J.) [Joseph], café Masséna [et domicile] - Lévy Simon, marchand-tailleur - Franquin (Th.), fruitière - 

Comba (Mme veuve) [née Pinoli], 1er étage [domicile] - Maison de commission de Mont-de-Piété, à l'entresol - 

Alsace et Lorraine, bureau tous les jours de 10h à 11 h, 1er étage - Bottau (Mme), garde-malade, 1er étage [Bouttau Nicolas, propriétaire dans le recensement de 1872] - Ruffard (Jean), négociant, 1er étage [dit Ruffard Joseph, négociant, dans le recensement de 1872] - 

Feraud (G.), avocat, 2ème étage - Fiandrotti (Mme), 2ème étage - Pin (Mme), propriétaire, 2ème étage [Guarducci, veuve Pin, Rose, dans le recensement de 1872] - 

Tenstapper Johannes Petrus (von Toff), graveur, 4ème étage [absent de l'annuaire de 1872 puis signalé sous le nom de Tenstapper-Vantopp ou de Tenstopper (sic) au n° 3 ou au n° 1 dans les annuaires de 1873 et 1874].

PLACE MASSÉNA (côté sud-ouest, entre la rue Masséna et l'avenue de la Gare) :

- n° 8 : Jambe, café de la Victoire [cité également avenue de la Gare, 1 ; Jambes (sic), dans l'annuaire de 1874 mais Ombry Louis, dans l'annuaire de 1873] - 

Yacht-Club de Nice, Félix Conte, directeur, 1er étage - 

Preterre [Eugène], chirurgien-dentiste Américain, 2ème étage - 

Simoise (Mlle), rentière, 3ème étage - Sabatier, architecte, 3ème étage [rue Longchamp, 40 dans les annuaires de 1873 et 1874] -

[Tiranty, Camille et François, propriétaires dans les annuaires de 1872, 1873 et 1874, François étant le seul cité dans le recensement de 1872].

AVENUE DE LA GARE (entrée de l'avenue, à l'ouest de la place Masséna) :

- n° 1 (côté sud) : Jambe, propriétaire du café de la Victoire [cité également place Masséna, 8] - Augier (F.) [Ferdinand], restaurant français -

Martinetti, rentier, 2ème étage - Brun, employé, 4ème étage -

- n° 2 (côté nord) : Ruffard [Jean Fils] et Cie, banque et change - Gardon (J.B.), marchand-tailleur [également cité place Masséna, 6] -

Cercle Masséna.

PLACE MASSÉNA (côté nord-ouest, entre l'avenue de la Gare et la rue Gioffredo) :

- n° 6 (le bâtiment faisant l'angle de l'avenue de la Gare) : Contesso (L.), articles de voyage [absent du recensement et de l'annuaire de 1872 mais signalé au n° 6 (boutique ?) dans les listes professionnelles des annuaires de 1873 mais également au n° 1 (domicile ?), dans la liste alphabétique de l'annuaire de 1874] -

Gardon [Jean Baptiste], tailleur, 1er étage [également cité avenue de la Gare, 2] - Bouffard (Mme), 4ème étage.

- n° 4 bis (le bâtiment nord qui s'enfonce dans la rue Gioffredo et est situé dans l'angle de la rue Saint-Michel) : Pelicot (Mme), café Phocéen [ou Dumon, veuve Pellicot (sic), Marguerite dans le recensement de 1872 ; citée également Pelicot (Mme) au n° 4 dans les listes alphabétiques des annuaires de 1873 et 1874 et au même numéro 4 sous le nom de Damun (sic) Marguerite, café Phocéen, dans les listes professionnelles des mêmes annuaires] - Lautié [ou Lautier Philippe], bureau de tabac [cité au n° 4 dans les listes professionnelles des annuaires de 1873 et 1874 mais au n° 6 dans les listes alphabétiques des mêmes annuaires] - Lambert [Charles], coiffeur - 

Serene (Mlle), blanchisseuse, 1er étage - Lubansky [Alexandre], docteur 1er étage - 

Rostan (M.), 2ème étage [cité place Masséna sans précision de numéro dans l'annuaire de 1872 puis au n° 6 dans les annuaires de 1873 et 1874 et dit Roustan (sic) Mathieu, cafetier [où ?] dans le recensement de 1872] - 

Pin [Frères ?], 3ème étage - Cozalet (Mme), 3ème étage - 

Trave[s], père et fils, professeurs de musique, 4ème étage [Trave, signalé chef d'orchestre aux Folies Niçoises dans l'annuaire de 1874].

PLACE MASSÉNA (côté nord-est, entre la rue Gioffredo et le quai Saint-Jean-Baptiste) :

- n° 2 bis [le bâtiment occidental] : Teisseire, hôtel et maison meublée [Teisseire Jean, maître d'hôtel cité dans le recensement de 1872 mais également dans les annuaires d'abord au n° 2 (1872) puis au n° 4 (1873 et 1874)] - Platel, restaurant de la maison Teisseire [futur Hôtel Platel au même emplacement].

- n° 2 [le bâtiment central suivi du bâtiment oriental] : Praly, bazar du bon marché [Prasly est signalé dans les annuaires au n° 8 en 1872, aux n° 4 et 8 en 1873 et aux n° 4, 8 et 2 en 1874] - Musso (Mme), Aux Mille fleurs, spécialité de bouquets [elle est uniquement citée cette année-là et dans ce seul guide] - Clerissi [ou Clerissy dans les annuaires et le recensement] (Mlle), épicerie et coloniaux [dite Adélaïde dans le recensement de 1872 et Aglaée dans les annuaires] 

Arabin (Mme), rentière, à l'entresol - Tiranty (Félix), propriétaire, au 2ème étage - 

Pellegrin (Mlle R.) [Rose], tailleuse, 4ème étage - 

Lattès [Frédéric], 5ème étage [agent d'affaires].

QUAI SAINT-JEAN-BAPTISTE (à l'angle nord-est de la place Masséna)

- n° 17 (mais n° 55 dans les annuaires de 1872 à 1874 - dans les deux cas, beaucoup de commerces sont cités sous le même numéro que l'Hôtel Chauvain ; un seul commerce cependant semble situé dans la maison d'angle) - Lattès, (F.), agent de location [Lattès Frédéric, également cité place Masséna, 2 au 5ème étage].

REMARQUES : On peut constater que certaines professions ne sont pas ou peu représentées sur la place Masséna en 1874 mais plus largement entre 1845 et 1875, notamment celles de pharmacien, de libraire ou de photographe mais il faut préciser que ces professions sont très présentes dans les rues environnantes.

Au cours des années 1860 et 1870, sont signalés place Masséna et/ou avenue de la Gare :

- le "Cercle Masséna", place Masséna, puis avenue du Prince-Impérial, 4 et avenue de la Gare, 2. 

-le "Cercle des Alpes-Maritimes", place Masséna, 8 puis le "Cercle d'Europe", place Masséna, 8 puis 7, et enfin, le "Cercle de l'Athénée", place Masséna, 5.

- le "Café de la Victoire", place Masséna, 8 (dès 1862-63 - puis dès 1878, place Masséna, 5 et avenue de la Gare, 1).

- le Café Masséna, place Masséna, 3 (de 1863 à 1875 ou 1876).

- le "Café des Alpes-Maritimes", place Masséna, 6 (de 1863 à 1866). 

- le "Café Phocéen", place Masséna, 4 puis 4 bis (de 1870 à 1877 ou 1878 - puis "Café des Phocéens, place Masséna, 6", dans les années 1880).

Le "Café d'Angleterre" est pour sa part signalé en 1847, "place du pont-neuf, sous les arcades" ; il est probablement situé dans la maison qui fait l'angle du futur quai Saint-Jean-Baptiste, proche de l'Hôtel d'Angleterre.


23- NEURDEIN Étienne (1832-1918), La place Masséna, détail, novembre ou décembre 1872,
vue panoramique est-ouest, prise depuis la place Charles-Albert,
tirage albuminé de 28,5x10,8 cm, sur carton de 42,3x25,4 cm,
 Collection personnelle.




Si le kiosque de quai Masséna apparaît présent et inchangé sur la vue ci-dessus, celui du quai Saint-Jean-Baptiste, repeint de couleur sombre en 1871 (comme en témoigne une autre photographie) est désormais absent. 

Sur la place Masséna, aux lanternes des piliers des bâtiments d’angle, viennent de s’ajouter deux réverbères situés près des bâtiments sud et nord, installés entre le 6 novembre et le 12 décembre 1872 (Journal de Nice des 9 novembre et 12 décembre 1872).




ÉPILOGUE


La photographie ci-dessous peut être datée entre fin 1880 et début 1881. L'écart est grand entre les images précédentes et celle-ci mais peu de photographies montrant l'intérieur de la place Masséna sont connues entre 1872 et 1880 (Collections privées).


24- DE BRAY Jean Walburg (1839-1901), La place Masséna, fin 1880 ou début 1881,
vue panoramique est-ouest, prise depuis la place Charles-Albert,
tirage albuminé, Paris, BnF (Gallica).




Sur l'image, les kiosques à journaux de la place Masséna ont été changés. Celui qui est proche du quai Masséna a été remplacé, vers 1873, par un kiosque de plan circulaire couvert d'un toit en forme de dôme, et le palmier qui l'accostait encore en 1872 (Image 18), semble avoir disparu.

Le kiosque proche du quai Saint-Jean-Baptiste (absent de l'Image 23) a pour sa part été remplacé, fin 1873 ou courant 1874, par un kiosque octogonal de couleur claire, coiffé d'un toit conique (il sera à nouveau remplacé, en 1881, par un kiosque semblable au dernier modèle du quai Masséna).

À l'extrémité droite de l'image, sur la façade de la maison Tiranty donnant sur le quai Saint-Jean-Baptiste, un grand balcon central a été étonnamment ajouté (dissymétrie en rapport à l'ancien Plan Régulateur), fin 1873 ou début 1874, sous les cinq fenêtres centrales du deuxième étage.

Sur la place Masséna, les réverbères installés fin 1872, à proximité des bâtiments nord et sud, ont été remplacés au milieu de l'année 1878 par quatre grands candélabres à cinq lampes, positionnés sur quatre refuges pour piétons proches du centre du quadrilatère.

Sur le bâtiment du Café de la Victoire, l'enseigne du dentiste Preterre, préalablement située sous trois fenêtres du deuxième étage, a été remplacée, fin 1872 à ce même endroit, par une pancarte semblable mais plus courte (sous deux des fenêtres), portant seulement, "Preterre - American Dentist". Elle a été enlevée en 1873 puis repositionnée ensuite au-dessus des arcades.

La petite enseigne "Ombry" a pour sa part été remplacée, à la même époque, par une enseigne semblable à fond sombre affichant "Glacier". Elle présente désormais un aspect délavé, comme celle du "Café de la Victoire". 

Enfin, la petite enseigne à fond clair proche de l'angle de l'avenue de la Gare, qui affichait "Restaurant Français", a été enlevée et remplacée, entre 1875 et 1880, par une grande et longue enseigne affichant le même texte sur fond sombre, positionnée cette fois sous les fenêtres du deuxième étage (à l'ancien emplacement des enseignes qui faisaient référence au dentiste Preterre et aux appartements meublés ; comparer avec l'Image 23).

A l'entrée nord-est du Pont-Neuf, côté place Charles-Albert (Image 24), se remarquent des tas de moellons destinés à la construction sur le Paillon du Casino Lazard ou Casino Municipal. Ce projet de création de Casino et de couverture du Paillon jusqu'à la mer a été examiné par le Conseil municipal dès juillet 1879. 

Suite à la validation préfectorale du projet définitif le 31 juillet 1880, les travaux débuteront en mars 1881. Ils consisteront, dans un premier temps, à voûter le Paillon au nord du Pont-Neuf sur une surface allant jusqu'à la hauteur de la rue Chauvain puis d'y construire le Casino et son jardin d'hiver. 

Parallèlement, le Pont-Neuf sera démoli et englobé dans une esplanade sud qui arrivera jusqu'à la hauteur du grand eucalyptus du quai Masséna et réunira la place Masséna et la place Charles-Albert.
 
Cependant, du fait de problèmes financiers, l'esplanade ne sera achevée qu'en novembre 1883 et le Casino, qu'en janvier 1884. 

La couverture du Paillon allant de l'esplanade à la mer ne sera, pour sa part, réalisée que près de dix ans plus tard (1892-1893) et offrira ensuite la création de nouveaux jardins, unissant ceux du Jardin public et du square des Phocéens (1894).