jeudi 11 juin 2015

372-NOUVELLE FICHE DE SYNTHÈSE SUR LE VOCABULAIRE DE LA SCULPTURE TRADITIONNELLE ET CONTEMPORAINE





I LE VOCABULAIRE DE LA SCULPTURE TRADITIONNELLE


1-TECHNIQUES 

De l’Antiquité aux premières années du  XX° siècle, la sculpture a été dominée par trois techniques principales :

Le modelage : ajout et retrait de matière molle, terre (argile), plâtre ou cire, sur une structure le plus souvent métallique ; certaines œuvres en terre peuvent être cuites pour être conservées.
Le modelage sert souvent au sculpteur à rechercher et définir (esquisse de petites dimensions) le projet de son œuvre définitive (de plus grandes dimensions et en matériaux nobles et durables).

Le moulage suivi de la fonte : réalisation de modelages successifs jusqu’au modèle aux dimensions définitives qui est ensuite moulé ;  dans le moule réalisé au noyau plein, du métal  fondu  est coulé pour finaliser la sculpture (très lourde mais creuse) en bronze (alliage de cuivre et d’étain). D’autres métaux peuvent être utilisés comme l’or, l’argent… La fonte est une technique délicate et coûteuse.

Des plaques, notamment d’or (accessoires) et d’ivoire (chair) peuvent également recouvrir une âme de bois (armature) pour constituer une statue chryséléphantine.

La taille directe : retrait de matière dure d’un bloc (ou de parties assemblées) de pierre (souvent du marbre – burin et ciseau), mais aussi de bois (maillet et gouges), et pour des sculptures de plus petites dimensions, d’os ou d’ivoire.



2-FORMES
 

La sculpture traditionnelle a revêtu deux formes principales :

La ronde-bosse : sculpture dont on peut faire le tour et qui repose sur un socle de matériau identique ; elle est cependant le plus souvent destinée à être surélevée par un piédestal ou à être vue de face (vue frontale), du fait de son positionnement devant un mur ou dans une niche.

Le relief : formes se détachant sur un fond (généralement du même matériau) ; le relief est le plus souvent destiné à être intégré dans le mur d’un monument. Différents niveaux de relief peuvent exister dans une même œuvre : certaines formes peuvent être seulement gravées (détails en creux, contours détourés), sculptées en méplat (faible relief), en bas-relief (moins de 50% de la forme), en haut-relief (environ 75% de la forme) ou en très haut-relief (parties détachées du fond – voire en ronde-bosse - et plus fragiles).



3-GÉNÉRALITÉS

Les sculptures (reliefs et rondes bosses) sont le plus souvent lissées (pour effacer les traces d’outils ou de moulage), colorées (peintes, vernies  ou patinées et parfois recouvertes de feuilles d’or), et complétées par des détails peints ou collés (incrustations d’éléments métalliques, de pierres semi-précieuses, d’émaux, de coquillages pour les yeux, sourcils, lèvres, dents et mamelons) et des accessoires (bijoux, emblèmes, armes, vêtements).

Les œuvres (comme en peinture) peuvent être de très petites dimensions (ex. : statuettes de 10 cm de hauteur) ou de très grandes dimensions (ex. : sculptures monumentales de 20 m de haut, parfois adossées à un monument ou taillées dans la falaise). Une sculpture de grande taille ou bien destinée à être surélevée par un piédestal  de plusieurs mètres subit, dès sa conception, des déformations nécessaires à la vision en contre-plongée du spectateur.

Les grands thèmes traditionnels sculptés sont surtout des représentations de la figure humaine, avec des scènes historiques (divinités, grands hommes et anonymes), des portraits d’apparat (équestres ou en pied), des figures sacrées et des scènes religieuses et mythologiques, des allégories, des nus, des scènes de genre mais également des figures animales (seules ou en groupe avec des figures humaines) et même des natures mortes (notamment les trophées militaires ou les pots à feu). Enfin le paysage est souvent présent dans les reliefs et évoqué dans les rondes-bosses par quelques éléments de décor (sol, eau, rocher, arbre, mobilier, éléments d’architecture).

Dans le cas de représentations humaines, la figure peut être en pied (corps entier), en buste (tête et poitrine sans les bras) ou à mi-corps (jusqu’à la taille, avec ou sans les bras). La ou les lourdes statues (groupe) se tiennent debout (« stare ») et conservent leur équilibre du fait de leurs appuis sur un accessoire (drapé du vêtement, vase) ou un élément de décor (pile, arbre).





II LE VOCABULAIRE DE LA SCULPTURE CONTEMPORAINE



1-INTRODUCTION

Contrairement aux siècles précédents, le terme de « sculpture » appliqué à l’art des XX° et XXI° siècles, ne désigne plus désormais uniquement « l’ajout ou le retrait de matière » mais prend un sens plus large. Tout ce qui est en volume ou dans l’espace (prenant en compte le lieu et/ou le spectateur) est considéré comme appartenant au domaine de la sculpture.

Se perpétuent aux XX° et XXI° siècles :

-les trois techniques traditionnelles, modelage, moulage suivi de la fonte et taille directe,

-les formes de la ronde-bosse et du relief,

-les petites dimensions et les dimensions monumentales des œuvres,

-les grands genres (thèmes figuratifs).

Cependant, à partir des années 1910-1920 (rupture consommée par des artistes comme Pablo Picasso, Marcel Duchamp, Kurt Schwitters ou Constantin Brancusi), les artistes :

-développent parallèlement  d’autres techniques, formes et genres,

-remettent en question la notion de socle et de piédestal,

-reviennent à la couleur (mise en sommeil depuis la Renaissance),

-dépassent l’usage de matériaux nobles et intègrent tous matériaux, objets et choses existants dans leurs œuvres,

-décrètent que tout est art : le monde et la chose, l'objet, l'architecture et la vie quotidienne, le lieu et l'espace, le corps et le geste ; c'est le regard et le choix de l'artiste qui déterminent ce qui est art, même si les éléments n'ont pas été façonnés par lui,

-se détournent de la représentation et de l’imitation du réel pour la présentation (matériaux, espace, rôle du spectateur),

-donnent parfois une part prédominante à l’idée et au concept sur la réalisation même,

-mixent tous les arts (dessin, peinture, sculpture, design, architecture, scénographie, théâtre, danse, sport, musique et chant, photographie, cinéma, B.D., infographie), artisanats et techniques industrielles,

-et ouvrent la voie abstraite.



2-NOUVELLES FORMES ET TECHNIQUES

-Le tableau-relief : œuvre accrochée au mur comme un tableau rectangulaire et contenant des parties peintes ou des collages mais aussi des éléments en relief qui émergent du fond ou sortent du tableau.

-L’assemblage : sculpture constituée d’éléments divers (matériaux, objets, choses) réunis par des techniques variées (superposition, entassement, accumulation, collage, agrafage, liens, couture, soudure…).

-L’installation : combinaison d’éléments divers, réunis (par assemblage) ou dispersés, prenant en compte l’espace périphérique (sol, mur, plafond) mais ne constituant qu’une seule œuvre.
L’installation est dite in situ quand elle est réalisée pour et en fonction d’un lieu précis et unique.
L’installation forme un environnement lorsqu’elle reconstitue un lieu (fermé ou ouvert) dans lequel évolue le spectateur.
L’installation est dite éphémère lorsqu’elle ne dure pas dans le temps (installation démontée ou utilisation de matières fragiles ou périssables), comme certaines installations in situ et comme de nombreuses œuvres de Land Art (art utilisant le paysage naturel ou urbain comme support ou matériau) et dont la trace est souvent conservée par la photographie ou la vidéo.
L’installation ou l’environnement peuvent présenter des œuvres légères, dispersées, colorées, transparentes,  invisibles, éphémères, voire immatérielles (l’espace, le vide, l'air, l’ombre, la projection multimédia, le son).

-La performance : mise en scène du corps vivant de l’artiste et/ou de ses assistants, avec ou sans public (happening, évènement, action). La performance peut être unique ou se répéter dans le temps mais elle est éphémère et le plus souvent conservée par des traces photos ou vidéos réalisées par l’artiste et/ou ses assistants.



3-MATÉRIAUX  

-Toutes les matières existantes sont utilisées, de même que leurs mélanges : matériaux nobles (marbre, bronze, or…), matériaux pauvres (carton, tissu, verre, déchets…), matériaux nouveaux (béton, plastique, polycarbonate…), objets artisanaux ou industriels, neufs ou recyclés (présentés, détournés, détruits), nourriture, choses (minéraux, végétaux, eau, air), moteurs, machines, systèmes mécaniques, électriques, électromagnétiques et informatiques.

-Les sculptures peuvent intégrer des : écritures,  images fixes et mobiles, mouvements représentés et mouvements réels (déplacement des formes dans l’espace et le temps, art cinétique), sons (vibrations, bruits, voix, musiques), lumières (naturelles ou artificielles, étalement dans l’espace des lumières et des ombres, projection multimédia), jeux d’eau, odeurs (naturelles ou artificielles), phénomènes naturels (lumière solaire, force du vent ou de l’eau, pluie, éclairs, brume), hasard, corps humain ou animal vivant ou mort…



4-ESPACE ET LIEU

La sculpture peut  :
-mettre en évidence le lieu, l'espace, l'architecture, exposer le vide,

-reposer ou non sur un socle ou un piédestal, être directement sur le sol, le mur, le plafond, la terre ou l’eau, être en plein centre-ville ou en plein désert, être dans un lieu muséal, un espace privé ou public,

-jouer sur l’échelle (rapport au corps humain et au lieu).



5-SPECTATEUR

La sculpture, au-delà des aspects, visuel, esthétique, religieux et politique, peut donner un rôle au spectateur :

-l’installation et l’environnement jouent souvent en effet sur l’implication du spectateur (ou regardeur) : le spectateur devient une composante de l’œuvre ou même l’élément principal d’une œuvre participative, interactive ou ludique, et tous ses sens sont sollicités (le sensible, l’expérience sensorielle),

-il adopte un point de vue, une posture, il sent l’œuvre, l’écoute, la parcourt, la touche, la manipule, la construit, la déplace, la met en mouvement, la modifie ou même la détruit, voire en emporte un fragment,

-l’œuvre joue également sur les états psychologiques du spectateur (jeu, humour, surprise, excitation, joie, sérénité, malaise, peur).