samedi 24 septembre 2011

32-LES RÈGLES DE LA PERSPECTIVE



L’utilisation des règles de la perspective permet de donner l’illusion de la profondeur (3D) sur une surface en deux dimensions (2D). Ces règles permettent de donner plus de réalité à des éléments représentés : figures humaines et animales, objets et choses, intérieurs, paysages urbains et naturels.



La perspective géométrique (ou linéaire): premier Traité de l’architecte Vitruve (Rome, Ier siècle av JC) mais ce n’est qu’au XV° siècle, en Italie, que la perspective resurgit en tant que méthode de dessin rigoureuse. Les architectes Brunelleschi (vers 1425) et Alberti (1435) puis le mathématicien et peintre Piero della Francesca (milieu du XV° s.) en théorisent les principes. La perspective (mot latin signifiant : « vision traversante») suppose un œil unique dont le regard traverse le plan du tableau comme une vitre ; le tableau devient une fenêtre ouverte sur le monde : "Pour commencer sur la surface à peindre, je dessine un rectangle, aux dimensions de mon choix, que je considère comme une fenêtre ouverte par où je regarderai la scène" (ALBERTI, De Pittura, 1435). 

Sur la plaque de verre, c'est le réel lui-même qui vient s'inscrire pour l'oeil situé au sommet de la pyramide visuelle. "La base de la pyramide est la partie que perçoit la vue ; ses côtés sont ces rayons visuels que nous avons nommés extrêmes. Quant à la pointe, elle s'arrête dans l'oeil au point même où les angles des quantités se réunissent" (ALBERTI, De Pittura, 1435).


La perspective géométrique est une méthode de projection qui définit un point de vue (celui du peintre), des points de distance (les distances sont converties en angles) et des points de fuite (vers lesquelles convergent les droites parallèles entre elles).
Dans la perspective, la hauteur de la ligne d’horizon correspond au point de vue du peintre (vue frontale, vue plongeante ou en contre-plongée). Les lignes parallèles perpendiculaires au plan du tableau, semblent vouloir se rejoindre sur la ligne d’horizon, à un point de contact virtuel dénommé le point de fuite.


 HOBBEMA Meindert (1638-1709), L'Allée de Middelharnis, 1689,
 huile sur toile, 104x141 cm, Londres, National Gallery.




Le raccourci : la longueur d’un élément (souvent perpendiculaire au plan du tableau ou en vision plongeante) est comprimée pour signifier un point de vue particulier et donner un effet 3D.

Le placement dans l‘image : les éléments en haut de l’image apparaissent plus lointains alors que les éléments en bas de l’image apparaissent plus proches.

Le masquage ou chevauchement : les éléments sont placés les uns devant les autres ; les objets « en avant » des autres apparaissent plus proches et ceux « en arrière » et cachés en partie par les précédents, plus lointains.

La taille relative : dans un ensemble d’éléments semblables, les plus grands apparaissent plus proches que les plus petits.

La netteté et le détail : les éléments avec des contours sombres et nets qui offrent beaucoup de détails apparaissent plus proches que ceux avec des limites pâles et floues.

Les ombres portées : quand, dans un paysage, le point de fuite coïncide avec le soleil, les ombres portées allongées convergent elles aussi vers ce point de fuite et accentuent la sensation de profondeur de l’espace.


La perspective atmosphérique (colorée ou aérienne):
Premier Traité de Léonard de Vinci (Italie, fin du XV° siècle).

La perspective atmosphérique existe depuis l'Antiquité (Pompéi). Elle figure, dans un paysage, les distances grâce aux dégradés de couleur et à l’intensité lumineuse ; elle crée l’illusion de la profondeur en imitant la manière dont l’atmosphère rend les éléments les plus distants en les faisant apparaître de plus en plus flous et de couleur de plus en plus froide et blanchie, quitte à créer des zones de transition colorée ou « sfumato » (effets vaporeux créant des contours imprécis et créant des passages entre les éléments peints).

Les couleurs : les éléments aux couleurs saturées apparaissent plus proches que ceux aux couleurs ternes ; le contraste entre couleurs chaudes et froides permet la différenciation des plans et permet la mise en évidence des éléments principaux (un personnage par exemple) par rapport au décor.

Le contraste des ombres (propres, autoportées et portées) et des lumières donne l’impression de modelé et de volume aux éléments représentés et suggère l‘espace (jusqu'au clair-obscur).


FOUQUET Jean (vers 1420 - vers 1481), David et l'Amalécite, Ms. Français 247, fol. 135v (Livre VII),
Les Antiquités judaïques de Flavius Josèphe, vers 1470-75, Paris, B.N.F.
Voir l'étude détaillée de cette oeuvre : http://expositions.bnf.fr/fouquet/pedago/dossiers/85/index85b.htm


Du fait de l’utilisation conjointe des deux perspectives, les différents plans d’une image s‘échelonnent ainsi pour recréer l‘illusion de la profondeur :

- le premier plan : d’habitude placé au bas de l’image, il apparaît le plus proche, le plus net et le plus saturé

- le plan médian ou intermédiaire : d’habitude au milieu de l’image, il apparaît plus brouillé et bleui

- l’arrière-plan : d’habitude en haut de l’image, il apparaît le plus lointain, avec peu de détails, flou et blanchi.


CAILLEBOTTE Gustave (1848-1894), La Place de l'Europe, temps de pluie, 1877,
 huile sur toile, 212,2x276 cm, Chicago, The Art Institute.