lundi 12 septembre 2022

1260-NICE, LES PONCHETTES : DE LA PENSION CLERISSI À LA PENSION SUISSE-2 (1850-1866)

 

SOMMAIRE DES ARTICLES DU BLOG ET LIENS DIRECTS


- BALDUS Edouard (1813-1889), Les Ponchettes à Nice, détail, vers 1855,
 tirage albuminé de 28,8x42,4 cm, Washington, National Gallery of Art (ici).
L'une des plus anciennes photographies conservées de Nice et des Ponchettes,
 le Château Smith n'étant pas encore érigé sur le Mont-Boron. 
Voir une autre photographie (antérieure à 1862) sur le site des Archives Départementales
 des Alpes-Maritimes (01NUM 0008/GLT 00269).



UN ARTICLE ÉCRIT EN COLLABORATION AVEC VÉRONIQUE THUIN-CHAUDRON

                


LA MAISON BARLA (1850-1860)


A la vente aux enchères du 1er juin 1850, la Pension Clerissy est achetée par Jean Baptiste Barla (1817-1896), chevalier de l'ordre des Saints-Maurice-et-Lazare, propriétaire, domicilié à Nice, place Napoléon (il deviendra le directeur du Museum d'Histoire naturelle de Nice dans les années 1860). Auguste Justine Clerissy conserve cependant un peu plus de la moitié du 3ème étage du grand bâtiment occidental (côté nord du 5ème et dernier niveau).

Jean Baptiste Barla semble mettre en vente sa propriété dès le début de l'année 1854 (annonce ci-dessous) mais aucune vente n'est réalisée.


- Petite annonce parue dans L'Avenir de Nice dès le 9 mars 1854 p 4,
Nice, Archives Départementales des Alpes-Maritimes.

- CRETTE Louis (c.1824-1872), Nice, La Tour Bellanda, vers 1856-1857,
tirage albuminé de 17.4 x 23.1 cm, Notre Dame (Indiana), Raclin Murphy Museum of Art.



En 1858, lit-on dans le Guide des Etrangers à Nice, la "tour et le joli jardin qui l'accompagne sont la propriété de M. Barla" (Guide des Etrangers à Nice 1858-1859, 1858, troisième partie). 

Dès cette époque, la tourelle qui domine la terrasse de la Tour Clerissy, apparaît peinte de grandes figures féminines allégoriques (plus anciennes ?), de chaque côté de la porte d'entrée de l'escalier qui mène aux appartements

Son clocheton est encore dominé par la figure de Génie ailé portant la lumière (voir ci-dessous) mais cette dernière va disparaître dès 1863.


- FURNE Charles Paul (1824-1875) et TOURNIER Alexis Omer (1835-1855), 
La Plage de Nice - Prise du Château A, 1860, 
vue de la Tour et de l'arrière du bâtiment principal de l'ancienne Pension Clerissy, 
vues stéréoscopiques sur carton de 8,5x17 cm, de la série "De Nice à Gênes par la Corniche", n°2, 
Collection personnelle.


 - Furne Charles Paul (1824-1875) et Tournier Henri Alexis Omer (1835-1885),
 La Plage de Nice - Prise du Château B, détail, 1860,
vues stéréoscopiques de 8,5x17 cm, extraites de la série "De Nice à Gênes par la Corniche", n°2, 
Amsterdam, Rijksmuseum (ici).



LA MAISON CIAIS (1860-1866)


Le 22 janvier 1860, Jean Baptiste Barla revend les bâtiments de l'ancienne Pension Clerissy à l'abbé Ciais (AD, 03E 023/253 fol.199-204).

L'abbé Frédéric Vitalin Chiaissi/Chiais/Ciais, né le 27 avril 1816 à Utelle (Alpes-Maritimes), semble avoir officié et vécu à Rome où il a possédé une maison. Il n'est probablement pas arrivé à Nice avant 1860. C'est avec son notaire familial d'Utelle qu'est conclu l'achat de la Maison Ciais. 

L'abbé reste absent du Guide des Etrangers à Nice de 1858-1859 (ses listes ne sont cependant pas exhaustives) mais est présent dans l'Annuaire des Alpes-Maritimes de 1861 (p 152) où il est dit, "chanoine honoraire résidant de la cathédrale Sainte-Réparate, curé, vicaire forain d'Utelle". Prêtre protonotaire apostolique, chambellan juret de sa Sainteté, il sera nommé chanoine archiprêtre de la cathédrale de Nice le 27 février 1864 (AD, 01V 0004).

L'abbé est ensuite signalé comme propriétaire de la "maison Ciais" des Ponchettes dans les Annuaires des Alpes-Maritimes de 1864 et 1865. Il réside au 2ème étage (4ème niveau) du bâtiment principal et loue les autres appartements (excepté ceux de la partie du dernier niveau appartenant toujours à Augustine Justine Clerissy).


- Photographe anonyme (probablement, DAVANNE Alphonse [1824-1912]), 
La Plage à Nice, détail, fin 1860-début 1861,
tirage albuminé stéréoscopique formé de deux photographies de 6,7x7,2 cm,
 montées sur carton de 17,5x8,3 cm, Collection personnelle.


- BENOIST Félix, dessinateur (1818-1896) et CICERI Eugène lithographe (1813-1890),
Femmes et Pêcheurs de Nice - Plage des Ponchettes
détail d'une lithographie réalisée d'après un dessin exécuté vers 1861 et insérée dans l'ouvrage, Nice et Savoie, vol. 3, Henri Charpentier Imprimeur-Editeur, Paris et Nantes, 1864, Paris, BnF (Gallica). 


- BENOIST Félix, dessinateur (1818-1896) et CICERI Eugène, lithographe (1813-1890), 
Nice - Vue prise de la hauteur de l'ancien Château
détail d'une lithographie réalisée d'après un dessin exécuté vers 1861 et insérée dans l'ouvrage, Nice et Savoie, vol. 3, Henri Charpentier Imprimeur-Editeur, Paris et Nantes, 1864, Paris, BnF (Gallica). 



- Les travaux réalisés par l'abbé Vitalin Ciais

Ses demandes d'autorisation de travaux à effectuer sur les bâtiments de la rue des Ponchettes concernent en 1862 :

- la destruction des deux petits bâtiments situés à l'arrière (côté est), composés d’un seul rez-de-chaussée avec une chambre à bain (premier trimestre 1862 ; demande non conservée ; AM, 2T 10-581), 

- l'utilisation de la mine pour aplanir le rocher et rendre la place régulière avant de reconstruire un seul et grand bâtiment (demande du 22 mars 1862 accordée par un arrêté daté du 29 mars suivant, AM, 2T 10-581),

- la construction du nouveau bâtiment arrière, de trois niveaux, couronné d'une terrasse, avec retour d'équerre côté nord (visible depuis l'ouest), comprenant des cuisines, quelques petites chambres, salles de bains et une chapelle (second trimestre 1862 ; demande non conservée ; AD 03E 023/251 fol.148-171 ; 03E 023/253 Fol. 99-204 ; 3U1 1134 fol.571-572) ; 

- l'ajout d'une tour d'escalier surmontée d'un appartement, accolée au revers du bâtiment principal et desservant la terrasse du nouveau bâtiment arrière (printemps 1862 ; demande non conservée) ;

- l'agrandissement de 12 fenêtres au 3ème niveau du bâtiment principal, du fait de réparations intérieures (10 fenêtres au sud et 2 au nord de l'appartement du 1er étage, au-dessus de l'entresol et du rez-de-chaussée) (printemps-été 1862 ; demande du 30 mai 1862, accordée par un arrêté daté du 6 juin suivant ; AM, 2T 11-738).

Ces travaux, réalisés rapidement par les entrepreneurs Jean Baptiste Augier et Jean Baptiste Faraut, sont visibles sur les vues postérieures (voir l'image ci-dessous).

Une nouvelle série de travaux est envisagée par l'abbé Vitalin Ciais mais du fait d'un contentieux avec Augustine Justine Clerissy, les recours se multiplient (notamment en octobre 1862) et en repoussent l'exécution. 

La situation se règle cependant grâce à une convention sous seing privé, passée chez notaire le 6 décembre 1862, détaillant les travaux envisagés (les modifications extérieures et intérieures) et les engagements respectifs (AD, 03E 023/253 fol.203-204).



 - ANDRIEU Jean (1816-apr.1876), Nice, La plage, 569, début 1863,
 Carte de visite de 6,6x9,7 cm, Collection personnelle. 
Noter les différences avec la vue précédente : la figure de génie ailé de la Tour Bellanda a disparu ; un nouveau et haut bâtiment couronné d'une terrasse ainsi qu'une tour se sont ajoutés à l'arrière du bâtiment principal. 
 Des actes ultérieurs décrivent le jardin en terrasses avec des parterres garnis de treilles, un bosquet d'arbres, des bancs, quelques kiosques, un escalier et deux citernes situées entre la maison et la tour (AD, 03E 023/253 fol.199-204 ; 3U1 1134 fol.571-572).


En 1863, l'abbé Vitalin Ciais peut alors déposer une nouvelle demande concernant :

- l'exhaussement du bâtiment principal par un 6ème niveau (ou 4ème étage), entraînant la réalisation d'un nouvel escalier et d'une nouveau toit (l'ancienne toiture et ses lucarnes disparaissant),

- l'exécution d'un balcon en fer et ardoise avec rampe en fer, filant tout du long de ce nouvel étage, 

- le renouvellement de la façade en peinture (ravalement exécuté de haut en bas et mise en peinture des portes et volets)

- et l'ajout d'un balcon vitré au 3ème niveau (ou 1er étage) de la travée sud-ouest (tel qu'envisagé dès 1844 par Francesco Clerissy) (demandes du 31 mars 1863, accompagnées d'un croquis, accordées par un arrêté municipal du 13 avril suivant ; AM, 2T15-1517) (voir l'image ci-dessous).


- Croquis accompagnant la demande d'autorisation de travaux déposée 
par l'abbé Vitalin Ciais le 31 mars 1863 (AM, 2T15-1517).


Les travaux sont probablement réalisés entre le printemps et l'été 1863 (voir l'image ci-dessous). 


 - Photographe anonyme (probablement ALEO Miguel, 1824-c.1900), Nice, Les Ponchettes, printemps 1863, 
carte de visite de 6,3x10,7 cm, Collection personnelle.
Noter l'aperçu du bâtiment arrière et, sur la façade occidentale du bâtiment principal, la présence du 6ème niveau (4éme étage) avec balcon et le ravalement en cours (échafaudages).


Une serre va être ensuite ajoutée sur la terrasse du bâtiment arrière. Elle date au plus tard de l'année 1864 car elle est visible sur une lithographie réalisée d'après un dessin de Félix Benoist présente dans le Supplément de l'ouvrage Nice et Savoie (1864) et sur une aquarelle d'Edward Lear (ici), datée précisément Nice, 4. P.M - 4. 15 - 9. January 1865 (crayon, encre sépia et aquarelle sur papier, 15,1x50,4 cm, Harvard University, Houghton Library, Ms. Typ 55-26-946).

Gravement malade, l'abbé Vitalin Ciais rédige son testament le 30 mai 1865. Il décède dans sa propriété du 9, rue des Ponchettes, le 16 juin 1865, âgé de 49 ans. 

Un inventaire de sa succession a lieu à partir du 17 juillet 1865 chez maître Charles Arnulf, notaire, au 14, rue de la Préfecture, en présence de ses héritiers potentiels ou de leurs représentants (AD, 03E 023/251 fol.148-171).

L'abbé Ciais a désigné comme sa légataire universelle, Camille Saltarini/Satterini (?-?), veuve d'Antoine Casali(s), rentière, domiciliée à Nice (mais également en Italie), qui hérite notamment, le 7 août 1865, de la Maison Ciais (estimée à 180.000 fr sans les meubles)

Il semble que la veuve Casali n'apporte aucune modification aux bâtiments existants. Six mois après en avoir hérité, elle revend, en janvier 1866, les terrains et bâtiments qu'elle possède aux Ponchettes, à l'hôtelier suisse Jean Edouard Hug.


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